Juliette Mey, originaire de Toulouse, poursuit son ascension dans le monde de l’Opéra. À seulement 24 ans, elle est la “Révélation artiste lyrique” des Victoires de la musique classique 2024. Rencontre.
Vous avez sûrement dû entendre son nom dans les médias ces dernières semaines : Juliette Mey est la nouvelle “Révélation artiste lyrique” de l’année aux Victoires de la musique classique 2024. Couronnée lors de la cérémonie qui s’est déroulée à Montpellier, le jeudi 29 février, la Toulousaine gravit les échelons du chant lyrique.
Juliette Mey, née en 2000, commence l’apprentissage du violoncelle à l’âge de 7 ans dans le cadre des “classes à horaires aménagés” au Conservatoire de Toulouse, sur les conseils de ses deux parents mélomanes. « Quand j’étais petite, ils chantaient dans les chorales amateures. Ils m’ont alors donné cette possibilité de faire de la musique sans m’y obliger. J’avais toujours le choix de faire ce que je voulais », raconte Juliette Mey. En parallèle, elle intègre une classe réservée aux musiciens classiques à l’école Lakanal, non loin de l’établissement musical.
Quatre ans plus tard, elle rejoint la Maîtrise de Toulouse où elle explore le chant. Cette expérience confirme son amour pour cette discipline. Au lycée, Saint-Sernin, elle rencontre une professeure de chant qui enseigne au Conservatoire de Montpellier et de Toulouse, Léa Pasquel, qui la pousse à se consacrer davantage au chant lyrique. Destinée à faire des études scientifiques, et plus particulièrement de biologie, la chanteuse décide finalement, après mûres réflexions, de se lancer dans l’univers de l’Opéra.
Puis, tout s’accélère. Juliette Mey entre au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris en 2021. Elle enchaîne alors les concours et remporte celui des Jeunes espoirs Raymond-Duffaut d’Avignon en 2021, de la 11e Académie du jardin des Voix et de l’Académie du festival d’Aix en 2022. Ces distinctions marquent ainsi le début de sa carrière.
Mais quel est le quotidien d’une jeune chanteuse lyrique ? Juliette Mey est très proche de ses parents. Ces derniers la soutiennent sans condition. Elle peut également compter sur les encouragements de son conjoint, un corniste toulousain qui vit et travaille actuellement en Suisse, tandis qu’elle vit à Paris. Leur relation à distance trouve malgré tout son équilibre au milieu des répétitions et de leurs projets respectifs : « Il est un véritable soutien, car il comprend ce que je vis. Nous essayons de nous voir au moins une fois par mois. »
Car son agenda est bien rempli. En effet, Juliette Mey poursuit actuellement ses études au conservatoire de Paris, tout en assurant de nombreuses prestations. Ces dernières semaines, elle était notamment à l’Opéra de Rouen, pour camper le rôle d’Isaura dans l’œuvre de Gioachino Rossini, “Tancredi”. Après un bref interlude à Paris, elle repartira pour l’Opéra de Toulon, où elle interprètera l’Amour/Le valet dans “Le Couronnement de Poppée”, une œuvre de Claudio Monteverdi.
Quant à ses journées, elles sont rythmées par le travail vocal qu’elle effectue tous les matins, et des répétitions l’après-midi, jusque dans la soirée : « En général, nous travaillons les productions de 14h à 22h », précise-t-elle. Par-dessus tout, la chanteuse doit avoir une hygiène de vie irréprochable. Elle détaille : « Pour ne pas abîmer ma voix, je ne bois pas, je ne fume pas, et je dois surtout dormir correctement. »
Cependant, cela comprend certains sacrifices pour l’artiste lyrique. En effet, ce rythme de vie ne lui permet pas toujours de trouver du temps pour ses proches : « C’est délicat parfois. Je ne vois pas toujours mes amis ou ma famille. Je m’enferme un peu quand j’ai de gros projets pour rester concentrée. Je peux ainsi passer de longues périodes sans les voir », regrette-t-elle.
Malgré tout, Juliette Mey essaie de trouver un peu de temps pour elle. Elle aime tout particulièrement profiter de la nature, surtout à la montagne. Elle explique : « J’aime beaucoup la randonnée. Cela me permet de me ressourcer, de recharger mes batteries. Et c’est aussi une source d’inspiration pour la musique car, lorsque je chante des lieds, les mélodies, beaucoup parlent de l’amour et de la nature. À travers la randonnée, j’enrichis donc mon imaginaire pour améliorer mes interprétations. »
La jeune chanteuse cherche toujours à progresser. Elle le fait également en écoutant les grands artistes lyriques, « pour enrichir [sa] culture ». Mais au-delà de ce répertoire classique, la Toulousaine a bien plus d’une playlist dans son téléphone. « J’aime beaucoup écouter mes amis. À Toulouse, il y a plein de gens qui font de la super musique, je pense notamment à Étienne Manchon, Malo Evrard, Amandine Bontemps… J’adore écouter ce qu’ils font », précise-t-elle.
Elle aime également le jazz, Claude Nougaro ou encore les Pink Floyd. Et pour se détendre, elle a une playlist bien à elle : « J’utilise la musique latine pour me déstresser, ça marche très bien, surtout avant un concert ou un concours. Je transforme ainsi le stress en énergie positive. » Dans le même esprit, elle avoue ses morceaux “plaisir coupable” : les Gipsy Kings, et leurs titres “Bamboléo” et “Volare”. « Ce ne sont pas mes chansons préférées, mais j’adore », explique-t-elle en chantant.
Plus sérieusement, son talent la mène, en décembre 2023, aux Victoires de la musique 2024, pour lesquelles elle est nommée dans la catégorie “Révélation Artiste lyrique”. « J’étais surprise et contente, mais j’avais quelques appréhensions, ne me sentant pas forcément prête à l’engouement médiatique que cette nomination impliquait. » Bon gré, mal gré, elle enchaîne les interviews et les vidéos de présentation. Il fallait également à la jeune chanteuse lyrique choisir l’œuvre qu’elle allait chanter, ainsi que sa tenue : « Il y avait une certaine pression autour de cette prestation. Et puis, passer à la télévision en direct, ça fait peur, même si cela fait partie du métier. »
Durant la cérémonie, retransmise sur FranceTV, Juliette Mey laisse alors le public pantois avec son interprétation de “Non più mesta”, final de “La Cenerentola”, de Gioachino Rossini (que vous pouvez découvrir en vidéo ci-dessus). Puis le vainqueur de sa catégorie est annoncé : la Toulousaine l’emporte face à Lauranne Oliva, soprano, et Léo Vermot-Desroches, ténor. Une véritable surprise pour la jeune chanteuse : « Je ne m’y attendais pas du tout, j’ai eu l’impression de voler la victoire à Lauranne et à Léo. Je voulais vraiment la partager avec eux et qu’ils montent sur scène avec moi. En tout cas, j’étais très touchée. »
Juliette Mey rejoint ainsi la liste des grands artistes lyriques français. De plus, elle espère que sa prestation lors de la cérémonie « donnera envie d’écouter de l’opéra au public. » Ce dernier aura d’ailleurs bien l’occasion de réentendre parler d’elle, puisque son agenda est complet avec notamment des concerts, des enregistrements, des récitals, mais aussi une tournée internationale de musique baroque qui l’amènera aux États-Unis, en Italie ou encore en Angleterre. Et peut-être qu’un jour, les Toulousains pourront venir l’applaudir au Théâtre du Capitole ?
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