Ouvrir un compte dans un bureau de tabac, le principe séduit de plus en plus de personnes en Occitanie. En majorité des exclus du système bancaire en situation de précarité, qui trouvent dans les comptes Nickel une solution accessible simplement et sans conditions de revenus. Une réelle alternative ?
Les bornes Nickel continuent de se multiplier chez les buralistes. On en dénombre à ce jour 30 à Toulouse et 89 en Haute-Garonne. En 2018, dans l’ensemble de la région, 216 bureaux de tabac ont rejoint le réseau de distribution pour 36 974 nouvelles ouvertures de ces comptes accessibles à tous, sans conditions de revenus et en cinq minutes. Au total, près de 130 000 comptes Nickel ont été créés en Occitanie depuis leur lancement en 2014 par la société Financière des paiements électroniques (FPE).
Un succès qui traduit la paupérisation d’une partie de la population. Si ses promoteurs assurent que le compte Nickel va plus loin que l’étiquette de banque des pauvres, 52 % de ses détenteurs vivent en dessous du seuil de pauvreté.
« À l’origine, le principe s’adresse aux personnes frappées d’interdit bancaire. Ou à celles qui accèdent au système dans des conditions qui ne sont pas satisfaisantes : plus vous êtes riches, moins les services bancaires vous coûtent cher et inversement. Le but était de réparer cette injustice », présente Jérôme Calot, directeur marketing de Nickel.
Pour ouvrir un ‘’compte sans banque’’, rien de plus simple. Il suffit de se rendre, muni d’une carte d’identité, dans un bureau de tabac équipé d’une borne. En cinq minutes, le client peut repartir avec une carte bancaire et un relevé d’identité bancaire (RIB) permettant de domicilier ses revenus ou ses prestations sociales. La particularité du dispositif est que le découvert est impossible.
Grâce à l’interrogation systématique et instantanée du solde, on ne peut effectuer des opérations que si l’on a approvisionné son compte. Légalement, les personnes frappées d’interdit bancaire peuvent accéder à ces services chez une banque classique, mais c’est une procédure, dite du ‘’droit au compte’’, qui est peu connue et contraignante.
Avec le temps, la catégorie socioprofessionnelle des clients de Nickel a tendance à se diversifier. « Nous séduisons des personnes qui rejettent le fonctionnement des banques et d’autres qui utilisent notre service comme compte secondaire, juste pour sécuriser leurs achats en ligne ou pour un séjour à l’étranger », développe le directeur marketing.
L’ouverture d’un compte coûte 20 euros, le montant de la cotisation annuelle. Et avec les différents frais liés par exemple aux retraits, l’utilisation revient au total à une quarantaine d’euros par an. « L’argent déposé par les clients n’est pas placé et sert uniquement à leurs opérations », promet la société.
1,2 million de comptes sont déjà actifs en France. Il s’en ouvre 30 000 nouveaux chaque mois et « le potentiel de croissance est malheureusement bien présent », selon Jérôme Calot. L’entreprise en espère 2 millions d’ici 2020 et ambitionne de devenir le premier réseau bancaire de France avec 10 000 points de vente. Elle est désormais un acteur incontournable dans le secteur.
À tel point qu’en 2017, BNP Paribas a racheté 95 % de son capital. Si, du côté de Nickel, on assure que l’autonomie opérationnelle sera préservée et que le modèle ne changera pas, le système bancaire classique a réussi l’exploit de tirer profit des clients qu’elle exclut en temps normal.
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