Lors de ce premier conseil métropolitain de l’année à Toulouse, les débats pendant les propos liminaires entre élus de l’opposition et de la majorité se sont principalement concentrés sur les mobilités, notamment la place de la voiture dans la ville et le service express régional métropolitain (SERM).
« Le processus d’élaboration du futur Plan de déplacements urbains (PDU) a été lancé hier par le conseil syndical de Tisséo », a annoncé Jean-Luc Moudenc, président de Toulouse Métropole, lors du conseil métropolitain de ce jeudi 8 février. Pour rappel, le précédent, adopté en 2018, avait été définitivement annulé par la Cour administrative d’appel de Toulouse en janvier 2023. Hasard du calendrier ou non, c’est également ce mercredi 7 février que l’enquête mobilités, lancée par Tisséo Collectivités et la Région Occitanie, a été publiée. Cette dernière, menée de septembre 2022 à février 2023 auprès de 16 000 habitants de l’agglomération toulousaine qui se veut être « une photographie des pratiques de déplacements des habitants », révèle notamment que l’usage de la voiture a diminué de 13% entre 2013 et 2023 au profit du vélo (+103%) et de la marche (+30%). « Jamais le recours à la voiture n’a été aussi faible sur le territoire métropolitain. Malgré le record de croissance économique et démographique que nous avons connu dans la même période. L’usage du vélo a doublé, la marche à pied se développe considérablement », remarque Jean-Luc Moudenc avant d’ajouter que « ces résultats valident les choix que nous avons faits et attestent de leur permanence et de leur pertinence ».
Mais Karine Traval-Michelet, présidente du groupe d’opposition Métropole solidaire, écologique et démocratique (MSED), tient à tempérer ses propos. « L’usage de la voiture décroît, mais il reste trop haut en dehors de la ville de Toulouse », note l’élue qui espère que le PDU « soit celui des territoires et de tous ses habitants ». En effet, selon l’enquête mobilités, la voiture est le mode de transport principal des habitants de la périphérie. D’ailleurs, Thomas Karmann, coprésident du groupe d’opposition Métropole écologiste, solidaire et Citoyenne (MESC), souhaiterait que la Métropole réduise la place de la voiture en ville comme à Paris où une taxation des SUV va être mise en place. « Mais pour le moment, dans notre métropole : rien n’est fait », juge-t-il. Agathe Roby, membre du groupe d’opposition Alternative pour une métropole Citoyenne (AMC), est du même avis. « Vous continuez à favoriser la voiture avec la gratuité du stationnement pour les SUV électriques, et la persistance dans le projet de la Jonction Est qui ne fera qu’augmenter le trafic routier », estime-t-elle. Jean-Luc Moudenc lui répond : « Lorsque l’on regarde les crédits consacrés à la mobilité, 90% sont alloués aux moyens de locomotion alternatifs à la voiture individuelle et 10% à l’automobile. Je considère donc que votre propos accusatoire est totalement invalidé ».
Outre la présence encore forte de la voiture, Thomas Karmann a relevé dans l’étude que « si le vélo a vu sa part modale doubler, elle ne passe qu’à 4% en dix ans, soit bien en deçà du potentiel réel de ce mode de transport ». « Aujourd’hui, nous peinons à voir les évolutions structurantes en matière cyclable à l’échelle de notre agglomération, en particulier sur les Réseaux express vélo (REV) », déplore-t-il avant de citer en exemple la Métropole de Lyon qui « a élaboré un plan vélo d’un investissement cinq fois plus élevé que nous (500 millions d’euros) ». Mais Sacha Briand, vice-président de Toulouse Métropole en charge de la modernisation de la collectivité et des finances et membre du groupe de la majorité Aimer Toulouse, n’est pas d’accord avec lui. « Il faut mettre les choses en perspective. Thomas Karmann oublie de préciser que le Grand Lyon est à la fois une métropole et un département. Il devrait donc le comparer aux efforts conjugués que nous faisons avec le Conseil départemental. Il oublie aussi de préciser que la métropole de Lyon compte 1,4 million d’habitants, quand nous ne sommes que 800 000 », souligne Sacha Briand avant de révéler que seulement « 30 millions d’euros du plan vélo du Grand Lyon sont alloués aux infrastructures cyclables contre 100 millions à Toulouse pour les travaux du REV ».
.@karmann_thomas a souligné l'important potentiel de report modal vers le #vélo. Nous notons peu d'évolutions structurantes en matière cyclable dans notre métropole, tandis que la métropole de #Lyon y alloue 5 fois plus de moyens et concrétise son projet de voies lyonnaises🚲 pic.twitter.com/veXgnCXK1e
— Groupe élu·e·s écologistes de Toulouse & Métropole (@Ecolo_ToulouseM) February 8, 2024
Agathe Roby, pour qui « il n’y a pas assez de bus en site propre, pas assez de pistes cyclables », n’est pas convaincue. « Vous êtes trop lent sur les déplacements alternatifs à la voiture. Notre ville étouffe dans les embouteillages. Vous vous présentez comme un bon gestionnaire, mais la réalité, c’est que Tisséo est au bord de la faillite et se demande comment financer le Plan de déplacements urbains qui est en train de se préparer », dénonce l’élue d’opposition. Ce que conteste Sacha Briand. « Nous allons, dans les prochaines semaines, lancer un programme obligataire pour financer une partie du PDU. Nous verrons bien si les investisseurs pensent que Tisséo est en faillite. Si c’est le cas, ils ne vont pas nous prêter leur argent », souligne le vice-président de Toulouse Métropole qui tient à rappeler que « l’année dernière, plus de 400 millions d’euros ont été mobilisés pour assurer le financement des opérations de financement de Tisséo ». « Cette année, ce sera 700 millions », informe-t-il.
Pour le développement des transports sur le territoire, la collectivité compte par ailleurs sur le service express régional métropolitain (SERM). Pour rappel, la Région Occitanie, le Département de Haute-Garonne et Toulouse Métropole ont annoncé à la fin du mois de janvier que Toulouse y était candidate. Une nouvelle saluée par les élus d’opposition qui sont favorables à ce projet comprenant une offre de métros, de bus Tisséo, de cars express à haut niveau de services, des réseaux cyclables et le renforcement de la desserte ferroviaire, avec notamment le RER toulousain. Toutefois, Thomas Karmann se dit surpris quant « à la carte du SERM, qui ne comporte aucune liaison traversant Toulouse, et son calendrier prévu à 2040 ». « Le sujet du transport est urgent, nous ne pouvons pas repousser les alternatives offertes par l’étoile ferroviaire aussi loin dans le temps », déclare l’élu. Jean-Luc Moudenc de lui répondre : « Cette carte a été établie par la Région. Je transmettrai vos remarques à sa présidente. En ce qui me concerne, je souhaite que toutes les collectivités puissent travailler avec la Région, le Département et l’État de manière à affiner et compléter tout cela pour que nous ayons un SERM véritablement faisable ».
Agathe Roby, de son côté, « ne comprend plus la position de la majorité au sujet du RER ». « Vous dites que vous ne mettrez pas un centime dans le RER et ensuite vous signez un plan pour son déploiement avec Madame Delga, tout en mettant les deux pieds sur le frein quant au passage à l’action concrète. Et encore ! Vous ne le faites que parce que le président de la République vous y a incité, bien tardivement par ailleurs », estime-t-elle. Face à ses propos, Sacha Briand a rappelé que la Métropole travaille sur le SERM « depuis toujours ». « Nous sommes cofinanceurs des études multimodales, seuls travaux existants à ce jour sur le SERM. Il est donc inutile de créer une polémique qui n’existe pas », conclut le vice-président.
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