Cette aide médico-psychologique est poursuivie en diffamation par son ancien employeur pour avoir dénoncé des maltraitances à l’Institut médico-éducatif (IME) de Moussaron dans le Gers. En attendant l’issue de son jugement, elle souhaite que son combat profite à d’autres.
© Franck Alix« Vous ne choisissez pas d’être lanceur d’alerte, vous le devenez malgré vous», lâche Céline Boussié. Après 5 ans de travail à l’IME de Moussaron dans le Gers, elle a décidé de «rompre la loi du silence» en dénonçant une maltraitance institutionnelle. Des enfants, attachés, enfermés et placés sous camisole chimique (fort dosage de calmant qui rend les patients apathiques). «J’aurais 100 000 fois préféré que ces jeunes soient traités avec dignité, alors il n’y aurait pas eu besoin de dénoncer ces agissements.»
«Faire attention aux autres a toujours été naturel pour moi», celle ci se souvient qu’à l’âge de 12 ans, elle aidait déjà «une grande tante âgée à couper ses morceaux de viande». Des petits gestes altruistes qu’elle juge «trop rares dans une société hyper individualiste» et qui l’ont amenée à choisir une carrière «tournée vers l’humain».
«Nous, les lanceurs d’alerte, nous ne sommes pas les victimes, nous sommes les dommages collatéraux», assure Céline Boussié en pensant aux enfants de l’IME. Endosser ce rôle a bouleversé sa vie. «Vous passez pour un empêcheur de tourner en rond et plus personne ne veut vous embaucher.»
« Je ressens un fort sentiment de solitude mais j’ai la chance d’avoir un comité de soutien », explique-t-elle, reconnaissante. Afin de ne plus laisser seuls ceux qui veulent dénoncer maltraitances et inégalités, elle a créé, en 2014, l’association “Handi’gnez-vous”. «Nous intervenons également auprès de professionnels et de jeunes encore en formation dans le secteur médico-social pour leur apprendre la différence entre bientraitance et maltraitance.» À travers le collectif Metamorphosis, elle réfléchit, avec d’autres lanceurs d’alerte, à un « réel statut» pour les protéger.
Céline Boussié est la troisième salariée de l’IME à se plaindre de maltraitances institutionnelles. Ses anciens collègues ont déjà été reconnus coupables de diffamation. Si le procureur n’a requis aucune peine contre l’ancienne aide médico-psychologique, elle saura, avec le verdict du 21 novembre,si elle doit subir le même sort que ses prédécesseurs.«Si je suis condamnée, je préfère être à ma place et pouvoir me regarder dans la glace.»
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