Des cafés associatifs à l’école du système D
ALTERNATIVE. Alors que l’heure est au serrage de ceinture dans le monde de la culture, des initiatives citoyennes émergent pour échapper à la sinistrose. En marge des structures classiques, les cafés associatifs font souffler un vent de fraîcheur en mettant la culture au service de véritables projets de vie.
C’était en 2012, dans le quartier Arnaud Bernard. À une semaine d’intervalle et dans un rayon de 100 mètres à peine, deux nouveaux lieux ouvraient leur porte : Chez Ta Mère et La Maison Blanche. Alors que cette coïncidence aurait pu s’avérer fatale, cinq ans après, les deux sont plus que jamais vivants et le quartier est devenu un passage obligé pour toute une scène artistique émergente autant qu’un haut lieu de rencontres et d’échanges.
Ce succès, c’est celui des cafés culturels associatifs. Dans le sillage de grands frères tels que les Pavillons Sauvages, ces structures à but non lucratif ont essaimé à Toulouse ces dernières années. La plupart ont été créées par des aventuriers en quête de nouveaux rapports à l’art. Et l’engouement est réel. Le quartier Saint-Cyprien est lui aussi bien fourni en la matière avec le Caméléon, l’Amanita Muscaria ou encore La Candela, créée il y a trois ans par Guilhem. «Après avoir pas mal vadrouillé, j’avais envie d’une expérience collective mais ne connaissant personne en arrivant, je suis parti tout seul en espérant entraîner du monde», raconte ce dernier. Face à son enthousiasme, le projet n’a pas tardé à trouver sa dimension collaborative et aujourd’hui, Guilhem est entouré d’une salariée en contrat aidé et d’une centaine de bénévoles qui participent à la vie du site. Comme la plupart des cafés culturels associatifs, le modèle de la Candela fonctionne sans aucune subvention et repose sur trois ressources : la location du lieu pour les activités et stages (yoga, théâtre, lindy-hop…), les recettes liées à la restauration et au bar, et les adhésions à l’association, impératives pour consommer. Les bénéfices générés à l’entrée des concerts et spectacles sont, eux, réservés aux artistes, faute de moyens pour régler en cachet.
Et c’est là que le bât blesse. Bien que devenus des maillons essentiels de la culture, les cafés associatifs souffrent d’un cadre juridique ambigu concernant la rémunération des artistes. Ainsi, nombreux sont ceux qui n’ont pas souhaité s’exprimer afin de ne pas trop attirer l’attention. Ce n’est pas le cas de Valentin, fondateur du Manding’art. Cette salle du quartier Bonnefoy, créée il y a trois ans, a eu une première année délicate. Des relations conflictuelles avec une voisine et avec la mairie l’ont amené à réduire la voilure de sa programmation culturelle. «Le projet est né du constat d’un gros manque de lieux à disposition des associations et des artistes. Et cela s’est vérifié, on a très vite trouvé notre place dans le quartier. Ça pourrait être encore plus grandiose tellement nous sommes sollicités mais on se contente de faire cantine le midi, d’accueillir des activités et de programmer des choses soft le week-end», souffle ce professeur de capoeira. Régulièrement, le Manding’art abrite aussi le bal des anciens du quartier.
Car le point commun de ces cafés est d’être avant tout des lieux de vie. Une fonction sociale qui permet de faire émerger des pratiques populaires très présentes dans la ville comme les bals “forro” ou le théâtre d’impro. «Par rapport aux structures classiques qui ont de vrais projets culturels, notre démarche est différente mais pas opposée. On sort du rapport de consommation, il s’agit surtout de l’utiliser comme un levier de rencontres humaines», résume Guilhem de la Candela.
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