Dans un contexte mondial très anxiogène, les sources d’angoisse sont multiples, pouvant dériver en état anxieux. Quels en sont les mécanismes ? Décryptage.
Pandémie, peur des maladies, crise économique, bouleversement climatique, chômage… Les sources réelles de peur et d’angoisse sont nombreuses. Si, dans de nombreuses situations, la peur peut être salvatrice (pour fuir un danger par exemple), il existe aussi ce que l’on appelle des “troubles anxieux” lorsqu’une personne « ressent une anxiété forte et durable sans lien avec un danger ou une menace réelle, qui perturbe son fonctionnement normal et ses activités quotidiennes », selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). 21% des adultes seraient touchés par ces troubles au cours de leur vie.
L’Inserm rend compte des bases neurobiologiques de l’anxiété grâce à la connaissance des circuits cérébraux et des molécules impliquées dans ce phénomène : « La sérotonine et le GABA (acide gamma-aminobutyrique) sont les deux principales molécules “messagères” entre les neurones (neurotransmetteurs) impliquées dans les états anxieux ». Les circuits neuronaux normaux de réaction à l’environnement sont parfois « détournés ou amplifiés de manière pathologique dans l’anxiété ».
Dans son ouvrage “Psychologie de la peur”, le psychiatre Christophe André explique « pourquoi les mécanismes de nos peurs peuvent parfois se dérégler, et comment notre cerveau émotionnel prend alors le pouvoir ». Il se base sur son travail et sur son expérience de médecin et de psychothérapeute à l’hôpital Sainte-Anne, à Paris, auprès des patients « souffrant de peurs et de phobies souvent sévères ».
Christophe André énumère les prédispositions aux peurs : si l’on a par exemple un tempérament d’inhibition face à la nouveauté, si l’on est sujet à l’hypersensibilité, ou si l’on a été confronté à des expériences de peurs pénibles et répétées. Il décrypte les mécanismes de l’angoisse au niveau comportemental : la logique d’évitement qui nous fait fuir devant ce que l’on croit représenter un danger, mais cet évitement même nous empêche de vaincre notre peur. Au niveau des mécanismes émotionnels, il analyse le circuit cérébral de la peur. L’une des clés réside dans l’amygdale dans notre cerveau, qui traite les émotions, détecte les menaces et les dangers, contient notre mémoire émotionnelle et intègre notre circuit de la peur.
Selon Inicea, organisme gestionnaire d’établissements dédiés aux soins psychiatriques, l’amygdale joue un rôle « dans la détection et le traitement des informations émotionnelles, leur reconnaissance et les réponses comportementales et physiologiques qui leur sont associés”, et a une fonction d’alarme en cas de danger.
« Notons qu’il existe des connexions avec le cortex préfrontal, dont la fonction est d’une part régulatrice, pour raisonner la sensation de peur, et d’autre part pour avoir l’expérience consciente de cette peur (importante pour les apprentissages ultérieurs qui peuvent en découler) », précise Inicea.
Dans “Psychologie de la peur”, Christophe André propose des pistes pour faire face à l’angoisse et la peur. Il s’agirait d’y désobéir, de s’informer sur ce qui fait peur, de ne plus avoir peur d’avoir peur. Il apporte des éléments de compréhension sur notre vision du monde : dans le cas des troubles anxieux, il s’agit de comprendre que le danger « réside en soi-même » et non à l’extérieur, et qu’il convient de se confronter à ses angoisses, de manière progressive, émotionnelle et raisonnable.
Si les traitements médicamenteux (anxiolytiques et autres) ne font « qu’endormir la peur », une thérapie comportementale et cognitive peut être une solution aux états anxieux. Enfin, Christophe André affirme le besoin de prendre soin de soi, d’adopter une bonne hygiène de vie, que ce soit par l’exercice physique ou l’alimentation, d’apprendre à se relaxer et à méditer, et de maintenir ses efforts sur la durée.
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