Atterrissage. Après plusieurs mois d’incertitudes, l’État a annoncé le maintien de sa participation au capital de l’aéroport, levant la possibilité d’une prise de contrôle majoritaire par les actionnaires chinois. Désormais, certains appellent à trouver un autre avenir pour cet aéroport. – Grégoire Souchay
© DR« On ne bouge pas pour le moment ». C’est le ministère de l’Économie et des Finances qui le confirme : l’État maintient pour l’heure sa participation dans la gestion de l’aéroport de Toulouse-Blagnac, propriété à 49,9% de Casil Europe et à 51,1% des collectivités et l’État*. Mais tout public qu’il reste, quel avenir pour cet aéroport dans la région ? Jean-Louis Chauzy, président du Conseil économique, social et environnemental régional (Ceser) d’Occitanie, appelle à « sortir de l’angélisme » et « que soient tirées les leçons de 2014 où Toulouse a essuyé les plâtres de la privatisation ». Sa solution ? Un vrai travail en commun des collectivités et le retour à un opérateur privé français à la place des actionnaires chinois qui n’auraient pas été au rendez-vous pour le territoire : « Nous n’avons pour l’instant pas eu un centime d’investissement pour le parc des expositions, la LGV ou la ligne de métro », déplore Jean-Louis Chauzy, en référence à l’un des engagements de l’actionnaire.
Pas si simple pour les collectivités qui, après avoir longtemps agi séparément sur ce dossier, viennent de réussir la première action commune en obtenant le maintien de l’État. Une décision qui « répond positivement aux attentes fortes exprimées avec constance ces derniers mois », souligne Jean-Luc Moudenc, président de Toulouse-Métropole. À la Région, Didier Codorniou, premier vice-président en charge des aéroports, estime qu’il « n’y a pas de problème Casil » et demande désormais de « la stabilité et du temps » pour « voir si l’actionnaire poursuit les investissements auxquels il s’est engagé ». Quant au Conseil départemental, le président Georges Méric réaffirme « l’importance que le privé, qu’il soit ou non chinois, ne devienne pas majoritaire » et reste ouvert à des prises de parts si l’État venait un jour à vendre, « pourquoi pas avec un financement participatif ? »
« Beaucoup de paroles mais peu d’action », note Christophe Léguevaques, avocat du collectif contre la privatisation de l’aéroport, qui renouvelle son appel « à dénoncer cette privatisation en attaquant au tribunal de commerce ». Si les élus paraissent encore timides, c’est que Casil ne semble pas avoir la moindre intention de lâcher l’aéroport de Toulouse. Le président de la société, Mike Poon, sortait de son silence et déclarait en décembre dernier à La Tribune que « l’aéroport de Toulouse est un investissement de long-terme. Nous n’essayons pas de vendre nos parts de capital. » Et pour cause. Les travaux de la nouvelle jetée pour les vols low-cost et de réorganisation de l’espace commercial sont presque terminés. Avec une hausse du nombre de passagers de 7,5 millions en 2014 à 9,3 millions aujourd’hui, l’affaire s’avère plutôt lucrative pour l’investisseur chinois. Fin du feuilleton ? Loin de là. Car il faut maintenant trouver qui va remplacer le tandem Jean-Michel Vernhes, président du directoire et Anne-Marie Idrac, présidente du conseil de surveillance, tous deux sur le départ d’ici quelques semaines. Alors que l’État se serait jusqu’ici engagé à ne pas aller contre les orientations de l’actionnaire privé via une clause dans le contrat, les nouveaux dirigeants remettront-ils en cause cette solidarité de vote ? Turbulences à venir.
* 10,1% pour l’État, 25% pour la Chambre de Commerce et d’Industrie et 5% chacune pour la Région Occitanie, le Conseil départemental de Haute-Garonne et Toulouse Métropole.
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