ANTICIPATION – À Toulouse, près de 70 chercheurs, ingénieurs et techniciens, travaillent sur le changement climatique. Ils simulent la façon dont notre climat va évoluer dans les prochaines décennies. Un travail essentiel pour aider les États et les collectivités à prendre des décisions avec des données objectives.
En passant les portes des laboratoires scientifiques du centre national de recherches météorologiques de Toulouse (CNRM), on s’attend à pénétrer dans une véritable fourmilière. Avec des chercheurs s’affairant dans des salles avec ordinateurs, grands écrans diffusant des cartes du globe et outils complexes de mesure. La réalité est en fait plus étonnante. Serge Planton, climatologue, directeur du Groupe de Météorologie de Grande Échelle et Climat, passe dans un couloir un peu austère semblable à celui de tout laboratoire de recherche. Seules quelques affiches aux murs en Français et en Anglais évoquant les mécanismes climatiques indiquent où l’on se trouve. Dans le bureau du chercheur, un simple ordinateur et d’épais rapports posés sur une table. Parmi eux, se trouvent notamment les derniers rapports du Groupement d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). C’est sur ces documents que s’appuient les dirigeants du monde entier lors de négociations telles que la COP21.
«Parmi les 23 groupes de recherches internationaux qui ont élaboré le rapport de 2013 se trouvaient des équipes de Météo France», explique le chercheur. C‘est en effet à Toulouse que des spécialistes construisent les modèles mathématiques permettant de simuler ce que le climat peut potentiellement nous réserver d’ici 50 à 100 ans. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, les chercheurs ne se basent pas sur des mesures réalisées par des balises météo aux quatre coins du globe dont ils extrapoleraient les relevés. Ils travaillent en fait grâce à une sorte de système climatique virtuel. «Ce sont des modèles qui simulent à la fois l’atmosphère, l’océan, la banquise, les calottes polaires, la végétation, on essaye aussi d’introduire les particules en suspension dans l’atmosphère… Le but étant d’arriver à un climat qui mime avec le plus de précision possible la réalité. Nous comparons ensuite sa justesse aux observations faites sur le terrain». Un travail complexe auquel s’ajoute l’utilisation d’instruments de pointe. En 2014, Météo France s’est doté d’un nouveau supercalculateur, parmi les plus puissants au monde, traitant un million de milliard d’opérations par seconde. Avant tout utilisé pour prédire avec davantage de précision la météo, 15 % de ses capacités sont utilisées pour étudier le climat.
Grâce à cette palette d’outils, les chercheurs appliquent à leurs modèles des variations, par exemple les émissions de gaz à effets de serre, et obtiennent des scénarios. «Au vu des engagements actuels des États, nous constatons par exemple qu’il y a deux chances sur trois que le réchauffement planétaire se situe autour de 2,5 °C d’ici 2030», explique Serge Planton. «Pour limiter le réchauffement à 1,5°C, il faudrait stopper dès maintenant toute émission de gaz à effet de serre et laisser dans le sous-sol l’ensemble des ressources fossiles». Peu de chance que cette décision radicale soit prise, et le climatologue se garde de donner son opinion personnelle sur les négociations en cours à la COP22. « En tant que scientifique, notre rôle n’est pas de faire des recommandations politiques mais de donner des informations objectives et de les mettre à la disposition des décideurs». Accumuler les connaissances, pour aider les gouvernements à prendre la meilleure décision.
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