Bien malgré lui, Jacques Chirac, disparu ce jeudi 26 septembre, est à l’origine de l’un des plus beaux textes du plus emblématique groupe toulousain. En 1995, Zebda signait, avec la chanson ‘’Le bruit et l’odeur’’, un droit de réponse inspiré aux propos de l’ancien président de la République sur l’immigration.
Certains se souviennent de ses passages en ville, à l’occasion de meetings ou de visites officielles. Mais depuis que Jacques Chirac s’est éteint ce jeudi 26 septembre, nombre de Toulousains ne peuvent s’empêcher d’avoir à l’esprit des notes de musique. Et bien sûr un refrain entêtant, composé de ces fameux deux mots qui collent à la peau du plus apprécié des présidents de la Ve République (sondage Ifop 2015) : le bruit et l’odeur. Des termes prononcés dans un discours en juin 1991 par celui qui est alors maire de Paris et président du RPR. Il y raconte la colère d’un travailleur gagnant 15 000 francs tandis que « sur son palier d’HLM […], une famille entassée avec le père, trois ou quatre épouses et une vingtaine de gosses, […] touche 50 000 francs de prestations sociales sans, naturellement, travailler ».
L’extrait du discours de Jacques Chirac.
Cette célèbre tirade provoque un écho énorme dans la société et résonne jusqu’aux quartiers nord de Toulouse, où le groupe Zebda commence à faire parler de lui. « Avec Magyd Cherfi, qui a écrit tous les textes de nos chansons, nous nous sommes rencontrés au lycée en 1978. Il venait de sa banlieue et moi de ma campagne. L’ADN de Zebda, c’est le rapprochement des cultures. Alors, quand un homme politique de cette envergure réduit l’immigration à une petite phrase aussi révoltante, c’est déprimant », se souvient Joël Saurin, ex-bassiste du groupe.
La version audio du morceau avec le fameux extrait du discours.
Magyd Cherfi décide donc de s’incruster dans le débat public et prend sa plume pour s’octroyer un droit de réponse invoquant l’histoire de l’immigration : « Qui a construit cette route ? / Qui a bâti cette ville ? / Et qui l’habite pas ? / À ceux qui se plaignent du bruit / À ceux qui condamnent l’odeur / Je me présente. » Un rappel salutaire de la réalité économique aussi, symbolisé par le marteau-piqueur du refrain, répété plus de 40 fois dans la chanson. “Le bruit et l’odeur” sort en 1995, dans un album qui porte le même titre. Une étape décisive pour le groupe, trois ans avant l’énorme carton d’”Essence Ordinaire”. « C’est l’affirmation de l’identité de Zebda. Tant en termes de recherche musicale que de paroles, tout l’album fondait les bases de ce que nous voulions faire », rappelle Joël Saurin.
Malgré le rôle involontaire joué par Jacques Chirac dans la trajectoire du groupe, l’ex-membre de Zebda ne veut pas « résumer la vie d’un homme à une phrase ». En 2009, l’ancien président avait lui-même confessé : « Dans une vie politique, on n’évite pas de dire des bêtises de temps en temps. »
Clip officiel de Zebda sans le discours de Jacques Chirac.
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