Pour lutter contre la violence dans ses établissements, la France pourrait s’inspirer de certaines méthodes qui ont fait leur preuve à l’étranger. Petit tour du monde avec Marie-Odile Le Masson, auteure de “Le climat scolaire : pour une école bientraitante”.
S’ils veulent ramener le calme dans leur classe, les professeurs doivent d’abord être bien formés: « Ce n’est pas parce que l’on domine sa matière que l’on sait enseigner. Il n’y a aujourd’hui aucune formation en psychopédagogie en France, sauf pour les professeurs d’éducation physique et sportive », constate Marie-Odile Le Masson, enseignante et formatrice spécialiste de la violence à l’école. Une pratique généralisée dans le monde anglo-saxon, afin que le professeur garde son sang-froid en toute circonstance, n’insulte ni ne se moque jamais d’un élève, refuse tout propos raciste ou sexiste, etc. Un comportement irréprochable qu’il n’est pas évident de maintenir face à une classe dissipée. Pour que l’élève aussi sache maîtriser sa colère, Marie-Odile Le Masson cite l’exemple des programmes de gestion des émotions proposés dans les écoles scandinaves, quel que soit l’âge. On y compte, par ailleurs, beaucoup moins d’enfants par classe, un facteur qui favorise la bonne entente avec les professeurs. Le choix des matières dispensées en est un autre : « En Finlande, ils ont bouleversé les emplois du temps pour laisser une place importante aux activités sportives et artistiques, essentielles à l’équilibre des jeunes. »
L’évaluation est également déterminante, « car elle doit être claire et juste, pour que l’élève sache quelles sont les compétences acquises et celles sur lesquelles il doit s’améliorer, pour qu’il ne se sente pas perdu dans le système ». L’Allemagne a mis en place avec succès ce mode d’évaluation des compétences. Les pays nordiques vont plus loin, la Suède ayant supprimé les notes au primaire et la Norvège n’organisant pas ses cours par classes mais par niveaux.
À l’étranger, on constate aussi que plus le professeur est présent dans l’établissement, plus la vie collective y est apaisée : « Dans le système éducatif canadien notamment, les enseignants rejoignent leur bureau après les cours et restent toujours disponibles pour les élèves. Ils travaillent à temps plein dans les locaux. »
S’il y a un exemple à ne pas suivre, c’est certainement celui des États-Unis, où l’indiscipline s’accompagne parfois du port d’arme. À ce titre, « l’idée de Donald Trump d’armer les professeurs est aberrante et pas vraiment éducative ! Ce serait bien sûr ajouter de la violence à la violence. »
En France, Marie-Odile Le Masson souhaiterait que les enseignants collaborent davantage entre eux, dans leur établissement. « Certains lycées professionnels en zone sensible ne connaissent pas de heurts, parce que l’équipe éducative s’organise et se serre les coudes. » L’experte regrette que l’on n’ait pas poursuivi l’expérience des ABCD de l’égalité, programme de lutte contre les stéréotypes filles-garçons, « qui était un véritable outil contre la violence à l’école » et appelle de ses vœux un débat national, comme il y en a eu en Grande-Bretagne : « Il faut mettre le sujet sur la table et se demander collectivement quelle école et quelle jeunesse nous voulons ».
Formatrice à l’Association pour la rénovation de l’enseignement (Ares) et enseignante en lettres dans des lycées technologiques et généraux depuis le début des années 1980, Marie-Odile Le Masson a publié en 2014, avec Yves Montoya « Le climat scolaire : pour une école bientraitante », aux éditions Chronique sociale.
Commentaires