Depuis l’annonce du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, de nombreux ressortissants s’engagent dans une procédure de naturalisation française. Une manière de s’opposer à la politique de leur pays et de se prémunir contre l’inconvénient de perdre la citoyenneté européenne.
À un mois des élections européennes, le sort du Royaume-Uni n’est pas encore scellé. Après plusieurs rejets du projet de retrait présenté par Theresa May, Première ministre du Royaume-Uni, les 27 pays membres de l’Union européenne ont entériné un report jusqu’au 31 octobre prochain. Une solution visant à éviter à tout prix le “No deal”, une sortie de l’Union européenne sans accord du Royaume-Uni.
Face à cette situation, nombreux sont les ressortissants britanniques qui décident de prendre les devants et d’assurer leurs arrières. Depuis la victoire du camp désirant quitter l’UE lors du référendum de 2016, la préfecture de Haute-Garonne a vu les demandes de naturalisation plus que doubler. « Nous recensions 134 requêtes de la part de ressortissants britanniques en 2016. En 2017, ce chiffre était de 291 puis, en 2018, nous avons enregistré 277 dépôts de dossiers », déclare l’administration, qui a été contrainte de mettre en place des dispositifs exceptionnels.
Suite à une circulaire ministérielle, la préfecture a ouvert un guichet réservé à la question du droit au séjour pour nos voisins d’outre-Manche, un espace dédié sur son site Internet et un système de prise de rendez-vous en ligne. Une manière d’anticiper les complications administratives que pourrait représenter ce divorce brutal pour les 400 000 sujets de Sa Majesté qui vivent en France, dont 4 000 sont installés dans le département.
« Jusqu’à présent, je n’avais jamais ressenti la nécessité de faire cette démarche de naturalisation. Après le vote, j’ai éprouvé du ressentiment envers mon pays, car je ne voulais pas être obligée de prendre la nationalité française à cause de sa bêtise. Mais nous devons nous préparer au pire : être relégués au rang des pays tiers. Cela remettrait en cause notre couverture sociale et notre droit au travail. Cette situation pourrait même nous empêcher de séjourner en France plus de 90 jours consécutifs sans visa de travail. À la frontière, mon mari, français, serait de nouveau contraint de passer par les douanes. Ce qui ne serait pas mon cas ni celui de nos deux filles », témoigne Vanessa Castaillet-Stone, qui vient de faire une demande de ”naturalisation par déclaration”. Une procédure à laquelle elle a droit, étant mariée à un Français depuis plus de quatre ans, mais dont la complexité administrative la rebute.
« Cela remettrait en cause notre couverture sociale et notre droit au travail »
Une page ”Gaining French citizenship in Toulouse” a même été créée sur Facebook il y a trois ans. Les résidents britanniques souhaitant obtenir la nationalité française y racontent leurs déboires et y partagent leurs inquiétudes. C’est le cas de Richard Morgan, un professeur d’anglais retraité de l’Éducation nationale, à qui il aura fallu plus de deux ans et quatre rendez-vous pour faire valider son dossier. « Cela fait 35 ans que je vis France. Ce sont les accords de Maastricht qui m’ont permis de travailler dans la fonction publique. Pendant des années, j’étais et je me sentais Européen. Je ne supporte pas l’idée de perdre cette identité du jour au lendemain », témoigne celui qui attend encore la réponse officielle de l’administration.
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