La moitié des agriculteurs vont partir à la retraite dans les dix prochaines années, alerte la Mutualité sociale agricole (MSA). Un chiffre préoccupant alors que la France a déjà enregistré une baisse de 34% du nombre d’exploitations entre 1996 et 2017 et que le taux de renouvellement est toujours négatif.
« 14 000 installations pour 20 000 cessations d’activité chaque année »
« Chaque année, nous comptons 14 000 installations pour 20 000 cessations d’activité. Cette situation est d’autant plus inquiétante que, dans l’agriculture, les entreprises sont peu fréquentes », souligne Dominique Bouvier, responsable du service entreprise et installation à l’Assemblée permanente de Chambres d’agriculture (APCA).
Pourtant, le problème ne semble pas venir d’un manque de repreneurs. « Beaucoup de jeunes souhaitent s’installer », confirme Dominique Bouvier. L’explication serait plutôt à chercher dans la difficulté de faire correspondre les projets d’installation avec l’offre d’exploitations disponibles.
« Nous sommes dans une période de transition entre deux modèles. L’agriculture productiviste et très mécanisée mise en place dans les années 1950 ne séduit plus les repreneurs qui se tournent vers des productions moins intensives et plus diversifiées », précise David Fimat, coordinateur national sur la question de la transmission pour le réseau des Centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture en milieu rural (Civam).
Mais au-delà de ce contexte général, la transmission d’une ferme comporte son lot de difficultés pratiques. Et, en premier lieu, les obstacles financiers. « Le faible niveau des
retraites agricoles pousse les exploitants à voir la transmission comme une opportunité pour compléter leur retraite. De plus, l’attachement sentimental crée un décalage entre la
valeur patrimoniale et la valeur économique de l’entreprise. Le prix de vente est un compromis entre les deux », souligne Lea Radzik, chargée d’études installation et
transmission pour l’APCA.
« Le fait que les fermes ne se transmettent plus dans le cadre familial pose également la question de l’habitation. Si les cédants veulent conserver leur logement, le repreneur se retrouvera dans l’impossibilité d’emménager sur son lieu de travail », ajoute David Fimat.
L’accès au capital et la difficulté de financer son projet peuvent aussi compliquer les installations. « Même si c’est très variable en fonction des régions et des productions, les
coûts de reprise peuvent être très élevés. Pour pallier le manque de soutien financier, les repreneurs sont parfois obligés d’avoir recours à des investissements alternatifs ou
participatifs. D’autant que la pression foncière, due à l’urbanisation ou aux velléités d’agrandissement d’autres exploitations, fait grimper le prix des terres », complète
Dominique Bouvier.
Outre la disparition d’acteurs fondamentaux du tissu économique local, l’érosion du nombre d’exploitations agricoles pourrait avoir de nombreuses conséquences.
« En réduisant nos capacités de production, nous nous exposerions à une plus grande dépendance aux exportations. Cela qui aurait un impact sur le coût, la diversité et la qualité des denrées alimentaires », avertit Dominique Bouvier.
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