Une appétissante tomate rouge, une vache blanche avec de belles taches noires ou un petit cochon tout rose. Autant d’images d’Épinal symptomatiques de l’appauvrissement de notre patrimoine alimentaire, dû à 50 ans d’industrialisation de l’agriculture. Mais depuis quelque temps, les consommateurs retrouvent le goût du passé. Une saine curiosité que Régal, le salon du bien-manger et du bien-vivre en Occitanie, alimente du 13 au 16 décembre. Toujours ravi de mettre son grain de sel, le JT a mijoté un numéro spécial produits oubliés.
Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les trois-quarts de la diversité génétique agricole ont disparu depuis le début du XXe siècle. Ce phénomène concerne aussi bien des variétés de produits que des espèces entières. Ainsi, carottes jaunes, blanches, rouges et violettes, rutabagas, crosnes, topinambours, panais, mais également des cépages tels que la negret pounjut ou le Jurançon noir, en passant par le porc noir de Bigorre ou les vaches garonnaises et fémelines, ont été un temps abandonnés.
Un appauvrissement pouvant s’expliquer à la fois par une évolution sociétale mais aussi une course à la rentabilité engendrée par l’industrialisation de l’agriculture. L’extinction de certaines races animales date principalement de la période des Trente Glorieuses selon Loïc Bienassis, historien à l’Institut européen d’histoire et des cultures de l’alimentation (IEHCA) : « À cette époque sont apparus des cahiers des charges stricts définissant les races, des exigences auxquelles devaient répondre les bêtes. Forçant les éleveurs à privilégier celles au plus haut rendement. »
« Nous avons observé une volonté d’uniformisation des goûts »
Le même phénomène s’est produit avec les cépages. Sans compter l’invasion du phylloxera à la fin du XIXe siècle. Cet insecte ravageur a provoqué l’arrachage massif de nombreux plants pour endiguer l’extension de la maladie qu’il transmet aux vignes.
Quant aux fruits et légumes, nombre d’entre eux ont succombé aux diktats de la grande distribution : « Nous avons observé une volonté d’uniformisation des goûts. Les supermarchés préférant proposer trois variétés de légumes pouvant plaire à 25 000 clients, plutôt que 600 variétés et n’en séduisant que 20 000 parce que trop typiques », précise Loïc Bienassis.
Une standardisation et une course à la rentabilité et au rendement dans laquelle nombre de consommateurs ne semblent plus se retrouver aujourd’hui, comme le constate l’historien : « Les Français s’inscrivent maintenant dans une recherche de l’authenticité, dans un fantasme du terroir qui les mènent vers des produits locaux, de qualité, sans traitements. » Les aliments d’autrefois répondant parfaitement à ces exigences, ils font leur retour en force dans les vitrines.
« Depuis cinq à six ans, nous enregistrons une explosion de la vente des produits ”oubliés” »
Une véritable tendance que remarque également Maguelone Pontier, directrice du second plus grand Marché d’intérêt national (Min), celui de Toulouse. « Depuis cinq à six ans, nous enregistrons une explosion de la vente des produits dits ”oubliés”. Et durant les fêtes, le phénomène est d’autant plus prégnant. Les grossistes de légumes anciens, par exemple, affichent 30 % d’augmentation de leur vente », lance-t-elle.
Cet intérêt soudain pour les produits d’antan correspond, pour la responsable du Min, à l’engouement récent pour la cuisine, grâce aux nombreuses émissions télévisées. Dans un même temps, les chefs célèbres ont commencé à cuisiner ces produits. « Et ce sont eux qui font et défont les tendances », affirme-t-elle. Car il s’agit-là d’un effet de mode. Les grossistes du Min de Toulouse estiment que l’enthousiasme qui entoure ces aliments va retomber aussi rapidement qu’il est né, dans quelques années.
Source : FAO.
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