L’émission ‘‘Pièce à conviction’’ diffusée sur France 3 a relancé le débat : nos 577 députés coûtent-ils trop chers à la France ? Entre les salaires, les primes et autres avantages, cela plombe le budget colossal du Palais Bourbon, qui s’élève au total à 520 millions d’euros par an. Outre les élus, les 1300 fonctionnaires de l’Assemblée nationale pèsent également lourd dans le coût de fonctionnement. Comment réformer un système aux usages parfois ancestraux ?
Manuel Bompard, secrétaire national du PG en charge de la 6ème République et secrétaire départemental du PG31.
L’Assemblée Nationale est le lieu où devrait s’exercer la souveraineté populaire. Il ne peut donc pas y’avoir de discussion comptable à son propos sans s’interroger sur son utilité dans le cadre de la 5ème République. Force est en effet de reconnaitre qu’un budget de 520 millions par an, c’est un peu cher pour un parlement fantoche, méprisé par un exécutif qui semble avoir pris goût aux coups de force du 49.3. C’est une note bien salée pour une simple chambre d’enregistrement dans laquelle les débats ne semblent avoir aucun impact sur la nature de la politique menée. Rationaliser l’Assemblée nationale, c’est d’abord rétablir son rôle, en convoquant une assemblée constituante ayant pour mission de construire la 6ème République de demain. Il faudra aussi s’attaquer dans ce cadre aux abus et rétablir une éthique politique et une démocratie digne de ce nom. Ainsi, l’utilisation des indemnités parlementaires devraient être enfin encadrées pour mettre fin au clientélisme (comme l’utilisation de la réserve parlementaire du député Moudenc pour financer 45 associations toulousaines en 2014) et le cumul des mandats (et donc des indemnités) interdit. Un dispositif de révocation des élus, permettant le limogeage à mi-mandat, assurerait un contrôle citoyen sur les engagements des parlementaires. Quant aux fonctionnaires de l’Assemblée nationale, il est bien sûr à la mode de s’en prendre à eux pour masquer les abus des cumulards et des grands patrons (8 millions d’euros de primes de départ pour Michel Combes, dépeceur en chef d’Alcatel Lucent). Leur régime devrait peut-être être réexaminé, en tenant compte notamment de conditions de travail fortement liées à une procédure parlementaire chronophage. Mais il faut refuser fermement les discours ciblant ceux qui font vivre au quotidien notre République. Car ils masquent trop souvent un mépris pour la démocratie elle-même.
Catherine Lemorton est députée de Haute-Garonne depuis 2007, et présidente de la commission des affaires sociales
Certes il faut que l’Assemblée nationale soit réformée, mais il faut faire très attention aux clichés. Il y a des huissiers et des administrateurs qui travaillent dans l’hémicycle jusqu’à 5 h du matin, (les administrateurs des services de l’Assemblée nationale ont pour mission d’assister un député au cours de son mandat en lui apportant une compétence technique, et lui faire comprendre le mécanisme législatif, quel que soit le parti politique du député NDLR). Récemment, j’ai vu une administratrice de ma commission, diplômée de l’ENA, faire un burn-out au point de ne plus pouvoir travailler. Ils sont submergés de travail et ça personne ne le sait, ce n’est jamais relayé dans les médias. Il n’y a d’ailleurs pas assez de moyens humains à l’Assemblée nationale pour pouvoir faire fonctionner correctement l’appareil législatif. Il faut par exemple plus de personnel pour contrôler la mise en application des lois. Une fois la loi votée, il y a des décrets d’application pour mettre en œuvre la loi. Parfois, seulement 20% de ces décrets d’application sont mis en vigueur, ce qui fait que la loi n’est pas exécutée dans son intégralité. Si on prend l’exemple du Bundestag allemand, il y a bien plus de moyens qu’à l’Assemblée nationale. En revanche, on pourrait diviser le nombre de députés par 3, et cela fonctionnerait aussi bien. Il y a des députés qui ne font rien, que l’on ne voit jamais, sauf pour déposer des amendements et ainsi ralentir le processus législatif. On les voit aussi lors des « questions au gouvernement » pour se montrer à la télévision. Enfin je n’attache pas beaucoup d’importance aux fastes liés à l’Assemblée. La Garde républicaine par exemple fait un peu république « désuète ». Il est nécessaire que les institutions de l’Etat conservent de leurs tenues, mais il y a des anciennes pratiques dont on pourrait se passer.
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