PRÉCAUTION. On les touche, on les avale, on les respire. Mais bien qu’ils soient omniprésents, on ne connaît pas suffisamment les perturbateurs endocriniens. Même les scientifiques que nous sommes allés voir ont encore de longues années d’études devant eux. En attendant, un faisceau d’indices laisse à penser qu’en fonction de l’âge ou du sexe, ces substances pourraient être nocives. Alors, comment s’en protéger ? Cette semaine, le JT décrypte les étiquettes et déniche les bonnes pratiques.
L’étude a fait le tour des médias régionaux et nationaux. Présentée aux Rencontres santé publique France qui se sont tenues à la fin du mois de mai, elle révèle notamment qu’il y a davantage de cas de puberté précoce en Haute-Garonne et dans le Rhône que dans d’autres départements. Cette maladie stoppe prématurément la croissance, chez les filles de moins de huit ans et les garçons de moins de neuf ans, et des signes de puberté apparaissent. C’est la première fois que l’on évalue l’apparition de cette maladie à grande échelle. « Nous avons constaté 1173 cas par an chez les filles en France, entre 2011 et 2013, mais aussi des disparités géographiques », explique l’épidémiologiste Joelle le Moal, qui a coordonné ces recherches pour Santé publique France.
En 2014, une précédente étude de la chercheuse et son équipe avait aussi fait grand bruit. Elle révélait qu’entre 1989 et 2005, la concentration et la qualité des spermatozoïdes ont baissé dans la quasi-totalité des régions avec une diminution plus importante en Aquitaine et en Midi-Pyrénées.
Dans les deux cas, les journaux ont pointé la possible implication des perturbateurs endocriniens, notamment des pesticides, Midi-Pyrénées étant une région agricole.
Mais Joelle Le Moal se montre prudent : « C’est une hypothèse sérieuse, mais ce n’est pas la seule. Nous espérons que ces données encourageront les recherches étiologiques (sur les causes de ces maladies NDLR) », souligne la chercheuse. Pour l’heure, son équipe mesure l’évolution de maladies qui ont un lien ‘’possible’’ ou ‘’certain’’ avec l’exposition à certaines substances (pesticides, fongicides, dioxines, solvants organiques, PCB, bisphénols…). En accumulant ces données, le ministère de la Santé souhaite mesurer à grande échelle l’impact des perturbateurs endocriniens sur la santé reproductive de la population française. Mais il est encore trop tôt pour le connaître.
À l’échelle des individus, la tâche est tout aussi complexe. À Toulouse, plusieurs équipes du centre de recherche en toxicologie alimentaire (Toxalim) de l’Inra travaillent à comprendre par quel biais et comment ces molécules se diffusent dans notre corps, comment l’organisme s’en débarrasse et quels effets elles peuvent avoir sur la santé. « Des travaux de Toxalim ont par exemple démontré que le bisphénol A passe par la peau, en accord avec différentes études américaines sur le sujet et que le BPA peut pénétrer dans l’organisme de façon très efficace à partir de la sphère buccale », explique Catherine Viguié, directrice de recherche à l’Inra et animatrice de l’équipe gestation et perturbation endocrinienne. « Nous savons avec certitude que la gestation constitue une période critique de sensibilité aux perturbateurs endocriniens. Nous avons des arguments expérimentaux sérieux pour affirmer que l’exposition, de façon isolée, à différents perturbateurs endocriniens, dont le bisphénol A, durant la période de gestation, dérègle les mécanismes de mise en place de la puberté ».
Dans l’océan de suspicions qui entoure les perturbateurs endocriniens, les certitudes sont donc minces. Difficile dans ce contexte pour le consommateur de s’y retrouver. En attendant que la science apporte des preuves tangibles, appliquer le principe de précaution semble donc être une bonne piste.
Perturbateurs endocriniens : comment déchiffrer les étiquettes ?
Viser l’orgasme sans perturbateurs endocriniens
Commentaires