Inquiétude. Les Assises annuelles de la Fédération régionale des travaux publics se tenaient mardi dernier dans les locaux de l’INSA, l’occasion pour Thierry le Friant, président de la FRTP, d’alerter les collectivités sur la situation de la profession.
Thierry le Friant, les décideurs régionaux étaient présents lors des assises de la FRTP, quel message leur avez-vous délivré ?
Nous avons mis en avant la situation particulièrement difficile dans laquelle se trouve la profession. Nous souhaitions attirer leur attention sur l’état de nos carnets de commandes qui sont en chute de 20% à 30% par rapport à l’année dernière et le manque de visibilité dans nos métiers (trois mois d’activité tout au plus) ce qui était déjà le cas auparavant mais qui s’accentue depuis la mi-2014.
Le secteur est à la peine depuis plusieurs années, quelle est l’urgence aujourd’hui ?
Nous avons connu une année 2013 en demi-teinte mais relativement stable grâce aux élections municipales mais depuis, et sous la contrainte que subissent les collectivités locales face aux baisses des dotations de l’Etat, la pression augmente sur leurs investissements et ces dernières anticipent cette diminution (3,700 milliards d’euros) sur les trois prochaines années. Ainsi, devant la nécessité de gérer au plus juste, les collectivités, peinent à maintenir un niveau d’investissement et d’entretien du patrimoine existant suffisamment important pour nous permettre d’avoir un peu plus de visibilité sur nos commandes. Nous leur demandons donc de maintenir ce budget autant que possible, en affectant les efforts sur le fonctionnement plutôt que l’investissement car derrière ces derniers se trouvent nos emplois et un patrimoine à maintenir en état.
Que retenez-vous de ces assises ?
Les élus ont été sensibilisés à notre situation et nous ont assuré qu’ils souhaitent maintenir en bon état leur niveau d’investissement. Mais il manque toujours, le nerf de la guerre, l’argent ! Nous avons émis l’idée d’intervenir auprès de l’Etat pour lui demander de lisser les baisses de dotations sur une période plus large que les trois prochaines années, ce qui permettrait aussi aux collectivités de retrouver un peu d’air. Nous avons également évoqué la mise en place de nouveaux types de financements pour les grands projets à moyen terme.
Vous parlez d’un contexte économique difficile. Quelle est la situation en Midi-Pyrénées ?
Depuis 2008, nous avons perdu 2 300 emplois (l’équivalent de trois fois Sanofi à Toulouse) dans la partie « travaux publics », sur la région, ce qui représente 16% de postes en moins, pour une perte de chiffre d’affaires d’environ 11%. Tout cela s’accompagne d’une contraction des marges car les CA étant à la baisse, la concurrence devient plus vive et les prix chutent à leur tour. De même, nous avons recensé 120 défaillances d’entreprise dans la région. Si rien ne change, nous prévoyons la suppression de 2 000 emplois supplémentaires dans les 18 à 24 prochains mois.
« Si rien ne change, nous prévoyons la suppression de 2 000 emplois supplémentaires »
Aujourd’hui, quelles sont vos attentes ?
Nous souhaitons que l’Etat mette en place un plan de sauvegarde des travaux publics, des moyens pour relancer l’activité du secteur en orientant bien sûr les investissements vers des projets utiles à la population. Nous rappelons également aux collectivités locales qu’emprunter pour investir n’est pas un mauvais acte de gestion.
La réforme territoriale aura-t-elle des répercussions sur la profession ?
Très certainement. Les transferts de compétence entre Conseils généraux et régionaux ou métropole induiront une période d’attentisme. Les élus vont vouloir mettre en place de nouveaux outils, de nouvelles organisations et cela risque de se faire au détriment de la commande publique. La profession sera vigilante sur la façon dont les dotations seront mises en place. Nous avons commencé à en alerter les élus locaux, à leur expliquer la nécessité d’aller le plus vite possible. C’est la période de latence durant laquelle l’organisation des nouvelles collectivités va se mettre en place qui nous inquiète.
Pour vous, quel avenir est réservé aux professions des travaux publics ?
Le contexte est mouvant et c’est à nous de faire évoluer nos entreprises pour anticiper les contraintes subies par nos maîtres d’ouvrages et les souhaits de la société, notamment la prise en compte des nouvelles technologies, de l’environnement… Nous avons là un rôle à jouer et si nous ne sommes pas capables de nous adapter, ce sera très difficile !
Commentaires