Aurélien Pradié, député de la 1ère circonscription du Lot, est candidat à la présidence des Républicains (LR), dont le scrutin se déroulera les 4 et 11 décembre 2022. Secrétaire général du parti depuis plus de trois ans, il sera face à Eric Ciotti, député de la première circonscription des Alpes-Maritimes, et Bruno Retailleau, patron des sénateurs LR. Si Aurélien Pradié n’est pas le favori de ce scrutin, il pense toutefois avoir les atouts nécessaires pour devenir le nouveau président des Républicains. Interview.
Aurélien Pradié, quel regard portez-vous sur les Républicains aujourd’hui ?
Je pense que ce serait totalement irresponsable de se dire que les choses ne vont pas si mal. La situation est grave. Notre famille politique a obtenu un résultat à l’élection présidentielle qui n’a jamais été aussi bas. Si on est attaché aux valeurs et aux convictions d’une droite républicaine, la première des responsabilités est donc de tout remettre à plat et d’accepter de se poser les vraies questions.
Comme je ne veux ni me rallier au macronisme, ni au lepénisme, ni au zemmourisme, je considère que le seul chemin est la reconstruction totale de la droite de fond en comble. C’est pour cela que je prône le fait de devoir tout modifier, pas pour le plaisir de changer les choses ni parce que je suis révolutionnaire dans l’âme, mais simplement parce que si nous ne changeons pas aujourd’hui, nous disparaitrons. Et je ne le souhaite pas.
Vous comptez d’ailleurs changer le nom du parti…
C’est un détail. Le changement de nom arrive à la fin. J’estime d’ailleurs qu’il revient aux adhérents de trancher cette question. Si je suis élu président, je leur proposerai donc de décider du changement ou pas de nom. Mais le problème n’est pas là. Le souci est pourquoi la droite ne parle plus à personne depuis des années ?
« Il y a une partie de la population que nous avons abandonnée »
Je crois en une droite capable de s’adresser à tout le monde, aux ouvriers autant qu’aux chefs d’entreprise, aux fonctionnaires autant qu’aux salariés du privé et aux jeunes autant qu’aux moins jeunes. Je ne souhaite pas que nous parlions entre nous, mais que nous allions convaincre les Françaises et Français que nous avons des solutions pour eux. Il y a une partie de la population que nous avons abandonnée.
Pensez-vous justement que le parti est en chute libre à cause de cela ?
C’est la conséquence de beaucoup de choses. Mais je pense surtout que cela est dû au fait qu’il y ait plein de sujets, pourtant au cœur des préoccupations des Français, que nous avons un peu oubliés. Nous n’avions plus rien à dire sur les salaires, l’éducation ou l’écologie, par exemple. Cela doit changer. Je refuse de laisser aux autres partis politiques le soin de parler de sujets aussi importants. Il est insupportable pour moi d’imaginer que demain il n’y ait que des agités, comme Sandrine Rousseau [député de la 9e circonscription de Paris, NDLR], qui parlent d’écologie.
Il faut que la droite se saisisse de ce sujet, et parle aussi de la question de l’eau, de cette société d’hyperconsommation qui devient absolument folle ou encore de la relocalisation d’une partie de notre production et de notre industrie. La droite doit aller sur toutes ces questions pour que les Français et Françaises puissent se retrouver dans nos idées.
Eric Ciotti, député de la première circonscription des Alpes-Maritimes, et Bruno Retailleau, chef de file des sénateurs LR, briguent également la présidence des Républicains. Quels atouts pensez-vous avoir face à eux ?
Il n’est pas facile pour moi d’en juger. Mais à la différence de mes deux collègues, je pense pouvoir incarner une forme de rupture et de changement. Le fait de ne pas avoir été en première ligne des échecs que nous avons connus ces dernières années représente sûrement un atout. De plus, je suis secrétaire général des Républicains depuis plus de trois ans. J’ai pu apprendre le fonctionnement du parti et noter ce qu’il faut y réformer. Je suis par ailleurs le seul, des trois candidats, qui a été maire et cela compte dans un parcours politique car un maire est au cœur des réalités de beaucoup de citoyens.
Et puis il y a mon travail de député. J’ai été élu et réélu dans une terre réputée imprenable qu’est le Lot. J’ai donc démontré dans mon parcours que rien n’était impossible. Enfin, le fait que je veuille porter ce message populaire, porté par aucun autre candidat, est mon dernier atout. Nous ne pouvons pas répéter toujours les mêmes rengaines, nous devons être capable de projeter la droite républicaine dans l’actualité pour qu’elle parle de nouveau aux Français. Si nous ne changeons pas notre manière de nous représenter et de parler aux citoyens, alors nous nous arrêterons.
Et puis vous êtes jeune aussi…
Je considère que ce n’est ni un atout, ni un inconvénient. C’est vrai que je suis jeune, mais au-delà de la jeunesse et du renouvellement, qui peut être une forme de respiration pour ma famille politique, j’ai aussi l’expérience depuis maintenant plus de dix ans. J’ai montré mes capacités à agir pour ma famille politique depuis de nombreuses années. Grâce à tout cela, je me sens armé pour porter cette bataille qu’est la présidence des LR.
« Je me sens armé pour porter cette bataille qu’est la présidence des LR »
Vous voulez donc que Les Républicains parlent davantage d’écologie ou encore d’éducation. Ce seront vos thèmes de prédilection ?
Non, je souhaite que l’on parle de tous les sujets. Il n’y en a pas de plus important que d’autres. Les questions d’éducation et d’écologie en font partie. Mais j’ai par ailleurs proposé sur les questions d’immigration une vraie révolution : les titres de séjour probatoires. Avec ces derniers, ceux qui ne parlent pas le français et n’ont pas passé une qualification à l’emploi, ne peuvent pas intégrer définitivement notre pays. J’ai aussi beaucoup abordé la question de la réforme des retraites.
Justement, vous êtes contre le recul de l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans. Pourquoi ?
Repousser l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans n’est pas la meilleure manière de respecter le travail. C’est une erreur. Je veux une réforme des retraites, mais qui prenne en compte la durée de cotisation. Quelqu’un qui a commencé à travailler très tôt ne peut pas continuer à le faire jusqu’à 65 ans. Je veux que l’effort et le travail soient respectés. C’est pourquoi je pense que lorsqu’on a commencé à travailler tôt, c’est normal qu’on parte tôt et que quand on a commencé tard, on parte plus tard.
Eric Ciotti, favori de ce scrutin, et Bruno Retailleau sont des figures du parti. Comment vous sentez-vous par rapport à vos concurrents ?
Je pense qu’il y aura une surprise. Je commence à le ressentir dans la dynamique. Les adhérents ont en effet envie de changement et me connaissent. Je suis secrétaire général du parti depuis trois ans, ils savent que des trois candidats, je suis sans doute celui qui le connaît le plus, qui s’est le plus investi pour lui ces dernières années et qui en a le plus envie. Les adhérents ont besoin d’un président qui ne soit là ni par procuration, ni par défaut, mais là pour reconstruire le collectif.
« Des trois candidats, je suis sans doute celui qui connaît le plus le parti »
Vos adversaires dénoncent le fait que vous ayez envoyé une lettre aux adhérents du parti pour leur annoncer votre candidature. Que leur répondez-vous ?
J’ai adressé ce courrier de candidature à tous les adhérents, ce qui est bien la moindre des choses lorsque l’on est candidat. Mes concurrents ne l’ont pas fait, c’est dommage pour eux. Ils devraient le faire parce qu’expliquer pourquoi on est candidat aux adhérents est une manière de les respecter. Ce n’est pas un problème. De plus, cela fait des années qu’Eric Ciotti et Bruno Retailleau écrivent à tous les adhérents, étant donné que chacun d’entre nous en détient la liste.
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