Bien qu’ils soient la majorité, les maires de petites villes et des villages de France restent dans l’ombre de leurs homologues des grandes métropoles. Pourtant, leur engagement n’en est pas moins fort. Comme celui de Georges Arnaud, le premier magistrat de Montégut-Lauragais, en Haute-Garonne, qui a consacré près d’un demi-siècle à son village.
®Franck Alix« Je suis au conseil municipal depuis 1971. Ça fait un bail ! » lance en guise de présentation Georges Arnaud, le premier magistrat de Montégut-Lauragais, un modeste village haut-garonnais de 450 âmes, à six kilomètres de Revel. Bientôt 49 ans, donc, que ce chauffeur de bus à la retraite arpente le carrelage de la mairie de sa commune. Ce mardi matin, à quelques mois de la fin de son sixième et dernier mandat à la tête du conseil municipal, cet édile au long cours est pendu à son téléphone. « Depuis que je suis arrivé, vers 9h30, je m’occupe de l’avancement des travaux que nous avons entrepris dans l’école. J’ai appelé le plombier et l’électricien pour savoir où ils en sont et m’assurer que tout se passe bien », détaille l’élu qui s’est également penché sur un projet qui lui tient à cœur.
« Nous voulons ouvrir une boulangerie pour redynamiser le village. La précédente a fermé et personne n’a souhaité prendre la relève. Du coup, je me suis occupé de la demande de prêt auprès du Crédit Agricole ». Le conseil municipal a en effet voté le rachat d’un vieil édifice afin d’y bâtir un nouveau fournil et faciliter, ainsi, l’installation d’un artisan. Si l’on ajoute à cela les travaux de piétonnisation, l’office de maire se confond, certains jours, avec celui de maître d’œuvre. « Heureusement, mes adjoints sont impliqués et ils me secondent efficacement », rassure l’élu qui peut également compter sur le soutien d’une secrétaire.
Après la petite collation de midi, Georges Arnaud se replonge dans les dossiers du moment. Entre un appel au géomètre et l’élaboration d’une demande de subventions, il va également falloir trouver le temps de passer rendre visite à une administrée. « C’est une vieille dame qui a un problème avec sa fosse septique. Je vais m’occuper de faire venir une entreprise d’assainissement. Elle vit seule, il faut bien lui prêter main-forte. C’est aussi ça, le rôle du maire », philosophe Georges Arnaud. En effet, la fonction suppose, surtout dans les plus petites communes, un engagement de proximité. « Je suis présent à toutes les manifestations, et quand il y a un repas, je participe au service. Dans un village, il est indispensable de préserver l’ambiance », assure celui qui est également président d’honneur du foyer rural.
De son propre aveu, cette convivialité n’est plus aussi évidente aujourd’hui que lors de ses premiers pas d’élu. « Les nouveaux habitants qui s’installent ne viennent même plus se présenter à la mairie. Et nous recevons tous les jours des messages de riverains qui se plaignent. Les uns râlent contre un voisin qui a brûlé un tas de feuilles dans son jardin, les autres parce qu’on a retrouvé un oiseau mort près de leur maison. Les gens ont tendance à ne plus se supporter », déplore-t-il.
Malgré cet effritement des rapports de voisinage, Georges Arnaud assure ne pas avoir souffert du poids de sa fonction. « Porter l’écharpe, ce n’est pas si compliqué même s’il y a parfois des moments difficiles. » Il faut dire qu’après plus de 30 ans d’exercice, les rouages de l’administration n’ont plus de secret pour lui et rédiger un arrêté municipal ne lui fait pas peur. « De toutes ces années, je n’ai jamais eu le moindre pépin juridique. Sinon, je n’aurais sûrement pas tenu aussi longtemps », reconnaît l’édile qui tire un bilan satisfait de son séjour à l’Hôtel de ville.
« Porter l’écharpe, ce n’est pas si compliqué »
Un parcours politique marqué par le sauvetage du groupe scolaire et la réalisation du tout-à-l’égout. Entre tous les dossiers à gérer, les réunions et les différentes assemblées, celui-ci estime à deux jours de travail effectif hebdomadaire le temps dédié à sa fonction. Le tout pour une indemnité s’élevant à 571 euros brut mensuels. « Dans les petites villes, il est compliqué de concilier un mandat et un emploi.
C’est d’ailleurs un conseil que je donnerai à mon successeur : compter sur un ou deux retraités dans son équipe. » Si le maire de Montégut-Lauragais rendra son écharpe sans amertume, il comprend toutefois la lassitude de ses pairs. « Il nous a été enlevé trop de compétences au profit des intercommunalités. Trop de décisions, en matière de voirie par exemple, sont prises à notre place. » À quelques mois de sa passation de pouvoir, le premier magistrat du village se remémore toujours avec bonheur ses premiers actes officiels : « L’épisode le plus marquant restera mon premier mariage. » Mais pour le moment, l’élu a encore du pain sur la planche et une visite de chantier à réaliser. Le plaisir est palpable chez celui qui a consacré autant de temps à la vie de sa commune. « 49 ans ! Vous pensez qu’ils vont me proposer la Légion d’honneur ? »
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