REGARDS – Avec l’opération “Rêves de gosse”, l’association Les Chevaliers du ciel permet depuis plus de 20 ans à des enfants en situation de handicap et valides de se rencontrer autour de projets artistiques. Cette année, leur tour de France se termine à Toulouse. Le JT a assisté à un moment de partage entre enfants « ordinaires » et « extraordinaires ».
Un joyeux brouhaha s’échappe du réfectoire de l’ASEI Paul Dottin, un centre éducatif basé à Ramonville, qui accueille des enfants et des adolescents atteints de déficiences motrices ou intellectuelles. Cette après-midi est un peu spéciale. Les professeurs, les éducateurs et le personnel de l’établissement ont poussé les tables et les chaises pour accueillir des jeunes venus de toute l’agglomération toulousaine.
197 élèves de tous âges se retrouvent pour travailler ensemble sur un projet pédagogique autour de la thématique de l’astronomie. Répartis en équipes, vont se mêler ce que l’association Les Chevaliers du ciel appelle des enfants ‘’ordinaires’’ et des ‘’extraordinaires’’, c’est-à-dire en situation de handicap moteur ou mental. Deux tiers des enfants sont en situation de handicap et l’autre tiers est valide.
Une fois tous les élèves arrivés, les ateliers peuvent commencer. « Où est l’équipe des Cosmonautes ? » lance une bénévole du Lion’s club, l’association qui se charge d’organiser toute la logistique du projet. Les jeunes rejoignent leurs tables avant de s’affairer autour de grandes planètes colorées en carton et en papier. « Alors qu’est-ce qu’on pourrait rajouter ? » demande Christel, monitrice éducatrice au centre Guilhem de Venerque, en distribuant des rouleaux de bolduc et des plumes aux élèves.
« En fait, nos élèves ne se sentent pas forcément handicapés », explique Christel, « au travers du regard des autres, nous travaillons à les faire accepter leur différence. On prononce le mot handicap progressivement ». Certains ont eu des expériences douloureuses avec l’école traditionnelle et se tournent donc vers des institutions spécialisées. Pour eux, cette initiative maintient les possibilités de rencontre avec des jeunes valides.
Au-delà d’être un support pour encourager les enfants à travailler ensemble et aborder des rudiments d’astronomie, chaque planète représente également une émotion. La joie, la colère ou la tristesse, comme à cette autre table où sont rassemblés des élèves de l’école Saint-Joseph et du Centre d’éducation spécialisée pour dysphasiques et déficients auditifs (CESDDA) Paulin Andrieu. « Ils ont choisi la tristesse pour exprimer le fait que, parfois, on se moque d’eux », explique l’une des bénévoles du Lion’s club de Toulouse. À côté d’elle, Paul et Pauline, 10 et 12 ans, sont absorbés par leurs dessins. Souffrant de paralysie, la jeune fille est clouée sur un fauteuil. « Elle me dit ce qu’elle souhaite dessiner et moi je le fais », explique Paul, 10 ans, en faisant défiler sur son téléphone portable des modèles d’émoticônes à apposer sur la planète. « Eh oui, parce que moi je ne peux pas », lance Pauline en montrant ses doigts immobiles recroquevillés. Au fil des cinq rencontres organisées par Rêves de gosse depuis janvier, notamment à la Cité de l’Espace, une complicité s’est nouée entre les deux enfants.
« Au fur et à mesure des ateliers, on constate une évolution. La première fois, les enfants ordinaires et extraordinaires ne se parlent pas beaucoup », explique Cécile Truan, enseignante à Paul Dottin. « Les enfants valides sont même un peu interloqués. Puis d’une séance sur l’autre, ceux qui ont la pleine utilité de leurs mains aident spontanément les autres. Ils apprennent à se connaître, puis se cherchent la fois d’après. Ça, c’est très beau », lance-t-elle.
L’horloge du réfectoire annonce déjà 16 heures. Le moment d’apporter les touches finales à chaque planète. Elles seront exposées au village de Rêves de gosse qui se tiendra le 3 juin à Toulouse. Tous les enfants s’y retrouveront pour la dernière fois. Avec une récompense de taille à la clé : un baptême de l’air offert à tous ceux qui ont participé à cette aventure. Une première pour certains d’entre eux compte tenu de la complexité d’embarquer un fauteuil roulant dans un avion. « Cela va surtout marquer le fait qu’ils ont vécu une expérience exceptionnelle », glisse Cécile Truan.
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