À l’amiable. Ils fêtent cette année leurs quarante ans d’existence et constituent un pan important de la nouvelle réforme de la justice. Pourtant, les conciliateurs de justice restent encore largement méconnus du grand public. Zoom sur cette fonction pas comme les autres. – Grégoire Souchay
© Franck AlixLe locataire du dessus fait régulièrement trop de bruit ? Votre perceuse a malencontreusement fait irruption au milieu du salon de votre voisin en colère ? Et si vous faisiez appel aux conciliateurs de justice ? Bénévoles disposant d’au moins trois ans d’expérience juridique nommés par le premier président de la cour d’appel, les conciliateurs fêtent cette année leurs quarante ans d’existence. Leur tâche : résoudre tous ces petits conflits, relevant du droit civil, pour tenter de trouver une solution sans avoir besoin d’aller devant le juge. « Nous ne rendons pas la justice », répète Claude Brugel, président de l’association des conciliateurs de justice de la cour d’appel de Toulouse. Ces derniers permettent avant tout d’ouvrir un espace de dialogue entre deux personnes qui ne s’entendent pas. « On essaie d’organiser le débat pour aboutir à un accord à l’amiable », explique-t-il. La moitié des dossiers concernent des conflits entre individus – notamment immobilier – mais aussi le droit de la consommation pour 20% des cas, qu’il s‘agisse de la fourniture d’énergie, des travaux mal réalisés ou de vente par Internet. « Des petits litiges mais qui peuvent rapidement devenir onéreux », soutient Claude Brugel. Sa dernière affaire : « Un locataire qui contestait le montant des charges récupérables par son bailleur. » La solution a été trouvée en moins d’un mois.
Si cela ressemble à une médiation, les deux formules diffèrent : la médiation, exercée par une entreprise privée, est payante et a surtout un cadre et une durée limités définis dès le début par les deux parties. La conciliation, elle, est plus facile, gratuite, pratiquée par des volontaires et débute sur simple prise de rendez-vous d’une des parties par téléphone ou via le site dédié. Ensuite, à l’issue des premiers contacts, le conciliateur organise une rencontre entre les parties : « La confrontation directe permet souvent de se dire des choses inédites », affirme-t-il. En 2017, chacun des 61 conciliateurs de justice rattachés à la cour d’appel de Toulouse a mené en moyenne 53 dossiers à leur terme. Le taux de réussite d’une conciliation est aujourd’hui de 54%. Principale limite : la bonne volonté des parties prenantes qui peuvent à tout moment stopper le processus. « On a toujours cette culture en France, où l’on aime que le juge tranche, mais est-ce bien nécessaire de mobiliser les moyens de la justice pour de petites affaires ? », interroge Claude Brugel. En France, ce mode de règlement reste toutefois restreint et ne concerne ni le droit de la famille (garde d’enfant, divorce) ni les conflits avec l’administration ni bien sûr les crimes et délits. La loi de modernisation de la justice de 2016 fait un premier pas vers ce système plus contractuel en rendant irrecevables les saisies du juge pour les litiges inférieurs à 4000 € qui n’ont pas fait l’objet d’une conciliation. Reste maintenant à trouver de nouveaux bénévoles expérimentés, disponibles une demi-journée par semaine en moyenne pour rendre plus simple la vie quotidienne dans sa ville.
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