Première région apicole de France, l’Occitanie est elle aussi touchée par l’importante mortalité des abeilles atteignant plus de 30% selon les territoires. Pour les sauver, les apiculteurs essaient de faire changer les politiques agricoles. En attendant, les villes tentent de devenir de nouveaux refuges pour les ruches.
Alors que la première Journée mondiale de l’abeille décrétée par l’ONU a eu lieu ce 20 mai, l’ambiance n’est pas vraiment à la fête pour les apiculteurs. « La mortalité de mes abeilles atteint 80% cette année, c’est le plus important depuis 2002 », lance Olivier Fernandez, président du Syndicat apiculteurs Midi-Pyrénées. Le phénomène touche toutes les régions, comme la Dordogne où l’on dénombre 2 500 colonies mortes, mais aussi les autres pays européens. Pourtant, les causes de l’hécatombe sont floues. « À la sortie de l’hiver, il y a un taux de perte normal de 5%. On estime que le frelon asiatique est également à l’origine de 10% des abeilles tuées », poursuit Olivier Fernandez.
Si cet hiver a été plus long que les autres, selon l’Union nationale de l’apiculture française (Unaf), la météo ne peut pas être tenue comme unique responsable. Un autre facteur est dénoncé : la contamination chimique par les pesticides. « Je constate que mes ruchers situés en zone de montagne souffrent beaucoup moins que ceux installés proches de champs de maïs par exemple », témoigne Martin, apiculteur en Haute-Garonne. Au Sud du département, suite à l’épandage d’un fongicide, une colonie entière a été décimée.
De nombreuses études ont montré le rôle ‘’tueur d’abeilles’’ des pesticides, en particulier des néonicotinoïdes. Trois d’entre eux ont d’ailleurs été proscrits par la Commission européenne en avril dernier. Pourtant la France traîne des pieds. Stéphane Travert, le ministre de l’Agriculture, tente même de remettre en cause cette interdiction. Selon le gouvernement, le premier facteur des mortalités déclarées serait « d’origine pathologique », la seconde étant « les mauvaises pratiques apicoles ». « C’est vrai que certains apiculteurs n’apportent pas de sirop de nourrissement en hiver et leurs colonies meurent de faim, mais cela représente une minorité », poursuit Martin.
Les apiculteurs continuent d’alerter les pouvoirs publics. Olivier Fernandez vient ainsi de proposer à Emmanuel Macron une candidature spontanée au poste de ministre de l’Agriculture ! Gilles Lanio, le président de l’Unaf, réclame au gouvernement « l’indemnisation des apiculteurs touchés ». En attendant, de nombreuses actions sont menées pour préserver les abeilles. En particulier dans les villes. Partenaire du programme Abeilles sentinelles de l’environnement, initié par l’Unaf, la ville de Blagnac a installé dès 2008 des ruches au Ritouret. Depuis un an, 80 ruches ont également pris place à l’aéroport.
Sur le terrain, les apiculteurs cherchent eux aussi des solutions. Ils privilégient par exemple des emplacements proches de champs en culture biologique ou suivent l’activité de leurs abeilles grâce à BeeGuard, un capteur créé par une société toulousaine pour collecter des données sur la ruche. L’enjeu est immense: non seulement pour les 164 000 ruches d’Occitanie et donc pour la production de miel local (3 000 tonnes en 2015), mais également pour la biodiversité et l’agriculture. En Europe, 84% des cultures sont pollinisées grâce aux abeilles !
Maylis Jean-Preau
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