On compte aujourd’hui 67 millions de data center, qui consomment près de 4 % de l’électricité mondiale. Leur empreinte écologique continuera d’augmenter si l’on ne trouve pas le moyen de les alimenter uniquement en énergie renouvelable. C’est l’objet des travaux de Georges Da Costa, de l’Institut de recherche informatique de Toulouse.
L’équipe de Georges Da Costa, à l’Institut de recherche en informatique de Toulouse (Irit), voit grand. Elle s’est fixé pour objectif de réduire l’impact environnemental des centres de données, en les alimentant uniquement par de l’énergie verte : « Aujourd’hui, cela n’existe pas. Quand les responsables de Google prétendent y être parvenus, c’est un effet d’annonce. En réalité, ils achètent des sortes de bons d’électricité renouvelable pour compenser leur consommation, qui, elle, peut très bien provenir, à un instant T, d’une centrale à charbon. » Mené en partenariat avec le laboratoire Laplace et l’institut Femto-St, et baptisé Datazero, le projet rassemble une équipe interdisciplinaire issue aussi bien du monde académique que de l’industrie, dont les compétences couvrent les secteurs de l’informatique et de l’électrotechnique.
Il a d’abord fallu trouver le moyen de faire fonctionner un data center avec des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques, alors que ceux-ci, intermittents par nature, ne garantissent pas un approvisionnement constant et fiable en électricité. « Il faut donc la stocker pour pouvoir la redistribuer selon les besoins. Et la meilleure solution que nous connaissons en la matière c’est l’utilisation de l’hydrogène. C’est aussi la voie qu’explore l’Occitanie dans son objectif de devenir une région à énergie positive en 2050. Aujourd’hui, la technologie existe, mais elle est encore coûteuse et présente des risques en termes de sécurité », prévient Georges Da Costa.
Néanmoins, les chercheurs se sont demandés comment ils pouvaient optimiser l’utilisation de cette électricité verte, de manière à ce qu’elle soit consommée au moment où elle est produite. « Pour cela, nous avons élaboré et testé, par simulations, un algorithme capable de traiter en priorité les requêtes les plus importantes et de reporter à plus tard celles qui le sont moins. Comme par exemple un chauffe-eau qui ne se déclenche que pendant les heures creuses », compare le scientifique. Mais, hiérarchiser ainsi l’usage des données numériques suppose un bouleversement total des mentalités, à une époque où l’Internet est sans limites et les services qu’il rend instantanés. « Pour que les mœurs changent, il faut impliquer l’utilisateur, passer un contrat avec lui. Quels efforts sera-t-il prêt à fournir en échange d’une plus forte consommation d’énergie renouvelable ? » se demande Georges Da Costa.
Le projet que l’expert porte au sein de l’Irit a vocation à être applicable d’ici cinq à dix ans. Il bénéficie du soutien d’Eaton, un industriel grenoblois d’envergure mondiale, spécialisé dans la fabrication de systèmes électriques, qui commercialisera les innovations de Datazero. « Si nous parvenons à améliorer d’1% la dépense énergétique des data center, nous aurons réussi notre pari. Cela reviendrait à éteindre une centrale nucléaire. Un petit gain, mais qui aurait un impact majeur dans ce secteur dans lequel tout est interconnecté », conclut le scientifique.
Il est un des ingénieurs responsables du projet Datazero au sein de l’Institut de recherche en informatique de Toulouse. Il est également maître de conférences à l’Université Toulouse-3-Paul-Sabatier.
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