OREILLE – Depuis 15 ans, les bénévoles de l’association la Porte Ouverte accueillent les Toulousains qui ont besoin de parler. Ils proposent une écoute tous les jours de l’année. Avec bienveillance et sans jugement.
©Kevin-Figuier/JTC’est un pas-de-porte discret mais bien situé, dans la rue des Couteliers. Une enseigne bleue avec le nom de l’association indique le chemin aux âmes esseulées. Cet après-midi-là, Catherine Decorse et Nicole Decarne, coprésidentes de l’association, sont chargées des écoutes. Une fois la porte vitrée franchie, elles accueillent les visiteurs d’un sourire bienveillant et d’une poignée de main chaleureuse. Puis, elles invitent à prendre place dans l’une des deux petites pièces destinées aux entretiens. Sur le bureau, une coupelle avec quelques chocolats et, à portée de main, une boîte de mouchoirs pour sécher d’éventuelles larmes. Un téléphone est aussi installé dans chaque pièce. «Il est possible de nous appeler mais nous privilégions toujours l’accueil en face à face», précise Nicole Decarne.
Dans ce lieu où l’on entre sans rendez-vous, tous les profils se présentent. Idées suicidaires, peines de cœur, angoisses, envies de refaire le monde ou encore d’exprimer une opinion sur un sujet d’actualité. «Le point commun, c’est la solitude et bien souvent des situations de précarité.» Solitude qui ne se loge pas toujours où l’on pense. « Nous recevons aussi des personnes ayant des proches, des amis, mais elles n’ont pas le sentiment de pouvoir se confier librement à eux», expliquent-elles.
Une fois la porte du bureau fermée, les bénévoles enfilent leur costume d’écoutant. Ils ne demandent ni nom ni prénom. Une condition pour que la parole se libère. Dès les premières minutes, ils se chargent d’instaurer un climat de confiance. «Parfois, la personne pleure ou reste silencieuse pendant de longues minutes », explique Catherine Decorse. « Ce silence était très dur à gérer au début », se souvient Nicole Decarne, écoutante depuis maintenant neuf ans. « J’ai appris à lui laisser sa place. Si la personne ne le brise pas d’elle-même, nous lançons un discret : “C’est difficile aujourd’hui ?”»
« Nous pratiquons l’écoute non directive », explique Nicole Decarne. « Nous aidons la personne à mettre des mots sur son malaise. Cela passe par exemple par lui faire répéter, reformuler ce qu’elle vient de dire.» Une technique d’écoute spécifique à laquelle la vingtaine de bénévoles de la Porte Ouverte sont systématiquement formés.
« Le simple fait que nous écoutions jusqu’au bout et avec attention soulage. On sent parfois qu’un poids s’évanouit au fil de l’entretien», commente Catherine Decorse. Une écoute destinée aussi à éviter le pire : la Porte Ouverte fait partie du réseau de prévention suicidede Midi-Pyrénées. «On n’hésite pas à demander à une personne qui pourrait passer à l’acte : “Vous avez des idées suicidaires en ce moment?” car elle décroche du réel», précise Catherine Decorse.
L’entretien terminé, la porte de l’association peut être refermée à tout jamais. « On ignore si la personne va mieux», glisse Catherine Decorse. Parfois, certains viennent remercier ou instaurent des visites régulières. « Un homme qui vient très régulièrement est un jour parti en voyage. Et dès son retour de l’aéroport, il nous a rendu visite. Comme si nous étions un SAS avant de retrouver la solitude chez lui », glisse Nicole Decarne. « À ce moment-là, on se dit que c’est chouette ce qu’il se passe ici.»
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