Présentes au Congrès International d’Astronautique, les entreprises Stratoflight et Expleo, basées à Toulouse, ont dévoilé leur projet de voyages touristiques aux portes de l’espace à bord d’une capsule portée par un gigantesque ballon. Le tout, avec une vue panoramique sur la surface de la Terre, l’atmosphère et les étoiles.
Un petit pas pour l’Homme. Un grand pas pour le tourisme spatial. Les entreprises Stratoflight et Expleo, basées à Toulouse, ont présenté un projet hors du commun lors de la 73e édition du Congrès International d’Astronautique qui s’est déroulé du 18 au 22 septembre dernier à Paris : celui de voyager dans le proche espace à bord d’une capsule équipée d’un immense ballon, avec une sortie extravéhiculaire sur un balcon, dans la stratosphère.
Après avoir passé un petit test médical (à l’image de celui demandé pour une inscription dans un club sportif), les voyageurs s’équiperont d’une véritable combinaison d’astronaute. Ils seront ensuite invités à monter à bord d’une capsule de huit mètres de long, pour quatre mètres de large et trois mètres de haut, semblable au “nez” d’un avion. « Tout a été imaginé pour faire vivre une expérience immersive aux passagers, qui se glisseront, durant près de cinq heures, dans la peau d’astronaute », sourit Arnaud Longobardi, pilote de ligne à l’initiative du projet.
Six personnes pourront faire partie du voyage, dont deux pilotes. Ces derniers seront d’ailleurs sélectionnés sur le volet : ils devront cumuler des compétences de pilotage et de parapentisme. Pour ce qui est des passagers, les vols seront ouverts à tous. « Mais ils seront plus difficiles pour les personnes souffrant d’asthme, de diabète ou d’autres pathologies nécessitant des interventions extérieures, puisqu’il est impossible de retirer la combinaison en vol », informe Benoit Courouble, responsable de recherche aéronautique chez Expleo.
Une fois que chaque voyageur est confortablement installé et bien attaché dans son siège, la capsule sera prête à décoller. La montée se fera grâce à un ballon aux dimensions impressionnantes : 120 mètres de diamètre pour une contenance de 900 000 mètres cubes.
L’ascension durera plus de deux heures, jusqu’à atteindre 35 kilomètres d’altitude. Ici se trouve la stratosphère. Un lieu unique, qui offrira aux voyageurs une large vision sur la surface courbée de la Terre, dans un périmètre allant de Barcelone à Amsterdam pour un décollage effectué depuis le centre de la France. « En levant la tête, les passagers pourront apercevoir l’atmosphère, mais aussi une partie de l’espace et de ses étoiles », promet Benoît Courouble.
Cette sortie extravéhiculaire sera effectuée sur une sorte de “balcon”. « Elle rend le programme unique, par rapport à ce qui est développé en France (Zéphalto, Montpellier), ou aux États-Unis (Space Perspective, Floride), où les voyages se font sans combinaison, à l’intérieur de cabines pressurisées », poursuit Benoît Courouble.
Tout au long de la descente, les voyageurs pourront encore profiter de la vue depuis leurs sièges puisque la navette est équipée de larges espaces vitrés. Les pilotes dégonfleront peu à peu le ballon jusqu’à atteindre les 8 000 mètres d’altitude. Puis, une large voile, semblable à celle d’un parapente, se dépliera pour prendre le relais jusqu’à l’arrivée sur la terre ferme.
Le coût de l’expérience devrait avoisiner les 300 000 euros. Toutefois, « nous souhaitons offrir quelques vols à des passagers qui n’ont pas les moyens de se payer une telle expérience », renchérit Arnaud Longobardi. Une centaine de voyages seront programmés chaque année, dont une grande part en faveur de la recherche scientifique.
Stratoflight et Expleo ne sont encore qu’aux prémices du projet. « Nous sommes actuellement en train de concevoir un prototype de capsule avec lequel les premiers essais de voyage dans le proche espace débuteront en 2023, à vide, grâce à un pilotage à distance », précise Arnaud Longobardi.
Le processus est assez long. Tout doit être vérifié pour assurer la sécurité des pilotes, comme des passagers, dès le lancement des premiers vols. « Comme pour tous les véhicules aéronautiques, les phases d’essai se font progressivement. Des tests sont d’abord réalisés au sol, puis de plus en plus haut. Cette partie du programme durera près d’un an », ajoute Benoît Courouble.
Les premiers vols touristiques à bord de quatre navettes différentes devraient être réalisés en 2025. L’objectif étant que les décollages aient lieu depuis le territoire français. Mais rien n’est encore sûr, puisque la majorité des vols avec des ballons de cette taille se lancent, pour l’heure, depuis le désert. La zone d’atterrissage étant plus facile à maîtriser. « Pour être autorisés à voler à proximité des zones urbaines, nous devons d’abord prouver que nous sommes capables de piloter jusqu’à une piste d’atterrissage définie », assure Arnaud Longobardi.
« Nous avons reçu de très bons retours lors du Congrès International d’Astronautique. Nous ne nous attendions d’ailleurs pas à un tel engouement », se réjouit Arnaud Longobardi. « Ce qui plaît, c’est le côté “vert” du projet », complète Benoît Courouble. En effet, l’ambition est d’ouvrir le tourisme spatial au plus grand nombre, mais pas au détriment de la planète.
Ainsi, le choix s’est porté vers l’aluminium pour concevoir l’extérieur de la capsule. « Un métal très facilement recyclable », affirme Benoît Courouble. Aussi, le design intérieur a été imaginé en fibres de bambou. De plus, le ballon est gonflé sans combustion, mais avec une propulsion d’hydrogène qui sera fabriqué, les entreprises l’assurent, « sur le site du décollage, avec une production locale d’électricité générée par des éoliennes et des panneaux solaires ». Les ballons, développés depuis plusieurs années par le CNES et utilisés par la NASA, ne pourront voler qu’une seule fois et seront par la suite recyclés. Attention toutefois, tous les matériaux utilisés ne sont pas recyclés et recyclables. Une question de sécurité, car les équipes veillent à ce que la structure de l’appareil résiste aux potentiels chocs lors de l’atterrissage. Mais des travaux sont en cours, notamment pour trouver des solutions de recyclage du carbone présent dans la capsule.
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