Après l’agression présumée de l’élu Samir Hajije à la Bourse du Travail de Toulouse, ce vendredi 22 novembre, le débat quant à la présence de la CGT dans ce bâtiment municipal refait surface. La question a largement animé les propos liminaires du conseil municipal de ce jeudi 28 novembre.
On l’appelle désormais l’affaire Samir Hajije. Le conseiller municipal de Toulouse, en charge des bibliothèques et de la danse, a porté plainte ce samedi 23 novembre pour agression. « Alors qu’il se rendait à une conférence organisée par la CGT, l’accès lui a été refusé avant qu’il ne soit violemment et physiquement pris à partie », précisait son groupe politique Aimer Toulouse, dans un communiqué de presse. Les faits ont eu lieu à la Bourse du Travail, bâtiment où se trouvent les locaux de l’organisation syndicale, qui y organisait le vendredi 22 novembre, une conférence sur la lutte du peuple sahraoui pour l’autodétermination. Classée sans suite par la justice le dimanche même, la plainte n’aura donc aucune conséquence… juridiquement parlant. Car l’incident a réveillé un vieux débat quant à la présence de la CGT à la Bourse du Travail.
En effet, lors du conseil municipal qui s’est tenu ce jeudi 28 novembre, plusieurs élus de la majorité se sont emparés de l’événement pour interroger le rôle et les activités de la CGT à l’intérieur même de la Bourse du Travail de Toulouse, bâtiment municipal dans lequel le syndicat est hébergé gratuitement depuis 130 ans, rappelant que des faits similaires avaient déjà eu lieu en mai 2023. En effet, Nicole Yardeni, adjointe au maire de la Ville rose et ancienne présidente du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France) à Toulouse, et Thierry Sentous, conseiller municipal en charge notamment du mobilier urbain, s’étaient rendus à une conférence intitulée “Liberté pour la Palestine”, organisée par deux associations propalestiniennes et la CGT Haute-Garonne à la Bourse du Travail de Toulouse. Les deux élus y avaient été chahutés et évacués. Mais les versions différaient quant à l’exactitude des faits et surtout, à leur interprétation. Au-delà des altercations qui ont pu avoir lieu lors de ces événements, le doigt est pointé sur leur programmation même : « La CGT 31 sort de son rôle de syndicat professionnel pour organiser des réunions politiques et polémiques, en dehors de son objet social, qui ne devrait être logiquement que la défense d’intérêts professionnels », explique Pierre Esplugas-Labatut, adjoint au maire et porte-parole du groupe Aimer Toulouse.
Une allégation immédiatement nuancée par l’opposition, qui accuse la majorité de vouloir jeter l’opprobre sur le syndicat organisateur, coûte que coûte. « La CGT intervient sur tous les champs de la vie sociale, elle participe au mouvement de transformation sociale par son analyse, ses propositions et son action. Elle agit pour que prévalent, dans la société, les idéaux de liberté, d’égalité, de justice, de laïcité, de fraternité et de solidarité. Elle se bat donc pour que ces idéaux se traduisent dans des garanties individuelles et collectives : la liberté d’opinion et d’expression, d’action syndicale, de grève et d’intervention dans la vie sociale et économique, à l’entreprise comme dans la société », lit Maxime Le Texier, coprésident du groupe Alternative municipaliste citoyenne (AMC), dans un extrait des statuts de la CGT. Selon lui, le syndicat serait donc dans son rôle démocratique en abordant, de quelque manière que ce soit, la question des discriminations et des oppressions.
Après avoir « remédié à la méconnaissance de Pierre Esplugas-Labatut », les élus du groupe AMC estiment alors que les réactions de la majorité suite à la plainte de Samir Hajije n’avaient pour but que de discréditer la CGT pour justifier « leur volonté de stigmatiser toutes les organisations collectives » et « de vendre ce bâtiment historique à des promoteurs ». Une insinuation que l’opposition avance déjà depuis plusieurs années. Car déjà, en 2015, soit un an après l’accession de Jean-Luc Moudenc au Capitole, la CGT 31 avait reçu un ultimatum de la part de la Mairie, lui intimant de quitter les lieux ou de payer un loyer. Dans un courrier daté du 16 février 2015, que la rédaction a consulté, Sacha Briand, signataire de la lettre, donnait au syndicat jusqu’au 30 juin pour libérer les locaux. L’adjoint au maire rappelant que « la seule obligation d’hébergement relevant de la Ville, concerne les unions locales » et non les unions départementales.
Que Jean-Luc Moudenc clarifie ses intentions vis-à-vis de la Bourse du Travail et de la CGT, demandent les élus d’opposition. « Je respecte la CGT ! » s’enquit le principal intéressé. Mais selon lui, le syndicat a détourné la vocation du 19 place Saint-Sernin à Toulouse. « Créé par la Municipalité en 1895, à l’initiative de Jean Jaurès, ce bâtiment a été mis à disposition des syndicats, de tous les syndicats, pour la défense des droits du travail. Mais aujourd’hui, les lieux ne sont occupés que par un seul syndicat, la CGT », constate Jean-Luc Moudenc. Selon lui, la Confédération Générale du Travail s’est accaparée l’édifice et « s’en considère même comme le propriétaire ». Alors, si la Municipalité a finalement accepté d’héberger l’organisation gracieusement, elle exige maintenant des gages de bonne volonté : « Nous leur demandons des éléments d’information de leurs activités pour vérifier que les conditions d’affectation soient respectées, mais nous n’avons pas eu de réponses… » précise le maire de Toulouse, qui clôt le débat en assurant que la Bourse du Travail restera bien municipale.
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