Complicité. Entre Jérôme Jalabert, le chef de la compagnie théâtrale L’Esquisse et Jean Balbo, avocat toulousain, la conversation a été animée ! Au menu, la polémique sur les révélations de Jean-Pierre Jouyet, le vote indépendantiste des Catalans et le retour des Pink Floyd. En bonus, un sujet surprise s’est invité au débat…
Par Coralie Bombail et Séverine Sarrat
Dans l’ambiance chaleureuse de la Pergola, nos invités se sentent très vite à l’aise. Il faut dire que leur métier impose un certain sens de la représentation. Dès les premières formules d’usage, ils s’amusent des similitudes entre le talent de l’acteur et celui de l’avocat. Du théâtre à la plaidoirie, il n’y a parfois qu’un pas… Nous entamons le débat sur un sujet néanmoins sérieux : les révélations selon lesquelles François Fillon aurait fait pression sur l’Elysée (via le secrétaire d’Etat Jean-Pierre Jouyet) pour accélérer les enquêtes à l’encontre de Nicolas Sarkozy. « Cette affaire va totalement discréditer François Fillon qui demeurait un second couteau à droite, mais elle va profiter à Nicolas Sarkozy, toujours dans une stratégie de victimisation », tranche Jean Balbo, en rappelant que la « question des mensonges et magouilles en politique » ne date pas d’hier… « Chirac, avec son image de bon vivant, ça passait, Mitterrand manœuvrait tout en finesse, aujourd’hui ils se prennent tous les pieds dans le tapis. » Pour Jérôme Jalabert, il n’y a rien de surprenant dans cette énième scandale politique : « Ils sont tous dans un système où ils doivent se partager le fromage, ce sont des humains, avec leur part d’égoïsme ». Comment sortir de ce système ? Cet ancien étudiant en histoire a bien une idée : « Revenir à la tyrannie grecque où le chef de l’Etat dirigeait le pays pendant 2 ans avec les pleins pouvoirs, puis il avait interdiction de s’occuper de la vie de la cité, cela poussait à prendre des décisions pour le bien de tous », explique-t-il, sans y croire vraiment, « cela fait partie de mes rêves éveillés, aujourd’hui plus personne n’agit par pur altruisme. » Un phénomène qui ne touche pas que le monde politique : « Prenez les relations entre les hommes, c’est pathétique, vous devez le voir avec tous ces couples qui divorcent et se déchirent, les politiques sont à l’image de notre société », remarque Jérôme Jalabert à l’attention de son voisin de table. « On n’est pas dans une construction générale mais plutôt dans une décomposition », répond celui-ci. Le discours n’est pas vraiment optimiste… Pourtant nos deux convives ne sont pas des dépressifs. Bon vivants, ils profitent des frites maison plutôt deux fois qu’une… Et ne loupent pas une occasion de se chambrer !
« Il faudrait un gouvernement planétaire car décider Etat par Etat c’est ingérable ! »
Mais le deuxième thème du débat ne risque pas d’adoucir leurs propos : lors d’un référendum symbolique, les catalans espagnols ont voté à 80% pour leur indépendance. « En période de crise, tous les irrédentismes sont exacerbés, il y a un renfermement communautaire, une peur de l’étranger », note le directeur de théâtre qui tient à nuancer le résultat du vote : « Seulement 20% des catalans se sont déplacés, donc au final les indépendantistes ne sont pas majoritaires. » Jean Balbo, quant à lui est pour le respect « du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », en précisant que la Catalogne représente tout de même « 7 millions de personnes et 20% du PIB de l’Espagne ». Néanmoins, il a du mal à croire à « une sécession totale ». Jérôme Jalabert a encore une solution radicale à proposer : « Il faudrait un gouvernement planétaire car décider Etat par Etat c’est ingérable ! Pour l’instant c’est de la science-fiction ». « Faudrait-il une troisième guerre mondiale ? », réagit l’avocat toulousain. « Pour plusieurs scientifiques, il n’y aurait que deux solutions : soit une guerre mondiale, soit une grave menace naturelle qui éradique 70% de la population… Puis on repartirait à zéro », répond l’homme de théâtre, visiblement enclin à imaginer des scénarios rocambolesques ! Et Jean Balbo en rajoute une couche : « Je suis favorable à une sorte de révolution, il y a une mauvaise répartition des richesses et on ne règlera pas le problème par la concertation. » On est loin de l’Espagne et de la Catalogne. Et la conversation n’a pas fini de dériver… Nos invités ont envie de parler de l’affaire Nabilla ! « Elle représente tous ces jeunes qui n’ont aucun repère et qui s’abrutissent devant la télé », lance Jérôme Jalabert, qui ne peut s’empêcher de ressortir l’adage : « On ne peut pas être aussi con sans le faire exprès ! » Tandis que Jean Balbo est presque prêt à assurer la défense de la starlette : « Il n’y a pas de plainte contre elle et sur le couteau, il n’y a que ses empreintes à lui… En France, on a tendance à placer tout le monde en détention provisoire, c’est une étrange conception de la justice ! » Fin de l’interlude.
« En France, on a tendance à placer tout le monde en détention provisoire »
Nous reprenons les rênes de la discussion pour aborder le dernier sujet à l’ordre du jour : le retour des Pink Floyd. Un groupe qui n’inspire pas vraiment notre avocat : « Ce n’est pas ma génération, moi j’ai été bercé à Serge Lama, Jacques Brel et Mireille Mathieu ! » Fou rire général. « Moi c’est ma génération ! », rétorque le directeur de L’Esquisse, amateur de pop-rock. Précisons que les deux hommes n’ont qu’un an d’écart… Pour autant, Jérôme Jalabert n’attend pas grand-chose du retour des Pink Floyd, un de ses groupes favoris : « Je vais écouter leur dernier album, ce sera la même musique qu’avant, mais sans le feu ». Pourquoi ces grandes stars prennent-ils le risque de décevoir leur public ? « Ne plus être sur le devant de la scène, c’est terrible, et si on a peur du ridicule on ne fait plus rien ! Puis financièrement, c’est un joli calcul… », répond l’artiste. Pour Jean Balbo, la tendance est générale : « On voit les chanteurs des années 80 qui reviennent, la tournée Age tendre et tête de bois qui cartonne, il y a une sorte de nostalgie, la sensation que c’était mieux avant, qui expliquent ces succès. » Les Pink Floyd seront certainement une madeleine de Proust pour beaucoup de gens… Nous terminons la discussion en buvant nos cafés sur la terrasse de la Pergola. Les rayons de soleil viennent parfaire le tableau. Elle n’est pas belle la vie ?
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