En voie de disparition dans les années 1980, le porc noir de Bigorre a fait sa réapparition il y a une vingtaine d’années. Depuis, cette race rare a décroché son Apellation d’origine protégée (AOP) et mobilise tout un réseau de fervents promoteurs. Parmi eux, Denis Méliet, le fondateur des restaurants Le J’Go.
« Une subtilité rare, un goût qui reste en bouche. Somptueux ! » C’est en ces termes que Denis Méliet, créateur des établissements Le J’Go, se remémore sa première rencontre avec le porc noir de Bigorre. Outre les qualités gustatives des produits issus de cette race, le restaurateur est touché par son histoire : « En 1981, il n’était plus recensé que 34 truies et deux mâles reproducteurs. L’animal était voué à disparaître », explique-t-il.
Ce sont les particularités mêmes de ce cochon qui ont bien failli causer sa perte. « Sa croissance étant jugée trop lente et l’animal trop gras, cette race ne correspondait pas aux exigences d’un élevage intensif et a donc été délaissée », précise Denis Méliet. Pourtant, ce sont justement ces caractéristiques qui en font aujourd’hui un produit d’exception. « Le gras, à 50 % mono-insaturé et donc nourrissant, a le temps de pénétrer tous les muscles du porc, ce qui donne au maigre sa saveur. Il agit comme un révélateur de goût. Et cela est également le cas pour les accompagnements avec lesquels il est servi », poursuit-il.
L’élevage du porc noir de Bigorre demande donc du temps. Ce que l’industrie de masse bannit se transforme alors en atout majeur pour les producteurs. Ces derniers se mobilisent pour la préservation de la bête en créant un consortium composé de tous les acteurs de la filière. Fervent défenseur du monde agricole, et sous le charme de ce cochon si particulier, Denis Méliet s’engage lui aussi dans cette croisade et devient rapidement l’ambassadeur de l’animal.
Selon lui, l’élevage de cette race est le symbole d’une agriculture saine, raisonnée, qui a du sens. Celle-là même qui se tient éloignée des codes industriels et de la grande distribution. « La filière se bât pour ne pas commercialiser ses produits via les supermarchés car cela irait à l’encontre de ses principes », confie Denis Méliet. Les circuits courts y sont donc légion.
D’ailleurs, le restaurateur se fournit directement chez son producteur pour alimenter ses établissements de Paris et de Toulouse. « La préservation du porc noir de Bigorre est indissociable de la protection de ses éleveurs. En achetant les cochons sans intermédiaire, je maîtrise les prix et je m’assure ainsi que l’agriculteur soit rétribué à sa juste valeur, qu’il bénéficie d’une stabilité économique », lance le patron du J’Go, pour qui manger du porc noir de Bigorre est un acte politique. Des négociations menées autour de la table, bien sûr, et clôturées par une franche poignée de main. Des contrats à l’ancienne qui satisfont les deux parties.
« La chaîne vertueuse ne va pas seulement de la fourche à la fourchette mais du sol à l’estomac », comme aime à le signifier Denis Méliet. Le consommateur est tout aussi important dans la préservation de la race porcine. Au J’Go, de plus en plus de clients viennent exclusivement pour manger le produit. Et pour ceux qui n’y auraient pas goûté, le maître des lieux se fait un devoir de les y inviter : « Ils n’auront plus la même approche du gras ! »
Denis Méliet
Fondateur de l’enseigne Le J’Go en 1995, il est aujourd’hui à la tête de quatre établissements : deux restaurants à Paris et au marché Victor-Hugo à Toulouse, un restaurant saisonnier à Marciac dans le Gers et un bistrot-épicerie qui vient d’ouvrir au sein de l’aéroport de Toulouse-Blagnac.
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