Pour passer le temps dans le métro ou vivre des aventures extraordinaires de chez soi, pour s’endormir le soir ou apprendre à cultiver son potager, il n’y a que des bonnes raisons de lire. Sans parler des bienfaits de l’activité sur la santé. Pas besoin d’en faire un roman donc, le JT ouvre ses pages à ceux qui rendent la lecture contagieuse.
Dans le monde des livres, les bonnes nouvelles sont rares ces derniers temps. L’actualité fait régulièrement écho au ralentissement que connaît le marché depuis plusieurs années. A printemps 2018, le Conseil permanent des écrivains (CPE) a même lancé le mouvement ”Auteurs en colère” pour alerter les pouvoirs publics sur leur précarisation grandissante. Une situation due à la baisse inexorable du nombre de lecteurs, accaparés par l’omniprésence des écrans ? Pas du tout. Les auteurs pointent plutôt du doigt une mauvaise répartition de la richesse créée.
Car le principal enseignement de l’enquête commandée à Ipsos en 2017 par le Centre national du livre (CNL) est clair : les Français lisent de plus en plus. Entre 2015 et 2017, le nombre de livres lus par an, en moyenne, est passé de 16 à 20. Une augmentation qui s’explique par une quantité plus importante d’ouvrages lus au format papier par les grands lecteurs, et par une part croissante de lecteurs de livres numériques. Et même si le CNL concède « une part de ressenti » dans les déclarations, pas de risque d’exagération. Les sondés ont au contraire tendance à minimiser leur pratique. Ainsi quand 84 % se disent lecteurs, ils sont en réalité 91 % à avoir lu au moins un ouvrage dans l’année, quel que soit le genre.
Car un livre n’est pas forcément une œuvre de haute volée. D’ailleurs, si les romans, en particulier policiers, sont plébiscités, les livres pratiques sont en forte croissance et arrivent en seconde position des genres les plus prisés devant les BD, mangas et comics. « Globalement, la France reste un pays de lecteurs même s’il existe un déséquilibre entre les hommes et les femmes et entre les âges », résume Vincent Monadé, le président du CNL. Une tendance qui se constate notamment dans l’essor du numérique.
Si le profil type du lecteur sur écran reste en majeure partie jeune et diplômé, il s’est considérablement féminisé et la pratique progresse aussi chez les plus de 65 ans. Toutefois, 2 % seulement de Français déclarent lire uniquement de manière numérique et 22 % alternent avec le papier. Quant aux motivations des lecteurs, les clichés ont la vie dure. Une distinction de sexe apparaît clairement, les hommes affirment lire en premier lieu pour approfondir leurs connaissances tandis que chez les femmes, la notion d’évasion prime.
Enfin, concernant l’accès à la lecture, outre la forte progression (+8%) de l’achat d’occasion, l’enquête révèle surtout l’attachement non démenti à l’objet livre. 70 % des sondés préfèrent en effet les posséder que les emprunter. Sans surprise, les ventes en grandes surfaces culturelles et les boutiques en ligne augmentent au détriment de celles réalisées en librairie. Et parmi les raisons invoquées par les personnes ne fréquentant pas ces dernières, 32% imaginent que les prix y sont plus élevés.
Un chiffre qui témoigne « de la méconnaissance persistante de la loi sur le prix unique du livre en vigueur depuis 1981 », indique l’étude. Une évolution des pratiques soulignée par Chantal Horellou-Lafarge dans son ouvrage ”Sociologie de la lecture”. La chercheuse s’y interroge : « Le livre, devenu produit-marchandise, ne va-t-il pas transformer la lecture en un acte de consommation de moins en moins culturel ? »
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