BISTOURI 2.0 – Nicolas Doumerc, chirurgien en urologie au CHU de Toulouse, fait partie des premiers praticiens français à avoir réalisé des opérations assistées d’un robot. Et à avoir amorcé ce qu’il estime être une révolution médicale.
Une patiente inopérable sauvée grâce à un robot. C’est la prouesse médicale mondiale qui s’est déroulée dans les blocs opératoires du CHU de Toulouse en juillet. Une femme s’est vue transplanter le rein de sa sœur. Toutes deux ont été opérées par voie vaginale. Une opération rendue possible grâce au robot assistant Da Vinci qui permet d’opérer sans inciser l’abdomen. Jusqu’ici, cette patiente ne pouvait subir d’intervention à cause de son obésité. Grâce à cette nouvelle méthode de transplantation, elle a pu recevoir un rein.
Aux manettes, se trouvait notamment Nicolas Doumerc, chirurgien-urologue au CHU de Toulouse. «Cette intervention résume toute l’utilité des robots assistants. Elle a notamment permis de montrer à quel point ils repoussent les limites de la chirurgie», s’enthousiasme le médecin avant de couper rapidement court aux fantasmes. «Le robot n’opère pas seul. Le médecin reste au centre de l’intervention. C’est lui qui actionne les joysticks qui commandent les quatre bras de l’appareil. Le robot ne fait que reproduire les mouvements de la main humaine. Le chirurgien se trouve à deux ou trois mètres du patient et pilote grâce à des caméras qui permettent d’avoir une vision en 3D.» Infirmiers, aides-soignants restent quant à eux au chevet du patient.
“Les robots nous permettront de nous détacher de l’acte purement technique”
En 2009, le CHU de Toulouse fait partie des premiers centres hospitaliers à s’équiper de ce type d’appareil. À cette date, Nicolas Doumerc revient d’une année de formation en Australie où il a appris la chirurgie robotique. Sept ans plus tard, il est devenu l’un des experts en la matière à Toulouse. Il forme les médecins et futurs médecins à cette technologie. Et le robot fait désormais partie de sa routine. «Je réalise quasiment toutes mes interventions avec cette méthode. Cette spécialisation est nécessaire car c’est en pratiquant que l’on devient performant.» Dans le département d’urologie de Rangueil, l’utilisation du robot est loin d’être anecdotique. Elle représente près de 20 % des opérations, principalement des ablations de la prostate ou des amputations partielles du rein pour traiter des tumeurs.
Si aujourd’hui des patients viennent de toute la région pour demander à être opérés de la sorte, la méthode a aussi ses détracteurs. Notamment en raison de son coût. Chaque robot vaut 1,8 million d’euros et chaque intervention 1 500 euros. «Ce prix a vocation à baisser lorsque des concurrents à la société Intuitive surgical, qui détient aujourd’hui le monopole, seront entrés sur le marché», assure Nicolas Doumerc.
Un coût qui ne doit, selon lui, éclipser les avantages de cette technologie. «Elle apporte un réel confort pour les patients avec des saignements et des douleurs moins importants. Elle permet aussi des hospitalisations plus courtes. On pourrait imaginer, dans un futur proche, des ablations de la prostate où le patient entre le matin et sort le soir même.» Une évolution inéluctable selon le médecin, qui imagine même des opérations à distance dans des zones reculées.
Quitte à déshumaniser les soins ? «Les robots nous permettront de nous détacher de l’acte purement technique dans lequel certains confrères sont peut-être trop investis. Nous pourrons nous focaliser sur l’annonce du diagnostic, le suivi des patients… Ce sera au contraire un gain d’humanité», prédit Nicolas Doumerc.
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