Après l’Amérique latine, El Gato negro est allé puiser son inspiration sur les terres africaines. « Ouvre la porte », son troisième album mêle musique latine et balafons avec la même aisance qu’il alterne entre la légèreté des histoires d’amour et la profondeur de chansons engagées.
© ElliotBroueUne coiffe de plume sur la tête, une valise élimée marquée d’une tête de chat à la main et plusieurs tours de colliers africains autour du cou. Sur la pochette de son troisième album, ”Ouvre la porte”, El Gato negro arbore, tel un dandy voyageur, trois accessoires caractéristiques de l’esprit qui règne sur cet opus sorti 19 avril.
À la manière d’un carnet de voyage musical, Axel Matrod, le chanteur toulousain qui se cache sous la fourrure d’El Gato negro, y marie des sons glanés au fil de plusieurs années de pérégrinations. Claves et congas répondent aux balafons et les influences hip-hop se mêlent tantôt à la cumbia, au reggaeton ou à la rumba congolaise. D’abord en terres latines et, plus récemment, en Afrique. « Quand je voyage, j’essaie de rencontrer les gens. Ce qui m’attire et me permet de rentrer en contact c’est le folklore et la musique », explique celui qui a reçu son nom de scène, il y a 12 ans, dans les ruelles andalouses. « J’ai fait mes armes à Grenade. Je jouais au chapeau dans la rue et devant les terrasses de café. Ce sont mes amis musiciens qui m’ont baptisé ainsi. J’étais un peu comme un chat de gouttière qu’on croise au hasard des rues, de jour comme de nuit », se remémore-t-il.
Après ces premières notes grenadines, s’ensuivent dix ans de voyages et de rencontres en Martinique, aux Caraïbes et dans toute l’Amérique latine. Le musicien vagabond multiplie les formations éphémères, composées d’artistes recrutés sur les chemins. C’est à Buenos Aires qu’il réalise son premier album après avoir écoulé quelques maquettes à droite et à gauche. Le résultat est à l’image de son quotidien du routard : « une réunion de 14 personnes venant d’un peu partout sur le continent ».
À son retour en France, Axel Matrod s’entoure de l’énergique Combo tropical, le groupe qui l’accompagne sur l’album Cumbia Libre, et enchaîne les concerts. C’est d’ailleurs sur scène, entre une section cuivre impétueuse et des percussions endiablées, que l’énergie d’El Gato negro s’exprime le mieux. Mais, moitié bête de scène moitié animal errant, celui-ci n’a jamais vraiment posé ses bagages. En 2018 le jeune homme, qui s’est installé à Paris, part à la découverte du Québec et du Burkina Faso. « C’est la maladie du voyageur de toujours vouloir aller voir à côté comment ça se passe. J’essaie d’élargir mes horizons en permanence tout en conservant mes racines », analyse-t-il. Une philosophie qui transparaît sur cet enregistrement où les airs latins et les phrasés raggas de ses débuts sont mâtinés de sons électro et de rythmes africains.
Sur ce disque, El Gato negro renoue avec le français. L’occasion de porter un message engagé. La chanson ”Ouvre la porte”, qui donne son titre à l’album, raconte ainsi le parcours infernal de Kouamé un jeune homme qui a fui son pays après l’assassinat de ses parents. « Je voulais dénoncer les conditions inhumaines d’enfermement que rencontrent les migrants. Pendant toutes ces années de voyage, j’ai été l’étranger et je ressentais, aujourd’hui, le besoin d’accueillir l’autre à mon tour », conclut le chanteur. Entre exploration et retour aux sources, ce disque renoue également avec l’esprit convivial des débuts. Quatorze invités, dont quelques hôtes de marque, et tous ses amis du Combo tropical viennent ainsi apporter leur touche à ce réjouissant syncrétisme musical.
La chanson ”Ouvre la porte”, qui donne son nom à l’album, a été écrite suite à des échanges avec Amnesty International et la Cimade. Elle raconte l’historie de Kouamé, l’auteur de “Revenu des ténèbres” (XO Editions), un livre dans lequel ce jeune auteur originaire d’Afrique de l’ouest, témoigne de l’enfer de son parcours et qu’il dédie à tous les migrants morts en mer. Par ailleurs, dans le cadre du festival Toulouse d’Été, El Gato negro se produira dans les prisons de Seysses et de Muret.
Commentaires