Comment différencier un trouble du langage et des apprentissages d’un simple retard scolaire ? Comment les professionnels de santé posent-ils leur diagnostic ? Les réponses d’Aurélie Iché, orthophoniste libérale à Toulouse et présidente de l’Association prévention en orthophonie 31.
Une première séance d’orthophonie chez Aurélie Iché dure deux heures. Le temps d’établir le bilan du patient, prescrit par son médecin. Cela commence par un entretien, en présence des parents, pour que cette orthophoniste connaisse l’histoire, le mode de vie, les retards constatés, les antécédents médicaux et ceux des frères et sœurs de l’enfant. Elle peut ainsi détecter une éventuelle cause pathologique à ses symptômes. Par exemple, « un trouble de l’écriture peut être la conséquence d’une déficience auditive et non pas d’une dyslexie », avertit Aurélie Iché. La praticienne consulte également les bilans déjà réalisés, qu’ils soient psychomoteur, ophtalmologique ou orthoptique.
Vient ensuite une phase de tests, effectués dans la mesure du possible sans la présence des parents pour qu’ils n’influent pas sur les résultats. Il s’agit alors, par des exercices standardisés, de « mesurer l’attention auditive ou visuelle, la mémoire de travail, verbale ou immédiate, la capacité à reconnaître une image ou un son, à se repérer dans le temps et l’espace, etc. » Une épreuve consiste à répéter des mots, simples ou compliqués, une autre à identifier des syllabes ou des rimes, à décoder des termes qui n’existent pas, ou à lire un texte sans signification. « La qualité et la rapidité des réponses nous indiquent quels sont les déficits du patient et nous permettent de poser le diagnostic », explique Aurélie Iché.
Pour ce faire, l’orthophoniste s’appuie sur des barèmes associés à chacun des tests, qui précisent où se trouve la norme et où commence le trouble. Des résultats qu’elle pondère ensuite, prenant en considération le comportement, les antécédents ou le quotient intellectuel : « Lorsqu’un enfant a un haut potentiel, il a tendance à davantage compenser son handicap et présente un niveau pathologique moins élevé qu’il ne l’est en réalité. » À l’heure de son compte-rendu, la praticienne pose un diagnostic de retard d’acquisition, qu’une rééducation pourra combler, ou bien de trouble spécifique (dysphasie, dyslexie, dysorthographie ou dyspraxie), pour lequel il faudra mettre en place des moyens de compensation sur le long terme.
Certains cas échappent au dépistage. Parmi ses patients, Aurélie Iché compte ainsi « de jeunes adultes qui se sont écroulés en arrivant à la fac, ou des cadres de grandes entreprises qui cachent leurs problèmes d’orthographe ». Des dyslexiques non diagnostiqués qui gardent les séquelles de leur trouble : certains confondent les lettres m et n, p et q, ou les sons pe et be, d’autres écrivent les chiffres en miroir, à l’envers… Autant de marqueurs, de signes qui ne trompent pas. Présidente de l’Association prévention en orthophonie 31, Aurélie Iché intervient régulièrement auprès d’enseignants pour les aider à repérer les pathologies du langage ou de la communication : « De plus en plus sensibilisés, ils ont désormais le réflexe de demander un bilan dès qu’ils ont un doute », partant du principe que plus un dys est diagnostiqué tôt, mieux il sera pris en charge.
Aurélie Iché est orthophoniste libérale à Toulouse et présidente de l’Association prévention en orthophonie 31, qui sensibilise les enseignants et les parents à la détection des troubles spécifiques du langage et de l’apprentissage.
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