Alors que les élus de Toulouse se sont réunis pour le dernier conseil municipal de l’année, ils ont vivement débattu de la problématique des enfants à la rue. Une centaine serait concernée.
Dernier conseil municipal de l’année pour les élus de Toulouse ce vendredi 1er décembre. Et pas des moindres. Un peu plus de 130 délibérations sont effectivement à l’ordre du jour. Mais avant de les examiner, les élus de la majorité et de l’opposition se sont pliés à l’exercice des traditionnels propos liminaires. Et un sujet était au centre des débats en ce début de conseil municipal : les enfants vivant à la rue. Ils seraient plusieurs centaines dont la famille a reçu une fin de prise en charge à l’hôtel au printemps dernier. Et depuis, la situation ne s’est pas vraiment améliorée pour ces enfants. D’après Antoine Maurice, président du groupe Toulouse écologiste, solidaire et citoyenne (TESC), « 171 étaient à la rue » au mois de septembre dernier.
« Lors du dernier conseil municipal, je vous avais renouvelé notre demande de vous saisir de ce sujet et de travailler avec le préfet pour trouver une solution pérenne afin d’assurer un logement décent à ces enfants et à leur famille. Nous n’avons aucune réponse de votre part. Et ce, jusqu’à ce que les écoles soient occupées à l’initiative de collectifs de parents et de professeurs pour ne pas laisser dormir les enfants à la rue », souligne Antoine Maurice en s’adressant au maire, Jean-Luc Moudenc. Des établissements scolaires avaient en effet été réquisitionnés par le collectif de parents et d’enseignants “Jamais sans toit dans mon école”. Face à « ces occupations totalement illégales », le maire avait alors enclenché une procédure d’expulsion.
Durant ces propos liminaires, il a de nouveau justifié cette décision. « L’école est un lieu d’éducation. Ce n’est pas un hébergement d’urgence. Si on acceptait que l’école soit ouverte à toutes les causes, alors elle ne serait plus l’école. Elle ne remplirait plus correctement son rôle. C’est pour stopper, dès le début, ce risque de dérives que nous avons adopté une attitude de clarté et de fermeté en pensant aux familles toulousaines contre qui se retourneraient d’éventuelles dérives si nous avions laissé faire ou pire encouragé ces occupations », estime Jean-Luc Moudenc. Des justifications qui n’ont pas convaincu Aymeric Deheurles, membre du groupe d’opposition Alternative municipaliste citoyenne (AMC). « Parfois, monsieur le maire, l’humanité passe avant la légalité », juge l’élu.
Jean-Luc Moudenc n’est pas de cet avis : « Nous sommes des élus, nous avons des responsabilités et nous ne pouvons pas nous en tenir à des sentiments humains, aussi louables soient ils. Nous avons un devoir de lucidité lorsque l’on traite ces sujets. Et il nous impose d’analyser la situation en profondeur et d’abord d’interroger l’état de droit ». Et d’après le maire de la Ville rose, c’est au gouvernement qu’il faut se référer sur ces questions. « La loi désigne l’Etat comme responsable de la politique migratoire, de l’hébergement d’urgence et de la scolarisation », rappelle Jean-Luc Moudenc. Une prise de position que dénoncent les élus de l’opposition municipale. Pour Aymeric Deheurles, l’édile « se défausse sur la responsabilité de l’Etat ».
Toutefois, le maire n’en démord pas : « Il est nécessaire que l’Etat prenne ses responsabilités et que cela se fasse en application de la loi. Ce qui veut dire qu’il doit agir, mais pas en considérant que toutes les situations humaines sont identiques. Elles ne le sont pas. Il est donc exclu que l’Etat soit amené à loger tout le monde de manière indifférente. Sinon, cela serait piétiner l’Etat de droit ». Caroline Honvault, aussi membre d’AMC, n’est pas d’accord. « Parmi les droits de l’enfant, il y a celui de tous les enfants à être protégés, de manière inconditionnelle, c’est-à-dire sans conditions, sans critères discriminants liés à une origine ou une situation administrative. Ces enfants sont scolarisés dans les écoles de Toulouse, ce sont donc des Toulousains, vous devez les protégez », exige-t-elle.
Rappelant que « l’hébergement d’urgence est une responsabilité de l’Etat », Jean-Luc Moudenc a indiqué qu’il avait mis à disposition un immeuble de l’ancien Centre d’essais aéronautiques de Toulouse (CEAT), situé à Jolimont, pouvant accueillir une centaine de personnes. « Le préfet m’a dit que ses services étaient en train d’étudier activement notre proposition et qu’une réponse nous serait donnée prochainement. Vous le voyez, l’humanité est là. Mais l’humanité dans la légalité », déclare le maire. Si François Briançon (PS) salue « une bonne décision », ces derniers mots de l’édile l’ont fait tiquer. « Pour nous, le concept d’humanité légale n’existe pas. Il n’y a qu’un principe, celui de la République et donc de la fraternité immédiate », considère-t-il.
« J’ai bien compris que vous pensiez que la notion d’humanité devait prévaloir sur celle de la légalité. Cela voudrait donc dire que le travail républicain fait par les parlementaires est rejeté et qu’on ne considère que le nécessaire sentiment et devoir d’humanité face à une problématique difficile. Je pense que c’est une erreur », appuie le maire. Pour Antoine Maurice, l’erreur est de considérer « qu’un enseignant qui porte secours à un enfant à la rue soit sanctionné ». Là encore, Jean-Luc Moudenc a expliqué les motivations d’une telle décision : « J’ai souhaité sensibiliser le recteur au fait que certains enseignants ont ouvertement favorisé ces occupations illégales et ce, au mépris de leur mission de service public. Et cela ne peut pas rester sans suite ».
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