Les années 2000 ont vu l’avènement de l’ère du numérique. Réalité virtuelle, objets connectés, démarches dématérialisées et nuage informatique. Cette révolution, dont le tempo se calcule en nanosecondes, laisse du monde sur le bord des autoroutes de l’information. La lutte contre “l’Illectronisme” et “la fracture numérique”, ces concepts à peine entrés dans notre vocabulaire, sont élevés au rang de priorité. L’exécutif vient ainsi de lancer un Plan national pour un numérique inclusif. S’érigeant contre la logique du surfe ou crève, le JT a imprimé, noir sur blanc, quelques astuces pour rester dans la course.
L’illectronisme, comprenez la difficulté à maîtriser l’outil numérique, concerne 20 % de la population française selon une enquête réalisée par l’institut d’études marketing et d’opinion CSA Research en 2018. Loin d’être marginal, « ce phénomène doit être pris au sérieux et représente un véritable enjeu sociétal, car nous allons assurément vers le tout numérique et aucun retour en arrière n’est possible », affirme Stéphanie Laffargue, directrice d’études de CSA Research.
« Ce phénomène représente un véritable enjeu sociétal »
Mais la difficulté éprouvée face au numérique n’est pas due à un simple manque d’équipement. Pour preuve, près de 90 % des personnes interrogées possèdent un appareil permettant d’accéder à Internet et 87 % disposent d’une connexion. Pour Laurence Allard, sociologue en sciences de la communication, l’illectronisme doit être appréhendé de manière plus globale : « Il s’agit d’un problème tant matériel, que d’usage ou de maîtrise de l’outil numérique. Il est possible d’avoir un bon équipement, mais de ne pas savoir s’en servir. » D’ailleurs, 15 % des sondés éprouvent des difficultés face aux nouvelles technologies et 23 % ne sont pas à l’aise sur Internet.
Certains, près d’un tiers de la population, vont même jusqu’à renoncer à faire quelque chose conditionné à l’utilisation d’Internet. Ce sont les ‘’abandonnistes’’. Et, contrairement aux idées reçues, cela ne concerne pas uniquement les plus de 70 ans. « C’est un phénomène insidieux qui touche tout le monde », constate Stéphanie Laffargue : deux tiers sont des actifs. On recense autant de femmes que d’hommes. 30 % ont entre 50 et 64 ans et 21 % ont moins de 35 ans. Néanmoins, le niveau d’études et la situation sociale semblent être des facteurs aggravants, selon Laurence Allard.
Conséquence : « La fracture numérique se mue en fracture sociale. Les personnes qui ne maîtrisent pas les méandres d’Internet et du digital se trouvent coupées de certaines informations, notamment celles leur permettant d’accéder à leurs droits », précise la sociologue. C’est, selon elle, la répercussion la plus importante attribuée à l’illectronisme. « Les plus précaires restent les plus touchés par ce phénomène. Mais c’est pourtant ceux-là qui auraient justement besoin d’accéder le plus facilement au numérique », explique-t-elle.
« La fracture numérique se mue en fracture sociale »
Et la dématérialisation de toutes les démarches administratives n’arrange rien. « Pire, elle concentre toutes les difficultés. Une société reposant entièrement sur un dispositif technique et technologique est forcément exclusive », rajoute-t-elle, considérant qu’en voulant simplifier les processus administratifs, « l’État n’a fait qu’aggraver la situation des plus isolés ». Ce que confirme l’enquête CSA Research, dans laquelle 50% des sondés ont affirmé se sentir seuls devant le sentiment de décalage dans l’emploi du numérique. D’autant plus si l’on ne peut avoir recours à une tierce personne pour se faire aider. En revanche, ils sont 54% à souhaiter progresser en la matière, et émettent le vœu de suivre des formations pour y parvenir. Un volontarisme qui nourrit l’espoir d’un phénomène réversible, à condition que les pouvoirs publics s’investissent à la hauteur de l’enjeu.
© Le Journal Toulousain
Source : CSA Research
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