Un échassier-crieur public qui vient chanter à votre fenêtre, un couple qui se met à danser sous votre balcon ou un orchestre qui se produit au pied de votre immeuble. Pendant le confinement, la mairie de Bègles a envoyé les compagnies habituées de sa programmation, proposer des spectacles sous les fenêtres des habitants.
Pendant le premier confinement, les balcons et les fenêtres sont devenus des lieux incontournables de la vie sociale. Places fortes des apéros ”verticaux” entre voisins, tribunes, pistes de danse ou salles de gym, leurs usages se sont spectaculairement diversifiés. À Bègles, ils se sont même transformés en salle de spectacle municipale. « À cette période, nous nous sommes brutalement retrouvés obligés d’annuler notre saison culturelle. Nous ressentions une vraie inquiétude chez les artistes concernés quand à leur avenir », évoque Florence Cailton, responsable du service culturel de la mairie, qui témoigne d’une période éprouvante. « Rapidement, nous avons senti l’urgence de nous adapter pour éviter que la culture ne se retrouve à l’arrêt. Si nous ne pouvions pas faire venir les spectateurs dans les lieux de diffusion, alors nous devions déplacer les artistes au plus près des habitants », explique celle qui est également en charge du Creac, l’association qui porte la saison culturelle de la ville.
Dès lors, son équipe a contacté les compagnies locales et habituées de la programmation municipale, pour réfléchir à des formes exportables sur le terrain. « Il fallait que les spectacles proposés puissent être joués dans une cour d’immeuble et qu’ils soient visibles et audibles depuis le rez-de-chaussée jusqu’au dernier étage », précise Florence Cailton. Un crieur public perché sur des échasses, un duo de danse contemporaine, des jongleurs, un orchestre de musique classique et, même, un concert de rock portatif… Les propositions se sont multipliées rapidement. « Toutes les compagnies sollicitées ont répondu présentes. Nous avons conçu la programmation au fil de l’eau. Sans faire de communication ni de programme pour éviter les attroupements. Chaque spectacle était une surprise pour les riverains qui sortaient à leur balcon », se félicite-t-elle. Et le succès est au rendez-vous.
Dès les premières notes ou les premiers signes d’animation, les rideaux se tiraient et le public fleurissait aux fenêtres. « Nous ne nous attendions pas à une rencontre aussi immédiate et chaleureuse avec le public. Il y avait une belle écoute. Ce fût une véritable renaissance », raconte Florence Cailton qui se souvient de moments émouvants. Notamment, le passage de Kevin Dylan Velours, le crieur public sur échasses de la compagnie Bougrelas que les Béglais pouvaient mandater pour passer des messages spectaculaires à des proches ou des voisins, en en faisant la demande par mail au service culturel. « Des parents qui vivaient dans le Nord de la France ont ainsi pu souhaiter un joyeux anniversaire à leur fils, sous les applaudissements de tout le voisinage », se remémore-t-elle.
Autre temps fort, cette représentation de danse contemporaine qui s’est produite devant chacune des façades d’une maison de retraite. Au total, ce sont près d’une vingtaine de spectacles qui sont allés, au sens propre, à la rencontre de leur public. « Nous avons veillé à ce qu’il y ait des propositions partout. Et en priorité dans les quartiers ou il y avait des tensions », précise-t-elle. Une programmation qui s’est également attaquer aux préjugés puisque le concert de musique classique au pieds des immeubles d’un quartier sensible a été une véritable réussite. Car après tout, que ce soit dans l’orchestre, au paradis, au balcon ou à la fenêtre, le spectacle vivant n’est-il pas toujours une ouverture sur le monde ?
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