DESTIN. Imène Boudj revient de la Fashion week de Milan. Et ce n’est pas du public qu’elle y a assisté mais sur le podium. Elle a défilé en fauteuil roulant aux côtés de mannequins professionnelles, fière de montrer à tous qu’elle est parvenue à faire ce dont elle avait envie.
C’est un peu par hasard qu’Imène Boudj, jeune mère au foyer, s’est retrouvée propulsée sous les projecteurs des podiums de mode. «Ma sœur, mannequin elle-même, m’a proposé il y a quatre ans de me prêter au jeu d’une séance de shooting. Et ça m’a beaucoup plu», se rappelle-t-elle, le sourire aux lèvres. Rapidement, elle y prend goût et envoie des candidatures pour des castings, créé son book sur Internet, loin de se douter qu’il attirerait les plus grands. Car son profil intéresse les professionnels de la mode. Excitée à l’idée de montrer ce qu’elle sait faire, elle ouvre son ordinateur sur son site Internet, puis sur l’agence italienne Iulia Barton, spécialisée dans la sélection de modèles qui ne répondent pas aux standards de la mode. Elle va y signer son premier contrat de mannequin : «Je suis tellement contente, et surprise à la fois. Je commence réellement à croire que je peux en faire mon métier», lance Imène Boudj, relisant avec émotion les SMS qu’elle a échangés avec la directrice de l’agence lui annonçant la bonne nouvelle. Posé sur ses genoux, un exemplaire de Gazelle, le magazine de la femme maghrébine. «En couverture, c’est moi !», précise-t-elle, les yeux encore pétillants.
«Le positif attire le positif. Avoir confiance en soi provoque la bienveillance»
Même si elle avoue s’être fait rabrouer quelques fois par des agences toulousaines ou avoir subi des remarques désagréables par des photographes, «et je sais que c’est à cause de mon handicap», elle ne baisse pas les bras et n’en tient pas rigueur. De nature optimiste, elle n’estime d’ailleurs pas être observée d’une manière particulière : «Je ne ressens pas de regards pesants. Généralement, les gens me fixent dans les yeux quand ils s’adressent à moi.» Et quand ils se font insistants, il s’agit pour elle d’un geste de curiosité dans lequel elle ne voit pas forcément une offense : «Les gens veulent souvent savoir ce qu’il est arrivé pour qu’une personne soit en fauteuil, ça n’a rien de malveillant, c’est juste de la curiosité !» Pour elle, tout dépend de l’image de soi que l’on renvoie aux autres : «Le positif attire le positif. Avoir confiance en soi provoque la bienveillance», pense-t-elle. Elle ne se cache pas, au contraire, et la jeune mannequin en devenir se dit ravie lorsqu’on la complimente sur son physique.
Cette acceptation de sa situation, Imène Boudj l’a acquise en travaillant sur elle-même : «Adolescente, j’avais peur de rester seule toute ma vie, je ne me trouvais pas belle.» Victime d’un accident de voiture à l’âge de 8 ans, elle estime que sa famille n’a jamais fait de différence avec ses frères et sœurs. «Je pense que cela a été salutaire pour moi. Je crois que l’entourage direct des personnes handicapées les protège trop. Nous, nous n’en parlions jamais, par peur de se faire du mal certainement, mais cela m’a aidé à me débrouiller seule et à gagner confiance en moi.» En revanche, elle aborde le sujet naturellement avec sa propre fille de huit ans qui, du coup, n’a aucune appréhension face au handicap de sa mère… «Mais je n’aime pas trop ce mot», s’interrompt-elle, «je préfère dire ma “pathologie”. Je suis paraplégique. Le handicap, c’est dans la tête… celle de ceux qui me regardent !»
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