Premiers pas. Volonté affichée du maire de Toulouse, l’équipe en place depuis quasi un an, compte de nombreux jeunes élus. Des nouveaux nés en politique qui amènent un peu de sang frais au conseil municipal. Une nouvelle génération engagée, mais pas forcément encartée.
Par Coralie Bombail et Thomas Simonian
La valeur n’attend pas le nombre des années, selon le dicton. La nouvelle majorité l’a bien compris, il faut laisser une place aux jeunes. D’abord pour assurer un certain renouvellement des générations au pouvoir, mais également pour rafraîchir l’image de la classe politique. Non, les élus ne sont pas tous des vieux briscards accrochés à leur fauteuil comme une huître à un rocher ! Le tout est de ne pas ‘‘recruter’’ des jeunes pour avoir des jeunes, qui, au sortir du mandat, ne seront pas aptes à assurer des fonctions plus importantes. « Les jeunes de la majorité ne sont pas là pour faire joli, ils ont de vraies responsabilités », affirme Emilion Esnault, conseiller municipal délégué en charge de l’éclairage public, « Sophia Belkacem est maire de quartier et très investie dans ses fonctions, tout comme Julie Escudier. Christophe Alvès est adjoint au maire », cite-t-il en exemples. Lui-même a été ‘‘repéré’’, il y a longtemps, par Jean-Luc Moudenc sur le plateau de TLT : « J’ai participé à un débat étudiant-maire de la ville en tant que vice-président des étudiants de l’Institut national polytechnique de Toulouse », raconte-t-il. Suite à quoi, il a commencé à rédiger « des notes » pour Jean-Luc Moudenc, qui était alors maire de la ville. La défaite en 2008 le pousse à s’engager au sein de l’association d’opposition Toulouse avenir, dont il a été le responsable de la communication. Une expérience très formatrice « car Jean-Luc Moudenc a toujours été très exigeant sur la qualité de notre travail, mais il sait expliquer les choses et donner des conseils pour qu’on s’améliore ». Dans l’ombre de la reconquête pendant 6 ans, Emilion Esnault est l’exemple type du ‘‘bébé Moudenc’’ : il connaît l’homme, sa stratégie et sa manière de penser. Aujourd’hui élu de la majorité et candidat aux départementales (Canton 6), Emilion Esnault n’est pas pour autant encarté : « J’ai pris ma carte à l’UMP en 2007, mais je n’ai pas adhéré au tournant Buisson de Nicolas Sarkozy ; alors je n’ai pas renouvelé mon adhésion », avoue-t-il. Il n’est pas le seul dans ce cas. Dorothée Naon, nouvelle recrue, conseillère municipale en charge des affaires juridiques, fait partie du quota ‘‘société civile’’, « même si je me reconnais dans ligne politique du maire », précise-t-elle. Elle a découvert la politique lors de la campagne municipale et y a pris goût. En un an de mandat, elle a appris du fonctionnement de la municipalité, une grosse machine « où il faut coordonner les actions des élus et des services administratifs, mais petit à petit tout s’est mis en place ». La jeune élue se verrait bien poursuivre sur un deuxième mandat « si l’opportunité se présente », voire d’en briguer un autre… « Je ne m’interdis rien », assure-t-elle. Jean-Luc Moudenc a visiblement suscité des vocations chez la jeune génération. Charlotte Boudard, benjamine du conseil municipal, en est l’exemple. Elue pour la première fois, elle n’est pas tout à fait novice en politique. En tant que militante UMP, elle a participé à la campagne de Nicolas Sarkozy de 2012. « Mais lors des municipales, je battais le terrain en tant que militante mais également en tant que future élue potentielle. C’était donc différent ; le local me ressemble plus », confie-t-elle. Repérée à la fédération départementale lorsqu’elle intègre le mouvement des jeunes actifs de l’UMP, elle se lance aujourd’hui dans une nouvelle expérience : la campagne des départementales en tant que suppléante d’Hélène Costes-Dandurand (qui se présente d’ailleurs en binôme avec Emilion Esnault).
Tous poursuivent leur activité professionnelle à côté de leur mandat. Emilion Esnault est ingénieur chez Airbus, Dorothée Naon, juriste dans le secteur privé, Charlotte Boudard, sage-femme, Sophia Belkacem, avocate… La nouvelle génération semble avoir les pieds sur terre : « Nous sommes des gens normaux, j’aime faire de la politique, mais ça passe tout de même après ma vie professionnelle et ma vie familiale », explique Charlotte Boudard. Vont-ils insuffler une autre manière de faire de la politique ?
« JL Moudenc, c’est lui qui a fait ce que nous sommes »
« La génération de jeunes autour de Jean-Luc Moudenc a envie de concret », estime Emilion Esnault, qui se tient éloigné « des débats idéologiques à rallonge ». Dans ce contexte de méfiance envers le politique, les jeunes recrues peuvent être un atout de poids : « Quand on discute avec les gens sur le terrain, ça les rassure de voir que nous ne sommes pas éloignés des réalités », témoigne Charlotte Boudard. Garder le lien avec la population est le maître-mot chez tous ces nouveaux élus. « Jean-Luc Moudenc est très attaché à ce qu’on maintienne nos efforts pour rester en contact avec les Toulousains », poursuit Dorothée Naon. Christophe Alvès, adjoint en charge des affaires sociales et de la vie associative, également maire de quartier, est sans doute le plus expérimenté des « bébés Moudenc. » À l’instar d’Emilion Esnault, il est un fidèle du maire depuis 2008, et a déjà été candidat aux élections cantonales en 2011. Il considère d’ailleurs clairement Jean-Luc Moudenc comme son mentor : « C’est le boss. C’est lui qui a fait ce que nous sommes. » L’élu toulousain explique également que le maire n’est jamais avare de conseils vis-à-vis de ses jeunes pousses : « Si je viens à mal m’exprimer sur un dossier, il me le dit toujours sans agressivité. Il conseille. » Et d’ajouter : « Si j’ai le moindre doute sur un dossier, je lui laisse un SMS. Il répond toujours. » Si Christophe Alvès n’oublie jamais vraiment celle qui l’a fait entrer dans la sphère politique, Françoise de Veyrinas, il voue une vraie admiration pour le premier magistrat de la ville : « Il m’époustoufle. Il a une telle capacité à gérer la pression, tout en maîtrisant parfaitement les dossiers. » Bien dans ses baskets, cet adjoint au maire avoue avoir été surpris « par la charge de travail » qui lui incombe aujourd’hui : « J’ai la chance d’avoir des services très compétents, des équipes avec lesquelles j’ai un vrai feeling. » Il sera lui aussi candidat aux prochaines élections départementales sur le canton Toulouse 1 : « La victoire est possible, et Jean-Luc Moudenc nous tire vers le haut. »
Les mains dans le cambouis, la relève se prépare donc. Ou peut-être est-elle déjà prête ? Premiers éléments de réponse en mars prochain avec les élections départementales.
Le + : Stéphane Baumont parle de « Moudenc-isation » de la classe politique
Notre politologue voit dans l’émergence de cette nouvelle génération une vraie stratégie politique du maire de Toulouse : « Il prend exemple sur Gérard Collomb à Lyon ou sur Alain Juppé à Bordeaux. En plaçant sa jeune garde et au département et à la région, il crée ainsi une vague Moudenc sur tout le territoire, constituée d’élus qui lui doivent tout. Il impulse ce mouvement au moment où le département comme la région peuvent basculer ; si le plan fonctionne, il sera incontournable pour des années. Un certain Dominique Baudis avait également opéré selon le même process. »
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