SUR LE TERRAIN – En cette rentrée, professeurs et élèves vont se familiariser avec les nouvelles méthodes de travail officialisées par la réforme des collèges. L’an dernier, 13 établissements pionniers se sont portés volontaires en Haute-Garonne pour la mettre en œuvre avant sa généralisation. Des enseignants livrent leurs premiers retours.
Apprendre les maths, la technologie et l’histoire en filmant et en visitant les monuments parisiens. Telle a été la méthode innovante mise en place par le collège de Bessières, à une trentaine de kilomètres au nord de Toulouse, l’an dernier. L’établissement s’est porté volontaire pour expérimenter une des mesures phares de la réforme, les fameux Enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI). Leur principe : demander aux élèves de mener des projets concrets en mobilisant les connaissances de plusieurs matières.
À raison d’une heure par semaine, des élèves de 3e de Bessières ont donc travaillé avec les professeurs de mathématiques, d’art plastique, d’histoire et de technologie avec une consigne : imaginer un parcours touristique à Paris pour des visiteurs chinois. « Les élèves ont dû sélectionner des monuments qui permettent de faire appel à plusieurs disciplines », explique François Dalverny, professeur de technologie. « Ils ont par exemple sélectionné le Louvre pour la géométrie de la pyramide, le lieu en lui-même pour le cours d’histoire… En arts plastiques, ils ont pu travailler sur des œuvres visibles au musée. Il fallait aussi qu’ils imaginent un parcours de visite réalisable en quelques jours. Cela leur a appris à s’organiser, à se situer dans l’espace ».
« Ils ont développé des compétences sociales et civiques »
Pour restituer leur expérience, ils ont tourné et monté un film. Et au bout, obtenu une récompense : ils se sont rendus à Paris pour réaliser le parcours qu’ils avaient eux-mêmes pensé. Selon François Dalverny, professeur adhérent au SE-UNSA, syndicat enseignant pro-réforme, cette méthode a beaucoup d’avantages : «Les enfants n’ont pas eu l’impression d’être en cours car ils ont été acteurs. Ils ont développé beaucoup de compétences sociales et civiques, ont appris à travailler en groupe, à mener à bien un projet. Pour certains élèves en décrochage, cela permet, à mon avis, de ne pas rester seuls avec ses difficultés.»
Seulement, cette expérimentation s’est déroulée dans des conditions idéales. « Le chef d’établissement nous a attribué des créneaux supplémentaires pour organiser ces EPI. Mais à la rentrée, ils seront intégrés au quota d’heures de cours classiques », concède le professeur. Un volume horaire global qui, d’ailleurs, baisse à la rentrée. C’est là que, selon les détracteurs de la réforme, le fossé se creuse entre l’ambition et la pratique : « Cela fait dix ans que nous menons des projets interdisciplinaires dans mon établissement, la différence c’est que nous aurons désormais moins d’heures pour le faire», regrette Pascal Martin, professeur d’EPS adhérent au SNES-FSU, syndicat positionné contre la réforme et dont le collège à Nailloux a aussi fait partie des établissements pionniers. Il regrette « qu’aucun bilan de l’expérimentation n’ait été présenté par le rectorat.» À cela s’ajoute le changement de l’ensemble des programmes de la 6e à la 3e, « du jamais vu » selon Carine Rios du SNES-FSU, ou encore la disparition des classes européennes… Leur liste de doléances est longue. Si bien que le syndicat appelle, avec FO, la CGT et Sud, à la grève le 8 septembre. François Dalverny se veut plus magnanime : «C’est vrai qu’il aurait fallu mettre davantage de moyens. Mais nous le voyons comme une année test».
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