Pigment. Elle n’aurait jamais imaginé se retrouver un jour sur un échafaudage en pantalon de chantier et chaussures de sécurité, de gros rouleaux de peinture à la main. Pourtant, depuis dix ans, Isabelle Soula est peintre en bâtiment. La jeune femme a trouvé sa place dans cet univers encore très masculin. – Maylis Jean-Préau
© Franck AlixPeinture, ponçage ou plomberie, elle a presque toutes les cordes à son arc ! Après avoir travaillé dans une entreprise de peinture en bâtiment, Isabelle Soula est depuis le mois d’octobre « la femme à tout faire » du couvent Notre Dame de la Compassion à Toulouse. « Je repeins les chambres des sœurs, je change les robinets et je fais des petits travaux d’électricité », explique-t-elle, à la fois féminine et à l’aise dans son pantalon de chantier aux multiples poches. Sa présence suscite parfois l’étonnement : « Certaines religieuses me disent que ce n’est pas un métier pour une femme, mais elles voient que j’y arrive tout aussi bien qu’un homme ! », lance Isabelle Soula. Cette dernière ne se formalise pas de ces remarques. En dix ans, elle a travaillé sur de nombreux chantiers où les femmes, même si elles sont de plus en plus représentées, restent minoritaires. « Je me souviens de mes premiers chantiers dans des banques, d’autres ouvriers me regardaient en se disant que je venais pour faire le ménage ! », glisse-t-elle en souriant. Isabelle Soula s’amuse de ces réactions, car, très vite, elle a montré à ses collègues qu’elle travaillait comme eux. Voire mieux ! « Les clients sont très contents d’avoir des femmes sur leurs chantiers, ils se disent que nous sommes plus minutieuses, ils nous demandent des conseils pour le choix des couleurs… », explique Isabelle Soula.
Cette Bretonne d’origine ne se destinait pourtant pas au bâtiment. « Après le Bac, je ne savais pas quoi faire alors j’ai opté pour un BTS action commerciale », raconte-t-elle. La jeune femme travaille ensuite comme vendeuse dans un vidéo club de Muret. Son licenciement économique se transforme en opportunité : « A 30 ans, j’ai fait un bilan de compétences, je voulais m’orienter vers un métier manuel et ne plus rester dans un espace clos, à faire toujours la même chose ! » Cette démarche lui ouvre trois possibilités : tapissier d’ameublement, peintre et menuisier. Alors, Isabelle Soula part à la rencontre d’artisans dans ces secteurs. Son choix se porte sur la peinture, « le métier où il y le plus de débouchés », et elle obtient un CAP de peintre en bâtiment.
« Le plus difficile c’est d’un point de vue physique, quand il faut déplacer de gros pots de peinture de 20 kilos ou poser du Vescom, un textile mural en panneaux de 1,20 mètre de large. Comme je ne suis pas très grande, c’est parfois compliqué », reconnaît-elle. Étant donné les lourdes charges à porter Isabelle Soula a dû arrêter de travailler à son cinquième mois de grossesse. Autre inconvénient du métier, les chantiers qui nécessitent plusieurs jours de déplacement et pour lesquels « il faut bien s’organiser pour les enfants ». Mais ce qui compte le plus pour la peintre en bâtiment c’est la satisfaction du travail bien fait. « Quand je vais dans la pâtisserie de la rue Croix-Baragnon où nous avons tout refait, je suis assez fière », se réjouit-elle. Aujourd’hui, ses préoccupations professionnelles tournent davantage autour de la difficulté de trouver des chaussures de sécurité en pointure 36 que sur sa place dans ce milieu masculin.
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