Les automobilistes toulousains ont longtemps exercรฉ leurs talents de magiciens sur la place Belfort. Leur don ? Faire s’รฉvaporer leurs vรฉhicules dans des boites. Puis une heure, un jour ou une semaine plus tard, les faire rรฉapparaรฎtre comme si de rien n’รฉtait. Quel est ce secret ?
Non loin des allรฉes Jean-Jaurรจs, d’autres travaux font face aux futures ramblas. Le centre de la place Belfort est barricadรฉ derriรจre de grandes barriรจres. Sur un banc, Rachid observe les arabesques d’une grue tรฉlescopique, occupรฉe ร dรฉplacer d’imposantes plaques en mรฉtal. ยซ รa fait des annรฉes que je n’ai plus vu de voiture disparaรฎtre. Lร , ils ont dรฉtruit les garages. Mais de toute faรงon, personne ne s’en servait ยป.
Rue Cafarelli, Jacqueline fait les cent pas. Elle se souvient bien des prestidigitateurs de la place Belfort : ยซ Ils arrivaient dans leurs autos. Ensuite, ils ouvraient le garage, rentraient, et puis ressortaient ร pied. Le garage se refermait, mais quand quelqu’un d’autre venait pour ranger son vรฉhicule, le prรฉcรฉdent n’รฉtait plus lร . ยป Il ne faut pas aller bien loin pour trouver un de ces mages. Gรฉrard Seutien est le marchand de journaux de Belfort depuis 1975 : ยซ C’รฉtait juste le parking le plus sรปr et le moins cher de Toulouse. J’y ai souvent garรฉ ma propre voiture ยป, explique-t-il.
Le systรจme s’appelle Parcoville. Inaugurรฉ en 1991 ร Toulouse, il est rรฉvolutionnaire. C’est un ascenseur pour les automobiles qui se charge de les ranger tout seul. Deux รฉdicules installรฉs sur la place Belfort, bien visibles jusqu’au dรฉbut de cette annรฉe, servaient de sas. Le conducteur ouvrait la porte verte ร l’aide d’une carte magnรฉtique. Une fois son vรฉhicule dรฉposรฉ sur un plateau mรฉtallique, ce dernier รฉtait descendu sur un vรฉrin hydraulique dans les entrailles de la Terre. ยซ Personne ne pouvait entrer dans le parking. Je connaissais mรชme des commerรงants du marchรฉ de plein vent qui y laissaient leurs marchandises ยป, indique Gรฉrard Seutien. Fini l’insรฉcuritรฉ et les odeurs dรฉsagrรฉables du parking sous-terrain. 110 places de stationnement รฉtaient ainsi rรฉparties dans deux silos deย 15 mรจtres de profondeur
Lโinnovation a tenu bon pendant 17 ans, mais les problรจmes se sont multipliรฉs. Les vรฉrins tombaient rรฉguliรจrement en panne, en raison d’infiltrations d’eau. ยซ ร la base, j’ai trouvรฉ l’idรฉe excellente, mais il y a eu trop de dysfonctionnements. Il n’รฉtait jamais utilisable ยป, dรฉplore Pierre Cohen, maire de Toulouse lors de l’arrรชt de l’exploitation fin 2008.
Le parking est donc en train d’รชtre dรฉmantelรฉ. ร 15 mรจtres de profondeur, Jean-Christophe Lucotte Le Visage, le chef de chantier, profite de la fraรฎcheur : ยซ On va tout sortir et refermer le dessus avec une dalle de bรฉton. ยป Les travaux devraient s’achever dรฉbut septembre et le Parcoville ne sera qu’un lointain souvenir. Ne resteront plus que les deux immenses cavitรฉs, invisibles depuis la surface.
Gabriel Haurillon
La rรฉdaction
Le Journal toulousain est un mรฉdia de solutions hebdomadaire rรฉgional, รฉditรฉ par la Scop News Medias 3.1 qui, ร travers un dossier, dรฉveloppe les actualitรฉs et initiatives dans la rรฉgion toulousaine. Il est le premier hebdomadaire ร s'รชtre lancรฉ dans le journalisme de solutions en mars 2017.
Voir les publications de l'auteurร lire aussi sur le mรชme sujet :
Actualitรฉs en continu - Culture
Commentaires