ENERGIE. Entre un dossier au tribunal et un conseil d’école dans le quartier du Busca, Sophia Belkacem passe àSaint-Michel le temps de boire un coca. Il est seize heures, c’est sa première pause de la journée. Elle n’a pas déjeuné.
Par Amélie Phillipson
Née à Béziers, elle est élue conseillère municipale des jeunes dans sa ville natale à l’âge de douze ans. « J’ai été remarqué par le maire de l’époque, Raymond Couderc, et il a souhaité me donner une place lors de son troisième mandat ». C’est ainsi qu’à24 ans, elle est élue conseillère municipale, alors la plus jeune de la liste.
A 18 ans, elle a un coup de foudre pour Toulouse et s’y inscrit à l’université. Ses études de droit se passent bien, elle obtient même une mention. Pourtant, ce n’était pas gagné : « Je n’ai pas honte de dire que j’ai toujours eu des difficultés à l’école ». En première littéraire, elle passe en conseil de discipline parce qu’elle n’allait plus en cours. « J’avais eu une peine de cœur à l’époque. J’étais une adolescente bête. Peut-être suis-je trop entière ». Elle s’obstine, s’inscrit au CNED (Centre national d’enseignement à distance), et travaille plus que les autres. Seule face à tous ses livres de cours, elle développe « une mémoire visuelle extraordinaire ». Ça paye : elle obtient le bac du premier coup. Comme quoi, c’est possible de décrocher et de réussir. « La chance que j’ai eue, c’est que j’ai cru en moi jusqu’au bout. »
Etre avocate est sa vocation depuis qu’elle a huit ans. Elle s’était déguisée en avocate avec des gros dossiers, une robe et une sacoche. Aujourd’hui, elle n’a plus la sacoche, mais veut toujours défendre les gens. Fille d’une aide-soignante et d’un garagiste, personne dans sa famille ne fait de la politique.« Ça m’est venue lorsque j’étais déléguée de classe ».
« Quand on est jeune élue à24 ans, ça suscite la jalousie, ça m’a endurcie ».
Pourtant, « la Sophia étudiante, elle était un peu « bisounours ». Elle avait son petit cocon et la politique lui faisait peur », raconte la même femme, à31 ans. Lorsqu’on l’entend dire aujourd’hui « j’aime la vie, j’aime les gens, j’ai confiance en l’avenir », on pourrait croire que ça n’a pas changé. Mais « quand on est jeune élue à24 ans, ça suscite la jalousie, ça m’a endurcie ». Comme à son habitude, elle persiste et s’engage dans un deuxième mandat. « Cette volonté d’aider l’autre et d’apporter des réponses est en moi », explique-t-elle simplement. Ce sera cette fois-ci à Toulouse.
En 2013, elle part elle-même à la rencontre de Jean-Luc Moudenc lui proposer sa petite expérience. Elle s’investit ardemment dans sa campagne à Empalot, « séduite par ce quartier plein de perspectives ». Issue de l’immigration, elle s’y sent à sa place. Jean-Luc Moudenc remporte les élections et lui confie non seulement Empalot, mais aussi “le package”: Saint-Michel, Saint-Agne et Busca. « 35 800 habitants, c’est juste fou, je suis encore très jeune ! C’est une chance extraordinaire d’être conseillère municipale à Toulouse. J’ose croire que Jean-Luc Moudenc me fait confiance ». Ce qui lui tient à cœur dans sa mission : l’emploi, notamment l’emploi des jeunes. « Quand on n’a pas de perspectives, on sombre ». Ce qui lui fait peur : « ceux qui ne votent pas ou qui votent Front national ».
En voiture, ses mains sont plus souvent en train de bavarder que de tenir le volant. « Je parle beaucoup, hein ? ». Enjouée, optimiste, travailleuse, débordante d’énergie, Sophia Belkacem s’avoue quand même « un peu à cran après six mois de travail intensif ». Conseillère municipale déléguée, maire de quartier, avocate, conseillère à la métropole, sans oublier fiancée, ce qui lui manque, c’est du temps à consacrer à ses proches. Du temps pour elle aussi, pour faire du sport, du théâtre. « Etre élue, c’est un don de soi ». Pour tenir, elle compte sur son caractère bien trempé et l’équilibre que lui apportent ses amis et sa famille. « Ce qu’il faut savoir, c’est que je suis absolument normale. Une femme de 31 ans, voilà ».
3 années phares
2012 : admise au concours d’avocat.
2013 : Jean-Luc Moudenc annonce qu’elle sera sur sa liste aux municipales.
2015 : année de son mariage.
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