CONSENSUS. Actualité nationale oblige, les discussions matinales de nos invités, Mourad Gherbi et Adeline Guibert, ont été axées sur l’apparition de Manuel Valls dans l’émission “On n’est pas couché” de Laurent Ruquier, les rebondissements dans l’affaire Kerviel et le vote de la suppression des publicités dans les programmes jeunesses. Autant de sujets qui pourraient faire refroidir leurs cafés.
Thés infusés, café fumant et jus d’orange pressé, nos invités sont mis en condition pour commencer une discussion cordiale autour des thèmes choisis par la rédaction. Dans l’actualité brûlante, la participation de Manuel Valls, samedi dernier, à l’émission de Laurent Ruquier, “On n’est pas couché”. Un exercice pour le moins périlleux pour le Premier ministre qui se confrontait là à des interviewers auxquels il n’a pas l’habitude de faire face. Mais est-ce réellement judicieux ? Pour Adeline Guibert, « ce n’est pas le rôle d’un Premier ministre de débattre avec des chansonniers ou des humoristes, cela dévalorise la fonction ministérielle. » Ce sentiment est partagé par Mourad Gherbi qui estime que « cette émission est un programme people, de variété, un ministre n’y a pas sa place ! Il s’agit d’une pure erreur de communication. » Cependant, il reconnaît à Manuel Valls une certaine forme de courage, car « il fallait oser descendre dans l’arène », rajoutant au passage que François Fillon, lui, avait refusé. Nos deux invités ont constaté que le Premier ministre n’avait eu de cesse de vouloir garder son autorité et prôner les valeurs républicaines, tandis que Jean d’Ormesson l’amenait sur les sujets sécuritaires et la droitisation de la gauche. Ceci fait d’ailleurs vivement réagir nos convives. « La sécurité n’est ni une valeur de droite, ni de gauche, c’est l’affaire de tous », décoche Adeline Guibert, « seule la manière de la mettre en place diffère. » À ce propos, « il y a eu un manquement certain ! Cela fait des années que je vois monter la radicalisation dans les quartiers et qu’il aurait fallu mettre des opérations de prévention en place », peste Mourad Gherbi, regrettant l’absence de moyens humains, « car c’est ainsi que s’opère la prévention, pas avec des matraques ! » poursuit-il. La sécurité est d’ailleurs une préoccupation majeure des Français désormais, qui avouent dans un sondage, « avoir plus confiance en l’armée qu’en la politique » en la matière, note Adeline Guibert. Pour elle, il s’agit d’un signe fort que remarque également son vis-à-vis : « ce n’est pas la société qui se droitise, simplement les gens ont peur et les politiques ne semblent pas savoir leur apporter de solutions. » Dans les réponses qu’apporte aujourd’hui le gouvernement, nos deux invités retiennent la déchéance de la nationalité pour les personnes ayant commis un acte terroriste, mais « c’est une mesurette qui rassure les Français. Justement, ces criminels sont Français, il faut donc les juger en tant que tel », analyse l’ancienne adhérente Debout la France. Mourad Gherbi acquiesce et met en avant un processus de déresponsabilisation : « Quand un membre d’une famille commet un délit, le reste de la famille ne change pas de nom ! Ici, c’est pareil ! » Le débat actuel sur la déchéance de nationalité n’est en fait, pour eux, qu’une façon de détourner l’attention des propres responsabilités des politiques et de l’administration : « pendant ce temps, on ne se demande pas où les renseignements généraux ont péché », s’aperçoit l’entrepreneur du jour. « Et même », le coupe Adeline Guibert, « lorsqu’ils parviennent à les arrêter, la justice les relâche ! »
« La sécurité n’est ni une valeur de droite, ni de gauche, c’est l’affaire de tous » Adeline Guibert
Et ce n’est pas le seul cas où nos invités remettent en cause la machine judiciaire. L’affaire Kerviel est un nouvel exemple puisqu’une pièce supplémentaire vient d’être versée au dossier, l’enregistrement d’une ex-magistrate au parquet financier avouant un sentiment de téléguidage de la procédure par la Société Générale. Cette confession appuierait la thèse de Jérôme Kerviel dénonçant une manipulation de la banque. « Ou elle ne savait rien et elle est en faute pour ne pas avoir surveillé son trader, ou bien elle savait et elle est complice », analyse Adeline Guibert, optant pour la thèse du bouc émissaire. « Il est clair que l’on préfère soutenir la finance, et tant pis pour les dommages collatéraux », poursuit-elle. Mourad Gherbi, lui, va plus loin et adoube J. Kerviel : « J’admire cet homme, c’est un Robin des bois des temps modernes. Il n’a fait de tort à personne, il s’en est pris au système financier et cela le rend sympathique aux yeux des Français. » Pour lui, l’homme fait preuve de courage en ne cédant pas devant la pression exercée par la Société Générale. « Beaucoup se seraient déjà suicidés à sa place », concède-t-il même, réitérant sa totale admiration. Ils évoquent alors les affaires Bernard Tapie pour lesquelles il ne peut y avoir de comparaison, car « J. Kerviel ne bénéficie pas de l’appui d’un gouvernement ou n’a pas le bras assez long pour influencer la justice, lui ». S’immisce alors dans la discussion la question de la confiance en la justice. « Sur ce type d’affaires, il conviendrait de convoquer un collège pour éviter qu’un procureur, seul, n’oriente l’enquête, pour éviter les pressions sur un seul homme », avance Mourad Gherbi, immédiatement rejoint par sa voisine de table : « Un genre de comité externe et indépendant, un comité d’audit ! Cela permettrait de lutter contre le dictat de la finance et de l’argent !» Une belle intrigue digne d’un scénario de film à suspense qui, pourquoi pas, « pourrait être sponsorisé par la Société Générale », ironise Adeline Guibert.
« Jérôme Kerviel est un Robin des bois des temps modernes » Mourad Gherbi
Et du sponsoring à la publicité, il n’y a qu’un pas… que nous franchissons allègrement pour aborder le dernier sujet du jour, à savoir la suppression des réclames de France Télévisions dans les programmes pour enfants. L’Assemblée nationale a adopté cette loi… affichant un hémicycle quasiment vide. Sur le fond d’abord, nos invités s’interrogent quant au choix de limiter cette loi au service public. « Nos enfants sont effectivement submergés de publicités et moins de sollicitations des marques sera salutaires… mais pourquoi ne cantonner cette suppression qu’à France TV ? » se questionne Adeline Guibert, relevant que les chaînes publiques perdent une nouvelle fois des recettes. « Les lobbies des chaînes privées n’auraient pas laissé faire », lui répond Mourad Gherbi, « ils se sont attaqués qu’au service public qui, finalement, ne diffuse pas beaucoup de programmes pour enfants. Ainsi, si les parlementaires avaient vraiment décidé d’agir efficacement, ils auraient étendu la mesure à toutes les chaînes. » Mais une nouvelle fois, les deux convives se retrouvent en rebondissant sur la déresponsabilisation déjà évoquée plus haut : « n’est-ce pas aux parents de réguler ce que regardent leurs enfants à la TV et de ne pas acheter de cochonneries puisque c’est quand même eux qui font les courses », arguent-ils, une note d’incompréhension dans leur voix. « D’ailleurs, on peut aussi éteindre la TV, tout simplement ! » conclut Mourad Gherbi… Nous suivons son conseil et coupons le son…
Mini-bios
Adeline Guibert : Cadre dans l’aéronautique, elle fait ses premiers pas en politique il y a deux ans en se présentant aux élections départementales sous l’étiquette Debout la France. Mais elle ne réadhèrera pas, jugeant les idées de DLF au niveau local trop éloignées de celles de Nicolas Dupont-Aignan qu’elle soutient.
Mourad Gherbi : Après avoir été militant contre les discriminations dans des associations telles ‘’SOS Racisme’’, il a intégré le Parti socialiste. Il y franchit les échelons et devient assistant parlementaire et membre du bureau fédéral. Mais il se retire finalement de la politique pour se consacrer à l’entrepreneuriat, développe sa société de montage immobilier à caractère social et prend la présidence du Groupement des TPE 31.
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