Depuis 2012, Florent Sassé est à la tête de la Ferme de Borde, un domaine bio en plein cœur du quartier des Izards, racheté à l’époque par Toulouse Métropole. Dans ce coin de verdure soustrait à la pression immobilière, il pratique une agriculture inventive et à taille humaine.
Bien qu’il assure avec passion et pédagogie la visite des 1,5 hectare de son domaine de Borde Bio aux Izards, Florent Sassé s’éclipse par moments dans ses pensées. Comme s’il profitait de ses explications pour nourrir encore sa réflexion. Bandes fleuries entre deux plantations, mélanges de cultures comme le haricot sous l’aubergine, introduction d’insectes pour venir à bout de pucerons ravageurs de courgette… Autant d’expérimentations qui agrémentent assurément le quotidien du maraîcher et sont à la base de son engagement. « J’ai choisi cette voie pour son aspect à la fois concret et aléatoire, c’est un métier de l’imprévu, il faut sans cesse s’adapter et c’est assez stimulant », affirme Florent Sassé. Pourtant pas issu du monde paysan, l’Orléanais d’origine opte dès le lycée pour un Bac scientifique orienté math/bio avec l’idée de l’agriculture dans un coin de sa tête. L’année suivante, il débarque à Toulouse et s’inscrit à l’école d’ingénieur en agriculture de Purpan. S’ensuivent des boulots dans le conditionnement puis pendant 10 ans pour un grossiste au MIN avant de trancher pour de bon, il sera maraîcher bio. Non pas une révélation mais le fruit de tout un parcours. « Pendant mes études dans les années 90, le bio n’était pas un sujet, on n’en parlait pas, mais la différence d’une école d’ingénieur par rapport aux voies agricoles classiques, c’est peut-être qu’on apprend à apprendre et pas seulement à faire ». C’est par le biais d’un stage qu’il découvre la ferme de Borde, une des dernières encore en activité parmi la ceinture maraîchère qui entourait la ville il y a 50 ans. Aujourd’hui, le domaine qui a été converti en bio il y a 25 ans par les anciens propriétaires, fait figure d’incongruité au milieu des immeubles des Izards et des résidences de Borderouge ou Croix Daurade. En 2012, suite au rachat du site par la métropole, Florent s’installe avec un associé en tant que jeune agriculteur. « Le but du rachat par la collectivité était bien sûr de préserver l’agriculture en ville mais il y avait aussi l’idée de faire parler des Izards pour autre chose que les faits divers », assure-t-il. Depuis, il s’évertue à y faire vivre la biodiversité. Un coup d’œil de l’autre côté de la haie, sur les terres totalement désherbées du voisin non bio, suffit à comprendre la différence. « Un des principaux problèmes du modèle qui domine l’agriculture, c’est la monoculture qui n’existe pas dans la nature et implique que l’on traite de manière abusive pour assurer ses arrières. Ici, notre assurance c’est la diversité, on peut se permettre un peu d’échecs ». Face aux agriculteurs persuadés de devoir nourrir la planète, le maraîcher de 43 ans recrée en ville le lien perdu entre producteurs et consommateurs. Et malgré son air zen, il avoue tout de même une certaine pression à démontrer la viabilité de ce projet pilote : « sans volonté politique, le terrain aurait été dévolu aux promoteurs immobiliers. Lutter contre des ravageurs avec des insectes plutôt que des insecticides est plus cher et compliqué. C’est certes passionnant, mais il faut montrer que cela fonctionne économiquement et c’est le cas ».
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