Si j’aurais su ! Dans le flot de Journées nationales, aux thèmes parfois incongrus, certaines ont le mérite de ranimer le débat sur de véritables problèmes de société. C’est le cas de la lutte contre le harcèlement scolaire, mise à l’honneur ce jeudi 8 novembre. Car en la matière, parler est indispensable. Aussi banalisé que sous-estimé, le phénomène ne s’arrête plus aux portes de l’école et se prolonge sur les réseaux sociaux. Le JT a prêté l’oreille à ceux qui donnent les moyens aux enfants de briser le cercle du harcèlement.
Voilà un phénomène qui a toujours existé — il y a plus d’un demi-siècle, le livre puis le film ”La guerre des boutons” le décrivaient déjà fort bien — mais qui a longtemps été passé sous silence. Le harcèlement scolaire n’intéresse en effet les statisticiens que depuis le début de la décennie. La Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) estime ainsi qu’aujourd’hui, un élève français sur dix en souffre, dont la moitié demeure sévère.
« Une situation de harcèlement revêt trois caractéristiques bien précises : des agressions verbales ou physiques avec un rapport de domination d’un ou plusieurs élèves sur un autre, une répétition de ce comportement, et l’isolement de la victime », définit Cécile Laloux, déléguée ministérielle par intérim chargée de la prévention et de la lutte contre les violences en milieu scolaire.
« Tout enfant, dès le primaire, est susceptible d’être victime ou auteur, voire de devenir l’un après avoir été l’autre »
Il n’y a pas de profil type : « Tout enfant, dès le primaire, est susceptible d’être victime ou auteur, voire de devenir l’un après avoir été l’autre. Et toutes les différences peuvent en être à l’origine. De l’apparence au genre, en passant par l’appartenance à tel ou tel groupe social ou culturel. » Au cours de la scolarité, certains événements sont propices au déclenchement du phénomène, comme des changements de classe ou d’établissement.
Le harcèlement est souvent moral, fait de moqueries, de mises à l’écart, d’insultes, d’humiliations ou de diffusions de rumeurs. Il peut être physique, par des bousculades, des claques, des coups, voire de la séquestration (par exemple dans les sanitaires ou les vestiaires). Mais aussi à caractère sexuel et sexiste, particulièrement à la fin du collège et au lycée. Un phénomène amplifié par les réseaux sociaux : « Ceux-ci génèrent un effet de groupe et propagent à un grand nombre de personnes des propos ou des images mettant en cause l’intégrité d’un élève », prévient la déléguée de l’Éducation nationale, dont la campagne 2018 porte justement sur ce thème.
« Les réseaux sociaux amplifient le phénomène »
Les filles sont les plus touchées : 17 % d’entre elles disent avoir été confrontées à ce type de cyberviolence, contre 10 % des garçons. Une sur cinq a déjà été insultée en ligne pour son apparence physique, selon l’étude de la DEPP. « Pour faire face à cette évolution, nous devons mieux sensibiliser à la protection de la vie privée et éduquer aux médias », ajoute-t-elle.
Les premiers dispositifs de lutte n’ont été mis en place en France qu’à partir de 2011. Outre des campagnes annuelles, les académies comptent désormais 3 140 référents sur le sujet et il existe des services en ligne ou des numéros de téléphone (comme le 3020) qui offrent la possibilité aux victimes de s’exprimer et d’être prises en charge. « Les professionnels, maintenant sensibilisés et formés, ainsi que l’engagement d’élèves ambassadeurs, permettent de mieux repérer les situations et de les désamorcer plus précocement », conclut Cécile Laloux.
© Le Journal Toulousain
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