Fusion. Les derniers chiffres du chômage viennent de tomber, l’occasion de solliciter l’analyse de Serge Lemaitre, directeur régional LRMP du Pôle emploi, et d’aborder avec lui les derniers grands chamboulements qui ont eu lieu dans son établissement public.
Serge Lemaitre, l’Insee fait état de ces derniers chiffres et avance 12% de taux de chômage pour décembre 2015, en Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées (LRMP). Les chiffres de Pôle emploi sont-ils les mêmes ?
Le taux de chômage est de 12.4% exactement, pour un niveau national à 10.2%. Pour la seule ex-région de Midi-Pyrénées, nous étions à 10.4% l’année dernière à la même période. Ainsi, le taux de chômage a augmenté en un an. En ce qui concerne les départements, le Tarn-et-Garonne, le Tarn et les Pyrénées Orientales augmentent le plus et la Haute-Garonne est à +4%.
Cette augmentation du taux de chômage n’est-elle due qu’à la fusion de Midi-Pyrénées avec Languedoc-Roussillon ?
Notre région était à 10.4% quand LR était au-dessus de 14%. C’est donc mécanique, le taux a augmenté à la fusion. Mais il ne faut plus raisonner en prenant en compte les deux anciennes régions. Pôle emploi ne compare plus que les taux de LRMP. D’ailleurs, sur les catégories A, B et C, l’augmentation est de 0.8% sur la grande région avec une augmentation de 4.7% sur l’année.
Comment se répartit l’emploi sur la grande région ?
Les métiers en tension ont quelque peu évolué, mais globalement, nous retrouvons toujours les mêmes, à savoir les services à la personne, l’hôtellerie-restauration, l’agroalimentaire, les commerciaux et l’industrie (plus spécifiquement en Midi-Pyrénées). Même si les économies des deux anciennes régions étaient différentes, elles gardent des caractéristiques similaires comme la saisonnalité et le dynamisme du tertiaire. La fusion n’a donc pas modifié les grands équilibres, simplement elle a exacerbé les points importants. Nous sommes toujours une des rares régions à créer de l’emploi puisqu’au 3e trimestre 2015, l’emploi salarié a crû de 0.7% (0.3% au niveau national). Notre région a créé cette année presque 10 000 emplois quand seulement 50 000 ont été générés au niveau national. Ainsi LRMP pèse 20% des créations d’emploi et nous sommes la région la plus dynamique, avec Rhône-Alpes, en la matière. En revanche, nous attirons énormément ce qui engendre l’arrivée de 20 000 personnes par an. Pour que le chômage n’augmente pas, il faudrait donc créer, à minima, 20 000 emplois supplémentaires par an. C’est ce qui explique que LRMP soit la 2e région le plus dynamique en termes de création d’emploi, mais aussi la 2e en termes de taux de chômage.
« Il faudrait donc créer, à minima, 20 000 emplois supplémentaires par an »
Certaines actions sont-elles plus difficiles à mettre en place, du fait de cette grande région ?
La fusion a éloigné la direction générale de Pôle emploi des territoires, mais de toute façon les grandes actions sont mises en place au niveau national, ce n’est donc pas un problème majeur. En revanche, nous devons faire en sorte de nous ancrer territorialement pour faire remonter des informations terrain et bien les capitaliser. L’enjeu est là ; que l’éloignement de celui qui pilote s’accompagne d’un renforcement d’une présence territoriale. Par exemple, concernant le “plan 500 000” (nombre de demandeurs d’emploi qui auront accès à des formations), nous avons demandé aux bassins d’emploi de travailler sur les besoins en recrutement.
La fusion est donc effective pour Pôle emploi, quelles en sont les conséquences ?
La direction régionale se situera dans la capitale de LRMP où sera basé le Conseil régional. Pour l’instant, il s’agit de Toulouse… Mais nous continuerons à avoir deux sites, un à Toulouse, l’autre à Montpellier, soit 400 salariés répartis sur chaque établissement. Concernant les agences, rien ne change, la fusion n’a donc pas d’impact pour les demandeurs d’emploi et les entreprises. Le fonctionnement de Pôle emploi ne change pas. Il n’y a pas eu et il n’y aura donc pas de suppression d’emploi parmi les employés de Pôle emploi. Simplement, les agents vont se reconcentrer sur leur cœur de métier. En automatisant certaines démarches, ils auront moins d’administratif à traiter et donc plus de temps à consacrer aux demandeurs d’emploi pour les accompagner.
Quelles actions ont été mises en place pour améliorer l’efficacité de Pôle emploi ?
Notre objectif est d’augmenter la personnalisation de la relation conseiller/demandeur d’emploi ou entreprise. Pour cela, il nous faut du temps ! Nous avons donc fait évoluer nos modes d’organisation. D’abord, les horaires de réception du public ont changé : désormais le matin, Pôle emploi est ouvert sur flux, à tous, mais l’après-midi est dédiée aux rendez-vous. Ainsi, le temps que ne passent plus les agents à l’accueil est utilisé pour recevoir personnellement les demandeurs d’emploi. De même, nous incitons les gens à poser des questions par mail lorsqu’elles ne nécessitent pas d’explications particulières.
Nous avons également créé “le nouveau parcours du demandeur d’emploi” qui pourra désormais constituer son dossier d’inscription et d’allocation sur notre site internet sans avoir à se déplacer plusieurs fois. Son accompagnement au retour à l’emploi débute alors plus rapidement. Nous avons d’ailleurs développé notre offre internet pour faire gagner du temps aux demandeurs d’emploi et à nos conseillers. Ainsi, 65% des personnes inscrites sont satisfaites et nous comptons atteindre les 70% rapidement. Nous souhaitons par là même augmenter le nombre de retour à l’emploi, qui l’année dernière était de 346 000 dans la région.
L’annonce de François Hollande du plan de formations de 500 000 demandeurs d’emploi a été actée. Vous qui prônez la formation, comment accueillez-vous cette mesure ?
L’année dernière, 62 000 demandeurs d’emploi ont fait une formation en LRMP, soit plus de 10%. Nous observons que les moins qualifiés ont le plus de mal à trouver un emploi. Ainsi, augmenter le nombre de personnes au chômage en formation est un objectif important. En moyenne, plus de 50% ont retrouvé un travail dans les six mois qui ont suivi la fin de leur formation. Selon les secteurs et le type de formation, nous pouvons arriver à 70 ou 80%. Donc, la formation, ça marche ! Cette mesure répond à des problématiques actuelles. Autre objectif, que les moins qualifiés aient accès à ces formations, soit 30%. Ce plan n’est pas voué à faire uniquement baisser les chiffres du chômage pour une échéance électorale. Nous ne parlons pas de changement de catégorie, mais de réel retour à l’emploi. D’ailleurs, les formations étant assez courtes, les premiers résultats seront visibles bien avant les élections.
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