Le projet de loi porté par Myriam El Khomri réformant le Code du travail sera présenté le 9 mars en Conseil des ministres et devrait être voté avant l’été. Une réforme qui touche aux heures supplémentaires, aux indemnités prud’homales, aux licenciements… Les syndicats salariés réagissent quand les organisations patronales ne souhaitent pas commenter.
Cédric Caubère
Secrétaire général de l’Union Départementale Cgt 31
« Avec ce projet de loi réactionnaire, le gouvernement ramènerait le monde du travail au temps de Zola. Les salariés ne seraient pas les seuls à en faire les frais. Les petites et moyennes entreprises, créatrices d’emploi, seraient très nombreuses à mettre la clef sous la porte. Quelques mesures phares suffisent à nous en convaincre :
La semaine de travail pourrait atteindre 60 heures, sans que les heures supplémentaires soient payées comme tel. Une entreprise pourrait, par accord, baisser les salaires et augmenter le temps de travail pour une durée de 5 ans. Les temps d’astreinte pourraient être décomptés des temps de repos. Les 11 heures de repos obligatoires par tranches de 24h pourraient être fractionnées. La visite médicale obligatoire serait remplacée par une visite d’information. La capacité collective des salariés à se défendre serait réduite à néant par un contournement systématique du rôle des organisations syndicales… Et pour quelle efficacité ?
Faciliter les licenciements, condamner les salariés à la précarité, baisser les salaires et le pouvoir d’achat créerait toujours plus de chômage et d’inégalités. Il est impossible de sortir de la crise avec de telles politiques. Depuis trente ans, on essaie de relancer l’économie en enlevant des droits aux salariés et nous pouvons observer que ça ne fonctionne pas. La seule mesure efficace reconnue unanimement par les économistes a été le passage aux 35h. Elle a permis de créer 2 millions d’emplois, en améliorant la compétitivité des entreprises et les performances économiques françaises et sans dégrader les finances publiques.
En 2016, réduire le temps de travail à 32h, à l’échelle de notre région, c’est créer arithmétiquement 300 000 emplois. Augmenter les salaires sur la base du SMIC à 2 000 euros, c’est injecter 10 milliards d’euros directement dans l’économie dès la première année. Nous devons avoir le courage de prendre les seules mesures qui peuvent traiter l’urgence sociale. »
Myriam Balavoine
Marie-Line Brugidou
Présidente de l’Union départementale 31 CFE-CGC
« Le gouvernement détricote bien le droit du travail, et ce, sans concertation. Myriam El Khomri, ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, avec cette proposition, est bien loin de respecter le dialogue social, qui dans ce cas, est bien mauvais et inacceptable.
Dans cette situation, on revient à un patronat qu’on a du mal à comprendre, qui ne cherche pas à trouver un consensus avec les syndicats et souhaite seulement tirer la couverture à lui. Pense-t-il à tous ces salariés en difficulté, ces jeunes qui ne trouvent pas d’emploi, ceux qui perdent le leur ou encore aux seniors qui n’en retrouvent pas?
Cette manière de procéder, niant toute aire de négociation, faisant référence à l’article 49.3 afin de faire passer cette réforme de force, soulève bien sûr un mécontentement. Notre confédération s’est alliée avec d’autres syndicats. Des réactions au niveau local, régional et national sont à attendre. Rien n’a été fait au hasard, et si j’ose dire, le gouvernement pousse le bouchon un peu trop loin.
On ne peut pas revenir en arrière de cette façon. Supprimer les 35h, bien que difficiles à gérer pour certaines structures, notamment les services publics hospitaliers, serait une aberration. Instaurer un plafond quant aux indemnités perçues lors d’un licenciement abusif avéré aux Prud’hommes serait renier totalement le droit de ces salariés en détresse, qui seraient jetés à la rue sans rien. Si des irrégularités sont commises, le patronat doit en subir les conséquences. La remise à plat du forfait jour, les heures supplémentaires, les visites médicales… Cette réforme touche à tout ce qui constitue aujourd’hui le droit du travail. Et ce n’est que le début, d’autres choses sous-jacentes seront mises au jour au fur et à mesure. Cela ira de plus en plus loin, et cette situation me semble terrible… »
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