INCOMPREHENSION. Il est des débats plus tranchés que d’autres, plus passionnés ou plus intransigeants. Notre traditionnel déjeuner était un peu tout cela à la fois. Serge Laroze, Thierry Merquiol et Vincent Gibert en ont été les acteurs en décortiquant la généralisation du tiers payant, la dernière “sortie” d’Ibrahimovic et L. Ruquier qui renie E. Zemmour.
Nouveau décor, nouveau menu, nouveaux invités et nouvelles joutes autour de l’actualité nationale du moment. Attablés à l’étage “bibliothèque” du restaurant Monsieur Georges, nos trois invités se délectent d’un tartare de saumon pour les uns et d’un œuf cocotte pour les autres, tout en abordant notre premier sujet du jour, à savoir le projet de loi sur la santé visant notamment à généraliser le tiers payant. Pour Vincent Gibert, « il s’agit d’une bonne mesure de justice sociale car aujourd’hui, de trop nombreux Français hésitent à se soigner pour des raisons financières. » Mais c’était sans compter sur la grogne des médecins généralistes qui dénoncent cette initiative, redoutant une lourdeur administrative. « Ce qu’ils redoutent surtout c’est que ceux qui pratiquent le dépassement d’honoraires soient plus facilement identifiables », rajoute notre convive. Absorbé par sa réflexion, Thierry Merquiol explique finalement que le risque se situe dans le tout gratuit : « les gens ne sauront plus le coût d’un acte médical et finiront par le consommer comme n’importe quel autre produit, de même que les médicaments. Imaginez que tout soit gratuit dans un supermarché, vous restreindriez-vous ? » Pour lui, le tiers payant n’est donc pas une solution. Mais Vincent Gibert ne pense pas les choses de cette façon, relevant que « les gens ne vont pas chez le docteur s’ils ne sont pas malades, ce n’est pas une épicerie ! » Et Thierry Merquiol de le couper : « détrompez-vous, les salles d’attente sont remplies de personnes, notamment des seniors, qui ne sont là que pour créer un lien social ! Est-ce alors à la société civile de payer? » Pour Serge Laroze, la question n’est pas si tranchée, tout dépend du côté duquel on se positionne : « Pour le patient, ne pas avancer d’argent est positif car tous auront accès aux mêmes soins, mais côté médecin, c’est plus compliqué. Ils perdront 1h par jour à remplir de la paperasse et seront débordés par des patients qui consulteront pour rien. C’est la fin de la médecine libérale au profit du fonctionnariat ! » Pour lui, le système de santé est très bien comme il est, les bénéficiaires de la CMU n’avançant aucun frais faute de moyens quand ceux qui le peuvent, payent les consultations. En revanche, il n’est pas contre s’attaquer aux excès. Notamment, l’attribution de la CMU qui est accordée à trop de gens selon lui : « les clandestins ne devraient pas y avoir accès, la France ne pouvant pas accueillir toute la misère du monde ! » Le sang de Vincent Gibert ne fait alors qu’un tour. Posant sa fourchette, il s’interroge : « faut-il alors les laisser crever devant les hôpitaux ? » Thierry Merquiol apaise les tensions, en proposant son analyse : «J’ai bien peur qu’il n’y ait pas de solution tant que les footballeurs seront mieux payés que les médecins. Il faut accepter le trou de la sécu qui est structurellement déficitaire. Il s’agit d’un choix de société. »
« J’ai bien peur qu’il n’y ait pas de solution tant que les footballeurs seront mieux payés que les médecins. »
En parlant de ballon rond, la dernière sortie remarquée de Zlatan Ibrahimovic a retenu notre attention, de même que le risotto à l’encre de seiche ou l’onglet de bœuf, répartis sur la table. L’attaquant du PSG a eu, à la suite du match face à Bordeaux, des propos radicaux sur l’arbitrage : « En 15 ans, je n’ai jamais vu un tel arbitre. Dans ce pays de merde. Ce pays ne mérite pas le PSG. » Ce qui provoque un rictus de mépris chez nos invités. « Ces gens-là vivent dans une bulle, ils n’ont plus le sens de la réalité», s’exclame Thierry Merquiol, avant de rajouter « s’il n’est pas content, il n’a qu’à aller jouer ailleurs ! » Tous les trois s’accordent pour dire que les footballeurs professionnels étant des idoles pour les jeunes, ils se doivent de montrer l’exemple, de se maîtriser devant les caméras. « Il devrait être sanctionné par la FFF afin de montrer à tous que, même les riches ne peuvent pas tout se permettre », avance Vincent Gibert. « La société évolue en ce sens. La violence verbale ou physique s’immisce à la télé et dans le sport, ce qui n’était pas le cas il y a 50 ans », constate Serge Laroze, avant d’être interrompu par Thierry Merquiol : « bien sûr que si, cela existait, le sport a toujours généré de telles tensions ! » Pour eux, le professionnalisme et l’argent brassé par le milieu du foot sont les principaux responsables. « Il faudrait mettre en place un système de salary cap, comme aux USA, pour permettre de générer de l’argent sans déviance », soumet Vincent Gibert, plongeant sa cuillère dans le coulant au chocolat qui vient d’être déposé devant lui.
« Il existe aussi une race des gros nez ou des petits zizis ? »
Le dessert servi, nous plongeons dans le dernier sujet du jour, le regret public de Laurent Ruquier d’avoir contribué à la notoriété d’Eric Zemmour en lui offrant une chronique dans son émission « On n’est pas couché ». Et les réactions ne se font pas attendre, Thierry Merquiol comparant la situation à la séparation du duo comique « Elie et Dieudonné » : « Semoun n’a jamais dit regretté d’avoir fait des sketches avec Dieudonné. Il s’agit d’assumer ! » explique-t-il précisant que « Zemmour aurait de toute façon trouvé une tribune ailleurs. » Et la simple évocation du nom de l’essayiste suffit à enflammer le débat. « J’éprouve un profond dégoût pour ce type et ses idées rétrogrades et extrémistes, d’autant que ma compagne est franco-sénégalaise. Je suis donc très mal à l’aise avec ses propos ! » précise Vincent Gibert qui n’allait pas tarder à s’étonner de la réaction de Serge Laroze qui se demande ce qui choque : « c’est un fait, il existe une race blanche, noire, jaune… » Le sang du socialiste ne fait qu’un tour : « Et si j’ai des enfants avec mon amie, ils seront de race marron clair ? Il existe aussi une race des gros nez ou des petits zizis ? » lance-t-il ironiquement. Le candidat FN aux prochaines élections s’explique : « j’ai appris le terme de race à l’école, par mes professeurs. Je ne fais qu’un simple constat : nous ne sommes pas tous de la même race et ça se voit ! C’est une évidence ! Vous êtes dans un déni de réalité ! » revenant sur le sujet en précisant à ses voisins de table qu’ « ils prônent la liberté d’expression mais souhaitent bâillonner Zemmour. Je ne comprends pas ! » Si les propos tombent sous le coup de la loi parce que racistes, xénophobes ou homophobes, « alors oui, il faut le sanctionner !» lâche Vincent Gibert. « Mais ce qu’il dit est vrai, lorsqu’il constate que la violence vient toujours de la même population et que celle-ci provient des « quartiers. » Oui ou non ? » interroge Serge Laroze. Et c’est Thierry Merquiol qui aura le dernier mot : « Vous vous trompez de causes Mr Laroze, ce n’est pas parce qu’on est d’une couleur ou d’une autre, parce qu’on vit dans tel ou tel quartier qu’il y a problème mais parce qu’on ne propose pas d’ascenseur social… » Le repas, quoique délicieux, a dû rester sur l’estomac de certains !
« La violence vient toujours de la même population et des mêmes “quartiers” »
Par Aurélie Renne et Séverine Sarrat
Mini-bios
Thierry Merquiol : ingénieur de formation, après 15 ans dans l’industrie, il prend la tête de l’incubateur Midi-Pyrénées. Il arrive à l’incubateur Midi-Pyrénées en 2002 comme chargé d’affaires et grimpe rapidement à la direction. 7 ans plus tard, il crée Wiseed, plateforme de crowdfunding qui propose à chacun d’investir dans des start-up présélectionnées.
Vincent Gibert : collaborateur du groupe socialiste à Toulouse métropole, il est au PS depuis l’âge de 17 ans. Ancien président départemental puis secrétaire national du MJS (Mouvement des Jeunes socialistes) il est aujourd’hui responsable de la section socialiste du Nord de Toulouse et est candidat aux départementales sur le canton Toulouse 8.
Serge Laroze : ancien ingénieur de l’aéronautique et professeur à sup-aéro, il entre au FN il y a 35 ans et annonce fièrement son record en nombre de candidatures (32 !). Il explique que son expérience fait de lui un « spécialiste de la politique de terrain » et prépare actuellement les départementales, puisqu’il est candidat FN sur le canton 11.
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