Blagnac, Pibrac, Plaisance-du-Touch ou Saint-Alban… Plusieurs candidats aux dernières élections municipales ont déposé un recours au tribunal administratif visant à faire annuler un scrutin qu’ils jugent faussé par le contexte sanitaire.
Le premier tour des élections municipales 2020 s’est tenu, au seuil d’une crise sanitaire majeure, dans un contexte exceptionnel. Arguant d’un taux d’abstention record pour un scrutin local, quatre candidats dans des communes de la métropole, où le maire a été élu au premier tour, ont déposé une ”protestation électorale” auprès du tribunal administratif de Toulouse pour en demander l’annulation.
« Les informations contradictoires qui circulaient la veille du scrutin ont dissuadé les votants de se déplacer », revendique Pascal Barbier, candidat battu par 82 voix d’écart à Plaisance-du-Touch. « Le taux de participation est de 39 % au lieu de près de 60 % habituellement. Cette élection n’est pas représentative », ajoute-t-il. Même si celui-ci ne souhaite pas dévaloriser le geste de ceux qui ont participé au vote, il a choisi de déposer un recours dès le jeudi suivant. Pour lui, l’élection n’aurait d’ailleurs pas dû se tenir dans les circonstances où elles ont eu lieu : « Le gouvernement a mis la vie et la santé de millions de personnes en danger. » Pour preuve, celui-ci rappelle que trois personnes parmi les assesseurs de sa commune ont été diagnostiquées positives au virus suite à l’élection.
L’argument principal qui étaye sa requête, comme celle des autres candidats malheureux, est celui de l’insincérité du scrutin. Pascal Barbier a d’ailleurs prévu de joindre au dossier de nombreuses attestations de citoyens qui déclarent ne pas s’être rendus aux urnes le dimanche 15 mars, par crainte du virus. Des témoignages également recueillis par les autres requérants. « J’ai reçu des appels d’électeurs qui avaient la peur au ventre et qui n’ont pas osé aller voter », confirme Raymond-Roger Stramare, le maire sortant de Saint-Alban qui briguait un neuvième mandat et a manqué sa réélection pour 25 voix. À Blagnac, la situation aurait même était aggravée par la publication d’un article paru dans La Dépêche du Midi, le dimanche 15 mars à 15h50, qui faisait état de la contamination au Covid-19 d’un adjoint au maire. « Cela a évidemment alimenté la psychose », affirme Marc Pozza qui a obtenu 23,7 % des suffrages et qui a également déposé un recours pour contester l’élection au premier tour de Joseph Carles, l’édile sortant.
Du côté des maires élus au premier tour, l’incompréhension domine. « Nous n’avons pas vraiment compris cette démarche. À Pibrac, nous avons été élus avec plus de 1 000 voix d’écart et la participation avoisine les 55 % », s’étonne Camille Pouponneau, élue dès le premier tour. Pour elle, l’élection s’est tenue, localement, dans le respect des directives et des recommandations du gouvernement. « Le maire déclarait lui-même que toutes les conditions étaient réunies », rappelle-t-elle.
Philippe Guyot, réélu à Plaisance-du-Touch, abonde également ce sens : « Au regard de la loi, l’élection est acquise. Que ce soit d’une ou de 1 000 voix. Bien sûr que la situation était particulière, mais elle l’était aussi en raison du faible nombre de listes. Quand à faire valoir le fait que les électeurs qui ne se sont pas déplacés, auraient voté pour Pascal Barbier, cela me semble compliqué. »
Tous deux déplorent également une requête inopportune en période de crise et à l’heure de préparer la mise en œuvre des projets pour lesquels ils ont été élus. « Pour le moment, il faut laisser faire la justice. Si nous devions repartir en campagne, nous repartirions. Mais ce serait dommage car nous perdrions du temps sur beaucoup de sujets », précise le maire réélu de Plaisance-du-Touch.
Le délai de dépôt des protestations électorales ayant été prorogé jusqu’à la promulgation du décret de convocation du nouveau scrutin, d’autres candidats peuvent encore engager des procédures similaires. De même, l’instruction des dossiers ne pourra pas se tenir avant cette date. Un sursis qui pourrait s’allonger car le 19 avril dernier, le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé que le deuxième tour des élections municipales, initialement prévu pour le 21 juin, est susceptible d’être encore être différé. Sans plus de précision, celui-ci a seulement évoqué la perspective d’un déroulement « sûrement après l’été » et rappelé que la décision définitive ne serait officiellement annoncée que le 23 mai prochain. De quoi maintenir le suspens encore quelques mois, d’autant que « les règles changent de jours en jours », constate Pascal Barbier.
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