Deux experts de la Fondation Jean-Jaurès ont analysé les raisons pour lesquelles la vague verte des dernières élections municipales n’a pas emporté Toulouse.
“La Ville rose pas assez bobo pour passer aux Verts ?” s’interrogent le politologue Jérôme Fourquet et le cartographe Sylvain Manternach dans une étude pour la Fondation Jean-Jaurès, un groupe de réflexion proche du Parti Socialiste. Ils ont cherché les raisons pour lesquelles Jean-Luc Moudenc a pu résister à la vague verte des dernières élections municipales. Selon eux, la capacité de résistance du maire sortant ou l’échec d’une coalition de gauche à direction écologiste ne suffisent pas à expliquer ce « non-basculement ». « On peut également penser que le positionnement adopté par les deux camps sur des enjeux structurants (place du transport aérien et liaison LGV) a eu un effet dans les urnes », écrivent-ils.
Les auteurs pointent d’abord le fait qu’Antoine Maurice avait des chances de l’emporter : le total des trois listes de gauche (Archipel Citoyen, Une énergie pour Toulouse, emmenée par Nadia Pellefigue, et Pour la cohésion de Pierre Cohen) s’établissait à 51,5 % au premier tour. Leur rassemblement n’a pourtant agrégé que 48 % des voix au deuxième. « Ces pertes s’expliquent sans doute en partie par la difficulté à rassembler l’intégralité des segments électoraux auxquelles ces listes se sont adressées ». Ces groupes d’électeurs sont « non seulement différents sur certaines orientations politiques, mais également divers en termes socioculturels, de lieux de résidence et de mode de vie », écrit Jérôme Fourquet.
Ensuite, l’ancrage de Jean-Luc Moudenc a beaucoup compté. Il a su rassembler une ”clientèle” fidélisée de longue date, par une « Intense campagne de phoning pour battre le rappel des électeurs. Et pour engranger des procurations, notamment de la part des seniors, toujours inquiets de se rendre au bureau par crainte de la Covid-19 », constate le politologue. « Dans un scrutin marqué par une abstention record, la capacité à mieux mobiliser (ou à moins mal mobiliser) son électorat que l’adversaire est décisive ».
Alors que durant l’entre-deux-tours, « l’épidémie a provoqué un gigantesque trou d’air pour le secteur aérien », Jérôme Fourquet rappelle qu’Antoine Maurice avait pris pendant la première partie de la campagne des positions assez tranchées, en faveur de l’interdiction des vols de nuit ou pour une diminution de la fréquence de la navette d’Air France reliant Toulouse à Paris. De son côté, Jean-Luc Moudenc présenterait sa liste comme « 100 % favorable à l’aéronautique et au spatial ». « Ces positionnements différents n’ont sans doute pas été sans effet (double négation) auprès des employés d’Airbus et de ses sous-traitants ainsi qu’auprès des salariés travaillant à l’aéroport », estime le spécialiste.
Il constate également que la ferme opposition d’Archipel citoyen au projet de construction d’une ligne LGV entre Bordeaux et Toulouse a constitué une des principales pierres d’achoppement à l’alliance au second tour avec la liste de Nadia Pellefigue. « Cela a sans doute contribué à nuire à la qualité des reports d’une partie des voix de cette dernière sur Antoine Maurice du second tour. Cela a laissé par ailleurs à Jean-Luc Moudenc le créneau du maire ‘’aménageur-soucieux-du-développement-économique-de-sa-ville”, créneau d’autant plus porteur que l’aéronautique, principal moteur de la ville, se grippait. »
Pour clore leur analyse, les experts de la Fondation Jean-Jaurès se demandent « si les deux finalistes n’ont pas en fait joué contre leurs intérêts électoraux » en adoptant la position qui était la leur sur la LGV. En effet, « une ville nouvellement desservie voit arriver (…) des individus porteurs d’une vision du monde que l’on pourrait appeler écolo-progressiste », écrit Jérôme Fourchet, citant les victoires écologistes dans des villes desservies par le TGV, comme Lyon, Strasbourg, Tours Poitiers ou Bordeaux. La comparaison avec la cité girondine est d’ailleurs éloquente. « La différence d’intensité des changements socioculturels dans les deux villes constitue pour nous l’une des raisons expliquant le sort opposé qu’ont connu les deux listes de gauche à direction écologiste à Bordeaux et à Toulouse (…) L’absence d’une LGV a donc sans doute pénalisé Antoine Maurice et favorisé Jean-Luc Moudenc en freinant le changement sociétal et la “boboïsation” de la Ville rose », concluent les auteurs.
Commentaires
jean charles espy le 10/09/2024 à 19:19
je trouve que cette analyse bien trop synthétique de cette camapgne hors du commun. Les sujets sont à peine abordés. J'ai fait moi-même une analyse de cette dernière campagne. J'ignore si je peux joindre le lien de mon article : https://www.linkedin.com/in/jean-charles-espy-19433710/detail/recent-activity/posts/