VILLAGE. La rue de la République et ses nombreuses boutiques africaines sont une spécificité désormais bien connue de la rive gauche, mais dont on se demande parfois l’origine. Le JT a remonté la piste entre les vitrines de perruques et les rayons garnis de manioc.
Seuls les vrais savent. Pour les amateurs de cuisine africaine en quête d’épices ou de produits exotiques, une seule et même adresse à Toulouse, la rue de la République. Épiceries, restaurants mais également coiffeurs, boutiques de soins et de cosmétiques… Depuis environ 20 ans, l’artère reliant le Pont-Neuf à la place Saint-Cyprien est devenue un condensé d’Afrique. Comment ? Il suffit de pousser les portes pour avoir des éléments de réponse. « Vous êtes bien tombé, c’est moi qui suis à l’origine du malheur », lance tout en ironie Gabriel Nzelemona. Comme dans tout phénomène, il faut un précurseur, c’est l’emblématique patron du restaurant le Mayombe qui a joué ce rôle rue de la République. « Je suis arrivé le premier en 1985. J’avais un petit budget et comme la rue était à l’époque commercialement sinistrée, selon les termes de la Chambre de commerce et d’industrie, j’y ai trouvé un local pas cher », raconte celui que tout le monde appelle Gaby dans le quartier.
Jusqu’aux années 1990, l’activité était maigre dans la rue. C’était l’époque du double sens de circulation et d’un couloir réservé aux bus, comme le rappelle Daniel Weissberg, professeur de géographie installé là depuis 1982 : « En bas de chez nous, il y avait un local qui est resté en friche pendant des années, aucun commerce n’y était pérenne. C’est quand le couloir de bus a été enlevé que les magasins africains ont commencé à s’installer en nombre. » Quelques années après lui, Gabriel Nzelemona se souvient ainsi de l’arrivée de l’épicerie d’une certaine Mme Bookman, puis d’un effet boule de neige : « Ce phénomène de concentration existe dans toutes les grandes villes. Il suffit d’un premier pour que s’installe ensuite une sorte de cooptation. Moi-même j’ai coopté pas mal de commerçants. » Akol A. Tong, ancien basketteur, originaire du Sud Soudan a, lui, ouvert son épicerie en 1999. Derrière sa caisse, le géant de 2,10 m qui domine la clientèle de tout son sourire raconte la même histoire : « C’était déjà très cher en centre-ville, alors qu’ici, à proximité directe, les loyers étaient ridiculement bas et les propriétaires contents de trouver preneurs. »
Mais également les pauvres, les immigrés ou les parias. Aujourd’hui, l’ancien faubourg populaire et malfamé est devenu l’un des quartiers les plus prisés. Et les commerçants sont fiers d’y avoir contribué, à l’image d’Akol : « Quand je suis arrivé, il y avait beaucoup de dealers et de squatters dans les locaux abandonnés et les halls d’immeuble. Petit à petit, nous avons chassé cette population. » « L’arrivée des commerces africains a contribué au retour de la sécurité », confirme Daniel Weissberg. « L’artère s’est régénérée et aujourd’hui, certaines boutiques ont même des clientèles plutôt haut de gamme au vu des voitures qui stationnent. » Des enseignes comme Carrefour et Casino ont d’ailleurs fait les yeux doux à Akol pour récupérer son local mais ont essuyé un refus poli. Car, au-delà des affaires, aujourd’hui, personne ne veut quitter cette rue où « tout le monde se connaît et cohabite en bonne intelligence », dixit Daniel Weissberg. « C’est un des derniers villages de Toulouse », assure de son côté Gaby. « Il y a certes beaucoup d’Africains, mais il y a aussi des commerçants asiatiques, italiens, français, c’est une vraie rue de la République ! »
Commentaires
Lucie le 07/10/2024 à 16:47
La responsable vétérinaire de l'aéroport Toulouse-Blagnac m'a dit que beaucoup d'animaux exotiques vivants circulent illégalement entre l'Afrique et Toulouse... Pour finir dans les assiettes des restau de l'avenue de la République. Je ne sais pas s'il y a beaucoup de ces pauvres singes qui sont mangés à Toulouse mais ça mériterait une enquête! #pasvegan