Suivant les conseils du gouvernement qui incitait à limiter ses déplacements en raison de la canicule, j’ai décidé de rejoindre les rangs des 29 % de Français qui pratiquent, selon l’Ifop, le télétravail de manière occasionnelle.
© Daria Shevtsova/PexelsS’il y a bien un avantage au télétravail, c’est bien celui de reprendre le pouvoir sur son agenda. L’expérience commence donc, dès la veille au soir, par un petit plaisir : ne pas mettre le réveil pour le lendemain. Pour la majorité des salariés y ayant recours, la pratique permet surtout d’éviter des trajets domicile/travail de plus en plus longs. Même si de mon côté, je n’économise qu’un quart d’heure de vélo, la journée commence avec le sentiment précieux d’avoir enfin le temps de prendre le temps. Seul le linge humide qui patiente dans la machine obscurcit le tableau. « Puisque tu restes à la maison, tu pourras l’étendre », m’a lancé ma compagne en partant.
La charge de travail quotidienne ayant été évaluée au préalable, et les rendez-vous téléphoniques déjà calés, je peux m’attarder sans culpabiliser sur le petit-déjeuner. Mais, à peine attelé à ma tache, c’est le couac. En ouvrant mon ordinateur personnel, je réalise que j’ai oublié de mettre en place le transfert de ma boîte mail professionnelle, que je mets d’ordinaire un point d’honneur à ne consulter que depuis le bureau. Premier coup de fil aux collègues donc, pour leur demander de me faire suivre d’éventuels courriels importants.
Après une matinée finalement plutôt efficace et une vraie pause déjeuner, je succombe aux appels du canapé, une bonne BD entre les mains. Au moment où celle-ci commence à me glisser des doigts, je me ressaisis héroïquement. Il ne faudrait pas donner du grain à moudre à cette idée encore très ancrée en France qu’un employé doit être surveillé pour être productif. Le télétravail reposant sur la confiance, mieux vaut garder celle de son employeur si l’on souhaite réitérer l’expérience.
Alors que je suis dans la dernière ligne droite de l’article du jour, ma petite famille est de retour au foyer. Pris dans une embuscade impliquant cowboys et indiens, je dois m’isoler pour mettre la touche finale au papier et tout envoyer en temps et en heure. Le stress commence à monter. Et ce n’est pas fini. Tout en donnant le bain à mon fils, je réponds à l’appel de ma rédactrice à chef qui souhaite avoir des précisions sur mon travail. La sacrosainte frontière entre vie professionnelle et vie de famille commence déjà à se fissurer.
Briser la routine, se délester des conventions sociales inhérentes au monde de l’entreprise, le télétravail procure un sentiment de liberté salutaire. À condition d’une rigueur et d’une organisation sans faille. Tant professionnellement, via une adhésion indispensable de sa hiérarchie et de ses collègues, qu’au niveau personnel. Actuellement, seulement 6 % des télétravailleurs le font de manière contractualisée. Mon activité, dans laquelle les échanges permanents et la réactivité sont indispensable, n’est pas forcément la plus adaptée à l’exercice. Mais si le principal problème évoqué par les télétravailleurs, selon une étude de Malakoff Médéric, est le risque de perte de lien social, une journée de solitude de temps à autre s’apprécie d’autant plus lorsque l’on est bien entouré au quotidien.
Commentaires